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Alimentation de l’enfant en situation d’obésité : vers une approche personnalisée et non stigmatisante

La prise en charge nutritionnelle de l’enfant concerné par une obésité repose sur une approche pluridisciplinaire visant à améliorer les habitudes de vie de façon durable. L’objectif n’est pas la restriction mais l’acquisition de comportements favorables à la santé. 

30/05/2025 Par Michèle Reboul
Nutrition Pédiatrie
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Face à un enfant en surcharge pondérale, la prévention de l’obésité – ou de son aggravation – est primordiale. Cela passe par un suivi médical multidisciplinaire s’effectuant en ville ou à l’hôpital, par des professionnels tels que le médecin (généraliste, nutritionniste pédiatre), le diététicien, le psychologue, l’enseignant en activité physique adapté (EAPA). Ou tout autre professionnel pouvant répondre aux besoins du patient et de sa famille. « Ce suivi doit s’effectuer le plus précocement possible. Car si l’enfant grandit en continuant à prendre des kilos régulièrement, il risque de conserver, voire d’aggraver, son excès de poids », souligne la Dre Catherine Tamarindi, médecin nutritionniste à Haguenau (Grand Est) et auteure du livre « Opération obésité » (éditions Frison-Roche).

De fait, la probabilité qu’un enfant en obésité le reste à l’âge adulte varie selon les études, de 20 à 50 % avant la puberté ; à 50 à 70 % après la puberté. Or lorsque cette maladie chronique s’installe dans le temps, elle peut entraîner de nombreux problèmes de santé, à moyen ou long terme : diabète, maladies cardiovasculaires, apnées du sommeil, problèmes veineux, articulaires et même certains cancers… « L’objectif du suivi médical de l’enfant n’est pas la perte de poids. Car il est en pleine croissance. S’il réussit à maintenir son poids ou à ralentir sa prise de poids, il a de grandes chances de ralentir la progression de son indice de masse corporelle à l’adolescence, puis à l’âge adulte, limitant ainsi les complications », indique la Dre Tamarindi. Faire maigrir un enfant et lui proposer un régime restrictif, comportant des interdits alimentaires, est dangereux et bien souvent inefficace. « Cela risque non seulement d’induire des carences nutritionnelles mais aussi, d’engendrer des troubles du comportement alimentaire », ajoute-t-elle.

 

Proposer un rééquilibrage alimentaire...

Le moyen le plus efficace, à ce jour, pour accompagner l’enfant ou l’adolescent en excès de poids est de l’amener à changer son comportement en termes d’alimentation, d’activité physique et d’hygiène de vie (sommeil, gestion du stress...) par le biais de l’éducation thérapeutique. « L’accompagnement nutritionnel est l’un des trois piliers de la prise en soins de l’obésité de l’enfant (avec l’activité physique adaptée et le suivi psychologique, si besoin) », précise la Dre Tamarindi. L’interrogatoire permet d’avoir une idée de la façon dont s’alimentent l’enfant et sa famille au quotidien. Les repas sont-ils bien rythmés dans la journée ? Pris ensemble, à table ? Les parents ont-ils le temps et l’envie de cuisiner du « fait maison » ? Savent-ils composer une assiette équilibrée ? « Nous nous référons aux repères du Programme national nutrition santé et du Haut Conseil de la santé publique pour proposer un rééquilibrage alimentaire et une réadaptation des portions en fonction de l’âge. Les enfants concernés par l’obésité peuvent manger de tout, mais en quantités adaptées, en privilégiant les aliments bénéfiques à leur santé – fruits, légumes, légumes secs, féculents complets ou semi-complets, poissons... – et en limitant la consommation d’aliments gras, sucrés, salés, ultratransformés et de boissons sucrées », explique la Dre Tamarindi. Une attention particulière doit être portée aux goûters et à la façon dont ils sont pris. « Il faut encadrer l’enfant et éviter de le laisser seul lors des goûters. Il faut, par ailleurs, les varier le plus possible et privilégier les produits bruts, ou faits maison : gâteaux, compotes, fruits... », affirme-t-elle.

... incluant l’enfant et sa famille

L’approche médicale doit toujours être personnalisée, non stigmatisante et non jugeante. « En matière de rééquilibrage alimentaire, nous nous adaptons à l’âge, aux goûts de l’enfant, à son contexte familial et socio-économique. Nous impliquons, autant que possible, tous les proches de l’enfant : parents, fratrie, grands-parents, nourrice... Les changements nutritionnels mis en place doivent concerner toute la famille », note la Dre Tamarindi. Les parents doivent éviter de mettre l’enfant à l’écart en lui faisant, par exemple, manger un fruit en dessert alors que les autres auront une glace. Car il pourrait le vivre comme une punition alors qu’il n’est pas responsable de son excès de poids. On ne prive pas non plus l’enfant de chocolat, de biscuits ou de bonbons. « Les aliments interdits deviennent, en effet, d’autant plus attirants et il risquera d’en consommer de façon excessive dès qu’il y aura accès ou en cachette. »

Une relation de confiance médecin- patient est nécessaire pour détecter d’éventuels troubles du comportement alimentaire (TCA). « Ils surviennent, le plus souvent, à l’adolescence. Je propose souvent au jeune patient un temps de consultation seul avant de le voir avec ses parents, car il est parfois plus facile de se confier sur cette question sans la présence des parents. Le médecin (généraliste, nutritionniste ou diététicien) doit être très vigilant concernant le repérage de ces troubles. Si l’hyperphagie boulimique reste fréquente, d’autres TCA tels que la boulimie ou l’anorexie peuvent être présents chez une personne en situation d’obésité. En cas de TCA, outre l’accompagnement nutritionnel, une prise en charge par un pédopsychiatre est, le plus souvent, nécessaire », conclut la Dre Tamarindi.

Références :

D’après les propos de la Dre Catherine Tamarindi, médecin nutritionniste à Haguenau (Grand Est).

Pour en savoir plus :

- Guide du parcours de soins : surpoids et obésité de l’enfant et de l’adolescent(e), Haute Autorité de santé, mis à jour en février 2023.

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