Les CPTS renommées "communauté France santé" : Stéphanie Rist explique l'enjeu
En ouverture des Journées nationales de la Fédération des CPTS (FCPTS), mercredi, la ministre de la Santé est revenue sur l'amendement déposé par le Gouvernement dans le cadre du PLFSS 2026, qui prévoit de renommer la communauté professionnelle territoriale en santé en "communauté France Santé". Une intervention, en visio, qui a provoqué, à quelques reprises, de vives réactions des quelque 1.700 participants présents.
Article initialement publié sur Concours pluripro
"J'avoue que j'ai trouvé ça bizarre." De l'aveu de Stéphanie Rist mercredi matin aux 7e Journées nationales des CPTS à Montpellier, c'était sa toute première réaction à l'annonce du concept d'un réseau France santé par le Premier ministre le 13 septembre dernier. Un concept "lié à l'expérience des maisons France service mises en place en 2017 et dans lesquelles se trouvent beaucoup de services au public. Des endroits où les citoyens peuvent pousser une porte et trouver les réponses à leurs questions administratives", a rappelé la ministre de la Santé.
D'où le souhait, avec ce label Communautés France Santé, de proposer "la même chose" pour la santé. "L'idée de cette labellisation, c'est d'accompagner ce qui existe déjà pour améliorer l'accès aux soins, de le renforcer et de le rendre visible", a précisé Stéphanie Rist, qui a rappelé son "profond attachement" à ces organisations territoriales, consciente "des améliorations qu'elles peuvent apporter sur l'accès aux soins, la qualité de la prise en charge, la coopération entre professionnels…"
Des communautés qui "font beaucoup de boulot mais qui sont peu lisibles des patients, rien que l'acronyme est assez long et difficile à retenir". L'idée est donc, dorénavant, "d'arriver à une étape 2 des organisations territoriales" mais toujours "à partir des professionnels de terrain et pas du tout à partir du ministère de façon descendante", assure-t-elle.
Quelle déclinaison de ce réseau France santé sur le terrain ? La ministre cite quelques exemples. "Vous êtes une MSP qui fonctionne bien et vous avez besoin, pour fonctionner mieux, d'une secrétaire médicale ou d'une infirmière ? On va donc venir labelliser et reconnaître ce travail en coordination, le renforcer, le valoriser avec un financement pour vous permettre de perdurer. On peut aussi pousser un peu plus loin pour avancer sur la prévention et le développement de technologies par exemple. Et ça peut aussi être un centre de santé, un bus de santé – il faut en revanche un minimum de pluripro." Car l'objectif, a insisté Stéphanie Rist, c'est "de rendre plus visibles, plus lisibles, toutes les organisations mises en place ces dernières années – dont les CPTS – afin de créer un réseau de premier recours en soins primaires", et faire en sorte que "chaque citoyen ait une réponse à sa santé, dans les 48 heures, proche de chez lui". En ce sens, le Gouvernement prévoit, a-t-elle rappelé, "5.000 labellisations d'ici 2027 et 15 à 20 par département".
Ce que pourrait changer la labellisation ? "Il n'y a pas, à ce stade, de changement de mission, pas de changement de statut, pas de changement de rapport entre les uns et les autres", assure Stéphanie Rist, qui précise que ce réseau France santé "vient renforcer [ce qui existe déjà] pour obtenir de l'efficacité très vite" : "L'idée centrale, c'est l'efficacité. Et pas de rajouter de la complexité. Au contraire, l'idée, c'est de venir en appui et amener un peu de financement", ajoute la ministre, soulignant "l'hétérogénéité" des modèles qui pourraient être labellisés.
La ministre confie ainsi "[se] battre au ministère pour que France Santé reste l'outil du terrain" afin, notamment, qu'il soit "au cœur du projet de santé du territoire". Et à ses yeux, une pharmacie isolée dans un territoire désertifié, sans réponse aux besoins de soins, mais équipée d'une cabine de télémédecine avec une infirmière, "montre à l'usager qu'il n'est pas abandonné, mais évidemment ce n'est pas une fin en soi. L'idée de France Santé, c'est d'aller dans ces endroits et commencer avec ce qui est possible".
Ce changement d'appellation, "il y en avait besoin", avoue Jean-François Moreul, président de la Fédération des CPTS (FCPTS). D'une part parce que "France santé, ça parle à la population", aux usagers "qui sont aussi des électeurs", et que "là on a un peu péché, et ce qui explique le besoin du Gouvernement de rendre plus lisible le dispositif, c'est qu'on n'a pas suffisamment communiqué sur ce qu'on vit dans les territoires et qu'on sait être une vraie révolution", précise-t-il. Alors oui, reconnaît-il, "le changement ça peut faire peur", mais la FCPTS tente de rassurer : "La CPTS change de nom mais pas de mission. En fait, cette labellisation ne changera pas grand-chose pour les CPTS. Leur rôle sera de dire : 'Sur mon territoire, j'ai telle ou telle zone sur laquelle je dois davantage me concentrer, donc réorienter mon intervention et la rendre plus visible pour la population'."
Avec cette labellisation, la CPTS devient-elle effectrice de soins ? Pour le président de la FCPTS, c'est "sous-entendu" dans l'amendement, "et c'est la grande crainte de beaucoup de personnes", avoue-t-il, tout en tentant de réassurer : "En même temps, on sait, grâce à nos enquêtes, que 30% des CPTS sont déjà dans cette démarche d'effection : éducation thérapeutique du patient, salariat de personnel, travail autour de l'accès médecin traitant, incubateurs de santé solidaire… On est déjà rentré dans ce système." Mais prévient-il, la CPTS "ne sera jamais en concurrence avec les MSP et les CDS ! En revanche, là où il n'y a pas d'offre et où il faut mettre des solutions, ce sera charge à nous, CPTS, de la structurer de façon visible et simplifiée". Pour Jean-François Moreul, ce réseau France Santé s'appuiera sur un "trépied" : "visible, rapide et simplifié".
Un amendement pour les usagers donc, mais "peu importe le nom, l'essentiel, c'est ce qu'il y a derrière", assure à Concours pluripro Gérard Raymond. Pour l'heure, le président de France Assos santé se dit "prudent" car il reste encore plusieurs éléments à clarifier. Un "flou" que relève également Eric May, membre du bureau de la Fédération nationale des centres de santé et président de la CPTS Châtillon Clamart Fontenay-aux-Roses Malakoff Vanves (Île-de-France). "On est comme tout le monde, on s'interroge, on attend parce que ça reste encore très vague. Mais clairement, un amendement publié la veille des Journées nationales des CPTS, c'est une annonce politique. L'amendement va suivre un parcours législatif, peut être modifié… Mais proposer des sites France santé, à l'exemple des maisons France service, ils auraient pu trouver mieux en termes de communication. Car rappelons-le, ces guichets d'orientation ont été mis en place pour pallier la fermeture de services publics."
"D'un côté, on va mettre des moyens conséquents, de l'autre on parle de réduction du budget"
Le financement de ce réseau étant renvoyé aux négociations conventionnelles, le médecin généraliste installé au CMS de Malakoff questionne le "timing", notamment deux mois après les négociations "compliquées et douloureuses" entre les centres de santé et la Cnam. "On se réjouit, lors de ces négos des centres de santé, de quelques avancées en termes de reconnaissance mais financièrement, ça reste très modeste. Et là, on apprend qu'une enveloppe de 130 millions d'euros est prévue pour financer ce réseau. Donc d'un côté, on va mettre des moyens conséquents, de l'autre on parle de réduction du budget…" Ce qu'espère Eric May ? "Si tout cela pouvait aboutir à un service public territorial de santé de proximité – que les centres de santé appellent de leurs vœux –, qui organise et maille tout le territoire, pourquoi pas…"
Si ce texte "redéfinit le paysage de l'exercice coordonné" et "pose les règles du jeu pour les structures d'exercice coordonné", il reste "un peu trop flou et trop vertical", estime AVECsanté, dans une vidéo publiée sur son compte YouTube. Parce que l'amendement "parle de présence médicale mais pas de coordination ou d'équipe pluriprofessionnelle". Parce qu'il "confie beaucoup de responsabilités aux CPTS au risque de brouiller les rôles", estime la Fédération nationale des maisons de santé qui appelle à ce que "le label ne doit pas être une nouvelle couche administrative".
Cet amendement "n'est pas une destruction", tente de rassurer la FCPTS. Ses recommandations ? Reconnaitre les CPTS "en tant que meilleur observatoire du système de santé de leur territoire". Les intégrer "dans les comités de pilotage départementaux pour savoir les solutions qui existent ou pas" et leur donner "l'opportunité de partager leurs connaissances fines des dispositifs pour faciliter l'accès aux soins." Parce que "la territorialisation de la santé, ce n'est pas qu'un slogan, a rappelé Delphine Secret Pouliquen, vice-présidente de la FCPTS. Les CPTS doivent tenir le cap et affronter les creux. Avec la coopération comme boussole".
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