Vaccination et grossesse : de la mère à l’enfant, des bénéfices clairement établis
L’importance de (re)vacciner les femmes enceintes à chaque grossesse est confirmée par les études. Il est cependant parfois nécessaire d’adapter certains schémas vaccinaux.
Depuis 2005, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a égrainé ses recommandations pour la vaccination des mères (grippe, Covid-19, coqueluche), auxquelles la France s’est attelée avec délai. Dernières en date, les recommandations françaises concernant leur vaccination contre le VRS.
Deux arguments forts sont en faveur de cette mesure : le premier concerne le transfert des anticorps maternels (IgG) au fœtus. En effet, si le système immunitaire de ce dernier est immature et naïf à la naissance, le sang du cordon comporte des taux d'anticorps souvent supérieurs à ceux de la mère. Ces anticorps passent à l’enfant via un mécanisme actif au niveau d’un placenta sain, dès 13 semaines d'aménorrhée. Le taux d'anticorps transféré dépend de la santé du placenta, de l’âge gestationnel, du délai entre vaccination et accouchement. Il peut être réduit par certaines comorbidités maternelles, notamment infectieuses (VIH, VHB, paludisme), même si l’enfant n’est pas lui-même infecté.
Le second argument est celui des risques associés à une infection bactérienne précoce du nouveau-né : au-delà de la morbimortalité induite par le pathogène, une antibiothérapie mise en œuvre pendant les premières semaines de vie altère à la fois le microbiote intestinal et les titres d’anticorps vaccinaux pendant une durée de 7 à 15 mois, les deux mécanismes étant liés l’un à l’autre.
Des bénéfices à géométrie variable
Les données épidémiologiques confirment le bilan largement favorable de la vaccination pendant la grossesse pour les deux protagonistes, y compris lorsque la femme est revaccinée à chaque grossesse. Seul le bénéfice tiré par chacun d’eux diffère : pour la grippe, le bénéfice est quasiment équivalent pour la mère et le nourrisson de moins de six mois ; concernant le Covid, la vaccination profite surtout à la mère mais elle limite le risque de mort fœtale dues aux thromboses placentaires ; concernant la coqueluche, le VRS et le streptocoque B (contre lequel deux vaccins sont en cours de développement), c’est d’abord le nourrisson qui en tire un très fort avantage.
Quand vacciner ?
Pour la grippe, il est important de vacciner dès le début de la saison épidémique, quel que soit le stade de grossesse ; pour la coqueluche, entre le deuxième et le début du troisième trimestre pour optimiser les taux d'anticorps chez le nouveau-né à la naissance ; et pour le Covid-19, dès la 20ème semaine d'aménorrhée. S’agissant du VRS, la Direction générale de la santé (DGS) s’est prononcée début juillet sur le calendrier de vaccination des mères, avec un début de campagne le 1er septembre (1er aout en Guyane ; 1er octobre à Mayotte). Pourtant, les propositions faites par les sociétés savantes sur le sujet étaient de "vacciner les futures mères dès le mois de juillet pour que les nourrissons soient protégés dès septembre ou octobre, a indiqué le Dr Hervé Haas (pédiatrie, CHU de Nice). Vacciner plus tardivement dans la saison épidémique risque de n’apporter une protection qu’au moment de déclin de l'épidémie."
Tenir compte de l’effet "blunting" ?
L'effet "blunting" est une réponse immunitaire de l'enfant lors de sa primovaccination qui est inférieure à celle attendue du fait de la neutralisation d’une partie de sa réponse par les anticorps maternels dont il a hérités. Cela a été confirmé par une méta-analyse menée auprès de 1 800 nourrissons, qui confirme la moindre immunogénicité des nourrissons de mères vaccinées pendant la grossesse pour la coqueluche, la diphtérie et certains sérotypes de pneumocoque. Cependant, cette vaccination de la mère engendre une augmentation de l'immunogénicité pour le tétanos et l'haemophilus influenzae B. Si les mécanismes à l’origine de ces observations disparates ne sont pas entièrement compris, "il est important de souligner que tout est normalisé lors du rappel vaccinal, et qu’aucune conséquence clinique significative n'a été constatée en vie réelle", tient à rassurer le pédiatre.
Cependant, certains pays adoptent des approches adaptées intégrant ce phénomène : les Pays-Bas ont ainsi décidé de retarder la primovaccination avec le vaccin hexavalent des enfants nés de mères vaccinées pendant la grossesse, en l’administrant à l’âge de 3 mois au lieu de 2 mois, et un rappel décalé du 11e au 12e mois. "Il faudra voir si cette stratégie est pertinente à considérer pour l'évolution de notre propre calendrier vaccinal", a-t-il commenté.
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Références :
Congrès de la Société française de pédiatrie (Lyon,18 - 20 juin). D’après la session "Prévention des maladies infectieuses de la grossesse aux premiers mois de la vie".
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