Former plus de médecins en France : les 3 mesures clés de la loi Neuder votée au Sénat
La proposition de loi de Yannick Neuder visant à supprimer le numerus apertus a été adoptée, mercredi 18 juin, par les sénateurs. Ce texte prévoit également de réintégrer les étudiants français partis faire médecine à l'étranger et de faciliter les reconversions de paramédicaux via des passerelles.
Former plus de médecins sur le territoire français : c'est l'objectif de la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par la territorialisation et la formation, débattue mercredi 18 juin au Sénat. Porté par Yannick Neuder, alors député, et adopté à l'Assemblée nationale fin 2023, le texte a été approuvé hier par les sénateurs, sans modification. Ce vote marque l'adoption définitive de ce texte.
Principale mesure de cette proposition de loi, et non des moindres : la suppression du numerus apertus, venu remplacer le numerus clausus à la rentrée 2020. Depuis cette réforme, "les effectifs [des étudiants en médecine] ont augmenté de 15% en France", a rappelé le ministre chargé de la Santé, en préambule des débats. "C'est un premier pas. Mais ce qu'il nous faut, c'est de réussir un véritable choc de la formation, je dirais même un électrochoc. C'est le sens de cette proposition de loi."
Pour Yannick Neuder, il faut désormais "inverser la logique qui nous a guidés". Depuis la mise en œuvre du numerus apertus, le nombre d'admissions en filières santé dépend avant tout des capacités d'accueil des universités en deuxième et troisième années de premier cycle. Le texte voté prévoit de changer de paradigme, et de conditionner prioritairement le nombre d'admissions d'étudiants en fonction des besoins de santé du territoire. "La définition de ces besoins se fera naturellement en concertation avec les élus, mais aussi avec les doyens, les agences régionales de santé, les préfets et les collectivités, que je veux pleinement associer", a précisé Yannick Neuder, devant les sénateurs.
Autre avancée majeure : faciliter la réintégration des étudiants français partis suivre des études de médecine dans un autre Etat de l'Union européenne (UE). "Nous devons, d'une part, enfin endiguer les départs d'étudiants : 1600 par an selon la Cour des comptes, qui vont se former en Roumanie, en Espagne, en Belgique, au Portugal… faute de notre capacité à les former en France, a poursuivi le ministre chargé de la Santé, cardiologue de profession. Et d'autre part, nous devons faire revenir ces quelque 5000 médecins en formation français qui ont quitté notre pays en mettant en place des dispositifs d'évaluation et d'accompagnement en lien avec les doyens."
"Reconnaître la pleine compétence des professionnels paramédicaux"
L'article 2 du texte prévoit, en effet, que soient définies par décret en Conseil d’État les conditions et modalités de réintégration au cursus national des étudiants français en cours de formation en médecine dans un autre État de l’UE. Cette mesure est toutefois non pérenne, puisqu'elle ne s’appliquera qu’aux étudiants en cours d’études à la date de promulgation de la loi.
Enfin, conformément à la volonté de Yannick Neuder, les sénateurs ont validé l'article 3 de ce texte qui vise à consolider le dispositif de passerelles vers les études de médecine afin de faciliter les reconversions des paramédicaux. "Face à la pénurie de médecins, notamment de généralistes, il convient de reconnaître la pleine compétence des professionnels paramédicaux qui apportent beaucoup à notre système de santé, a soutenu Yannick Neuder, rappelant que ces soignants (infirmières en pratique avancée, kinés...) pourront désormais "intégrer directement le deuxième cycle des études de médecine, après évaluation". Cela "apparaît comme une avancée naturelle", a-t-il estimé.
Une hausse de moyens nécessaires
Si ces mesures ont largement convaincu les sénateurs, ces derniers ont toutefois émis quelques réserves sur la portée – trop limitée – du texte et les moyens à mettre en œuvre pour permettre son application. "Quels financements pour nos universités, pour que celles-ci puissent concrétiser l'ouverture de places en fonction des besoins de nos territoires ? Combien de chefs de cliniques, combien de PU-PH recruter ? Quelles infrastructures universitaires pour accueillir de nouveaux étudiants dans nos territoires, et pas simplement dans les CHU ? […] Voilà ce que nous attendons de vous Monsieur le Ministre, et inutile de dire que cela risque de se heurter à la volonté du Gouvernement de réaliser 40 millions d'euros d'économie dans le budget de l'Etat et dans celui de la Sécurité sociale l'an prochain", a notamment fustigé Céline Brulin, sénatrice du groupe communiste.
Ce vote "renvoit quand même à une responsabilité du Gouvernement, notamment en matière de moyens, parce que sans moyens on sera dans les intentions, mais on ne verra pas d'évolutions", a également prévenu le sénateur LR Philippe Mouiller, également président de la commission des Affaires sociales, après le vote de la proposition de loi.
La suppression du numerus apertus est également déploré par les doyens des facultés de médecine qui ont rappelé, mardi 17 juin, que cette mesure pourrait aggraver la situation en l'absence de "moyens supplémentaires" octroyés aux universités.
Yannick Neuder a, de son côté, tenté de rassurer. Félicitant les sénateurs pour ce vote, le ministre chargé de la Santé a pointé l'importance du rôle des universités. "Nous ne réussirons pas sans [elles]", a-t-il plaidé. Et c'est aussi le message que j'envoie, particulièrement à l'ensemble des universités, à la Conférence des doyens [de médecine]." "Nous serons extrêmement vigilants avec le ministre de l'Enseignement supérieur, Philippe Baptiste, pour pouvoir doter nos universités de moyens pour pouvoir accompagner cette réforme structurante", a assuré Yannick Neuder, affirmant déjà travailler à "une réforme de la loi Pass/LAS qui va permettre aussi de pouvoir mieux prendre en compte les besoins de formation en santé de nos territoires, et quelque part de la France".
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