malbouffe

Aliments ultra-transformés : un collectif de chercheurs internationaux alerte sur les méthodes de l’industrie agroalimentaire

Un groupe de chercheurs internationaux alertent sur les risques pour la santé liés aux aliments ultra-transformés, et sur les méthodes de l’industrie agroalimentaire pour les promouvoir.

19/11/2025 Par Dre Marielle Ammouche
Nutrition
malbouffe

Les aliments ultra-transformés constituent une réelle menace pour la santé, selon ce vaste collectif de chercheurs qui publient, le 18 novembre, une série d'études dans The Lancet. Ils accusent, en outre, l'industrie agrolimentaire de semer le doute sur le sujet. Les industriels appliquent "des tactiques dignes de l'industrie du tabac" pour décrédibiliser les recherches sur les aliments ultra-transformés, a estimé, lors d'une conférence de presse organisée par The Lancet, Chris van Tulleken, l'un des principaux auteurs de l'une de ces études, publiées par la grande revue médicale avec l'ambition de dresser un panorama de référence sur le sujet.

Ces trois études s'inscrivent dans un contexte où les inquiétudes sanitaires s'accroissent autour des aliments ultra-transformés, mais où de vives controverses scientifiques demeurent autour de l'ampleur des risques. Selon certains scientifiques, le terme d'aliments ultra-transformés, qui s'applique en gros à des produits résultant de processus industriels complexes et recombinant des ingrédients variés, recouvre une réalité trop floue, au risque d'un certain alarmisme. Selon d'autres chercheurs, ces doutes sont illégitimes en l'état des connaissances et sont instrumentalisés par l'industrie agro-alimentaire afin de bloquer toute mesure visant à réduire la consommation d'aliments ultra-transformés.

Les auteurs des études du Lancet s'inscrivent clairement dans ce second camp. Parmi eux figure l'épidémiologiste Carlos Monteiro, créateur d'un système dit Nova pour déterminer si un aliment est ultra-transformé. Cette classification sert largement de référence, mais sa méthodologie ne fait pas l'unanimité. Les critiques pointent notamment le fait que, selon les définitions de Nova, des produits comme des laits végétaux ou du pain pourraient être classés comme ultra-transformés, alors qu'ils sont largement considérés comme sains. Carlos Monteiro est le principal auteur de la première étude du Lancet, qui compile une centaine de travaux scientifiques pour établir l'état des connaissances sur les risques des aliments ultra-transformés. Elle conclut que leur consommation est associée à de multiples pathologies, comme l'obésité et le diabète, ainsi, plus largement, qu'une mort prématurée. Il existe des "critiques scientifiques valables" de Nova, admettent les auteurs, mais celles-ci sont sans commune mesure avec l'entreprise de déstabilisation menée par l'industrie. Ils appellent à des études plus poussées pour distinguer l'effet de certains processus industriels, comme par exemple ceux qui aromatisent artificiellement les yaourts.

Interdire la publicité

La seconde étude fait le point sur la consommation d'aliments ultra-transformés et conclut qu'elle représente déjà plus de la moitié des calories absorbées dans des pays comme les Etats-Unis ou le Royaume-Uni.

La troisième étude se penche sur les stratégies des grands groupes de l'agroalimentaire - les huit principaux étant Nestlé, PepsiCo, Unilver, Coca-Cola, Danone, Fomento, Economico Mexicano, Mondelez et Kraft Heinz -, les accusant d'avoir agressivement promu depuis plusieurs décennies des produits fabriqués à partir d'ingrédients de médiocre qualité.

A l'issue de ce panorama global, les chercheurs concluent tous à l'urgence d'agir contre la consommation d'aliments ultra-transformés, notamment en interdisant les publicités visant les enfants, ou en taxant certains de ces produits. L'argent récupéré pourrait, selon les chercheurs, financer des programmes facilitant l'accès à des produits frais pour les ménages aux plus faibles revenus.

Ce vaste dossier a été plutôt salué par des chercheurs n'y ayant pas participé en gardant des réticences quant à certains points méthodologiques. "C'est sûr que les auteurs de ces études sont biaisés en faveur de Nova puisqu'ils l'ont créé", a jugé Hilda Mulrooney, nutritionniste à l'université Kingston de Londres, soulignant que l'on ignorait encore largement par quels mécanismes précis les aliments ultra-transformés pourraient nuire à la santé. Mais "il est largement temps d'agir" face à ces produits, a-t-elle reconnu, citant leur coût élevé "pour les individus, les systèmes de santé et les finances publiques", tout en soulignant que les milieux les plus pauvres sont les plus frappés avec un risque "disproportionné" de maladies chroniques.

Références :

D’après AFP ; et The Lancet (18 novembre)

 

 

Comptez vous fermer vos cabinets entre le 5 et le 15 janvier?

Claire FAUCHERY

Claire FAUCHERY

Oui

Oui et il nous faut un mouvement fort, restons unis pour l'avenir de la profession, le devenir des plus jeunes qui ne s'installero... Lire plus

Photo de profil de Michel Rivoal
10,7 k points
Débatteur Passionné
Anesthésie-réanimation
il y a 10 jours
Cela fait maintenant une bonne quinzaine d'années que la nutrition sort du domaine réservé des "régimes" que ce soit pour maigrir ou l'alimentation des sportifs ou préserver du "mauvais cholestérol" etc. Même nourrir le diabétique était une pratique quasi magique. "Nourrir l'Homme malade" était le thème d'un congrès de la SFNEP* et de l'ESPEN** il y a plus une dizaine d'années qui abordait les problèmes du microbiote et son rôle dans la maladie: le diabète, bien sûr mais aussi nombre de maladies inflammatoires et/ou neurodégénérative et l'obésité. Et la malbouffe chez l'Homme sain, son impact sur ce microbiote, n'est elle pas un facteur de risque de la "maladie" au moins aussi important que la sédentarité et les addictions. Les "nutriscores" sont ils suffisamment informatifs? Les grands groupes industriels vont ils se les approprier ou les détourner? Comment faire pour ne pas mettre dans le même "panier" le régime méditerranéen et son huile d'olive, pauvre en oméga 3, les "bonnes" graisses riches en oméga 3, le beurre, ennemi des coronaires, le sucre (forcément différent du glucose du cycle de Krebs) et l'alcool qui ferait monter le cholestérol au grand désespoir des vignerons? Eh bien, les industriels se comportent comme on s'y attend, défendant leurs investissements et leurs profits plutôt que la santé des consommateurs qui peuvent se soigner dans les thalasso, les cures thermales ou les nouveaux régimes sans gluten, avec repas décalés par le jeûne, Etc... Bien sûr les premières "victimes" de la malbouffe n'ont pas les moyens de se payer les antidotes alors ce sont qui peuvent bien se nourrir qui en profitent! *Société Francophone de Nutrition Entérale et Parentérale ** European Society .... P. E. Nutrition (elle a gardé son sigle mais a changé de nom (E. S. of clinical nutrition & metabolism)
 
Vignette
Vignette

La sélection de la rédaction

Pédiatrie
Moins de médecins, moins de moyens, mais toujours plus de besoins : le cri d'alerte des professionnels de la...
06/11/2025
14
Concours pluripro
CPTS
Les CPTS renommées "communauté France santé" : Stéphanie Rist explique l'enjeu
07/11/2025
12
Podcast Histoire
"Elle était disposée à marcher sur le corps de ceux qui auraient voulu lui barrer la route" : le combat de la...
20/10/2025
0
Portrait Portrait
"La médecine, ça a été mon étoile du berger" : violentée par son père, la Pre Céline Gréco se bat pour les...
03/10/2025
6
Reportage Hôpital
"A l'hôpital, on n'a plus de lieux fédérateurs" : à Paris, une soirée pour renouer avec l'esprit de la salle...
14/10/2025
8
La Revue du Praticien
Diabétologie
HbA1c : attention aux pièges !
06/12/2024
2