Surpoids et obésité : un nouvel horizon en rhumatologie
Le surpoids et l’obésité sont liés à un risque accru de développer des rhumatismes inflammatoires chroniques. Cette association, dont les mécanismes demeurent mal compris, pourrait ouvrir de nouvelles pistes thérapeutiques et préventives.
Au-delà de l’arthrose, le surpoids et l’obésité favorisent divers rhumatismes inflammatoires chroniques, tels que la polyarthrite rhumatoïde, la spondylarthrite ankylosante et le rhumatisme psoriasique. Plusieurs hypothèses, pas forcément exclusives l’une de l’autre, ont été suggérées pour expliquer ce lien. Parmi elles, une inflammation chronique de bas niveau générée par le tissu adipeux, la production accrue d’auto-anticorps au sein de ce dernier, ainsi que des altérations du microbiote intestinal.
Chez les personnes déjà atteintes de rhumatismes, l’obésité pourrait aussi diminuer la réponse au traitement. Cet effet semble particulièrement marqué pour les anti-TNF alpha, premières biothérapies mises sur le marché, moins pour les classes thérapeutiques plus récentes. Il pourrait en être de même pour certains traitements de fond conventionnels, en particulier le méthotrexate. A l’inverse, d’autres travaux ont montré que la perte de poids était liée à une nette amélioration de la réponse thérapeutique chez les personnes en surpoids/obésité.
Les anti-obésité à l’étude
Les liens complexes entre surpoids/obésité et maladies rhumatismales suscitent un intérêt croissant pour les agonistes du récepteur du GLP-1, médicaments indiqués contre le diabète de type 2 et l’obésité. En particulier contre l’arthrose, maladie qui ne dispose toujours pas de traitement agissant sur la progression de la maladie. Publiée fin 2024, une étude internationale révélait une amélioration de la douleur et de la fonction physique chez des patients obèses atteints de gonarthrose traités par sémaglutide, sans qu’on sache si cet effet n’était lié qu’à la perte de poids, ou également à un effet direct sur l’articulation(1).
Egalement à l’étude, le liraglutide. Cet arGLP1 a fait l’objet d’une étude danoise présentée au congrès de l’Eular, aux résultats en demi-teinte. Menée sur 156 patients atteints de gonarthrose, dont la moitié sous liraglutide 3 mg/jour et l’autre moitié sous placebo, elle a révélé une légère augmentation de l’interligne articulaire dans le bras verum à un an, mais sans différence significative par rapport au placebo. Publiés en 2021, de premiers résultats n’avaient pas montré de bénéfices en termes de douleur(2).
Au lieu de liraglutide oral, une étude internationale coordonnée par le service de rhumatologie de l’hôpital Saint-Louis (Paris), lancée mi-juin, vise à évaluer l’efficacité à trois mois d’une injection intra-articulaire de liraglutide chez des patients atteints de gonarthrose, pas forcément obèses. Publiée en 2022, une étude menée chez la souris a montré que cette stratégie engendrait une réduction de la douleur, une amélioration de la fonction physique, ainsi qu’une diminution des enzymes impliquées dans la dégradation du cartilage(3). Au cas où cette étude s’avérait concluante, l’équipe prévoit d’ores et déjà de lancer une autre étude afin d’évaluer des injections intra-articulaires répétées tous les trois mois.
Pas d’effet préventif démontré
Les nouveaux antidiabétiques, tels que les arGLP1 et les inhibiteurs de SGLT2, pourraient-ils aussi avoir un effet préventif sur la survenue de rhumatismes inflammatoires chroniques, dont la polyarthrite rhumatoïde et la spondylarthrite ankylosante ? "Des résultats précliniques ont montré que ces médicaments présentent des effets immunomodulateurs bénéfiques, mais les résultats quant à d’éventuels effets préventifs vis-à-vis des maladies rhumatismales auto-immunes demeurent limités et contradictoires", constate le Dr Derin Karacabeyli, rhumatologue à l’université de la Colombie-Britannique (Vancouver).
Menée sur la population diabétique de type 2 de cet Etat canadien, son étude n’a pas mis en évidence d’effet significatif des arGLP1 ou des iSGLT2, comparés aux inhibiteurs de DPP4 (neutre sur le poids), quant à l’incidence de diverses maladies rhumatismales. Selon Derin Karacabeyli, "cette étude n’avait peut-être pas la puissance statistique suffisante pour détecter des différences. D’autres études plus larges seront nécessaires, avec un suivi plus long [dans l’étude, il était de moins d’un an après initiation d’un arGLP1, NDLR], en particulier chez de jeunes adultes atteints d’obésité, chez qui le risque de développer ces maladies est plus élevé".
(1) Bliddal H et al., New England Journal of Medicine, 31 octobre 2024
(2) Gudbergsen H et al., American Journal of Clinical Nutrition, 2 février 2021
(3) Meurot C et al., Scientific Reports, 28 janvier 2022
Au programme de ce congrès :
- Virus et bactéries, causes émergentes de rhumatismes
- Polyarthrite rhumatoïde : les résultats mitigés de la prévention
- De nouvelles recommandations sur la polyarthrite rhumatoïde
- L'effet du cannabis sur les maladies rhumatismales encore incertain
- Activité physique et rhumatismes : des bénéfices prouvés, une adhérence problématique
Références :
Congrès de l’European League Against Rheumatism (Eular), Barcelone, 11-14 juin. D’après les sessions "Obesity and its impact on pathophysiology, clinic, and treatment of RMDs", et "Across diseases" et "Treatment options in osteoarthritis - move it or lose it!".
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