Rapatriement des Français partis faire médecine à l'étranger : les doyens, l'Ordre et les étudiants pointent une mesure "injuste"
La Conférence des doyennes et doyens de médecine, le Conseil national de l'Ordre des médecins et l'Association nationale des étudiants en médecine de France ont affirmé, ce mercredi 16 juillet, leur vive opposition à la réintégration anticipée des carabins français partis faire leurs études à l'étranger. Cette mesure est inscrite dans la proposition de loi de Yannick Neuder, adoptée fin juin.
Fin juin, la proposition de loi du ministre chargé de la Santé Yannick Neuder, déposée alors qu'il n'était pas encore au Gouvernement, a été adoptée définitivement par le Parlement. Parmi les principales mesures de ce texte : la réintégration anticipée des étudiants français partis faire médecine dans un autre Etat de l'Union européenne. Un objectif que le ministre a rappelé lors Journées d'été de l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), début juillet.
Souhaitant rapatrier ces carabins "moyennant [une] évaluation", Yannick Neuder a en effet précisé que ce rapatriement ne se ferait pas "au détriment" de ceux qui suivent déjà un cursus dans l'Hexagone. Il a, par ailleurs, assuré que "des moyens supplémentaires" seraient mis en œuvre, évoquant l'ouverture de nouveaux terrains de stage.
Malgré cette promesse, le retour anticipé de ces carabins est loin de faire l'unanimité au sein de la profession. La Conférence nationale des doyennes et doyens de médecine (CDD), le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom) et l'Anemf y sont fermement opposés, comme ils ont tenu à le rappeler ce mercredi 16 juillet dans un communiqué commun.
Pour les trois organisations, la mesure portée par le ministre est "injuste et inéquitable", écrivent-ils. Pour cause : "Les étudiants concernés étaient, soit en situation d'échec dans le processus d'accès aux études de médecine (Pass/LAS), soit voulaient se soustraite à ce parcours auquel sont soumis les autres étudiants." Le choix de partir étudier à l'étranger, "dont on sait les coûts directs (frais d'inscription universitaires) et indirects (voyages, logement) très élevés, constitue [donc] un contournement que seuls les étudiants les plus fortunés peuvent se permettre", ajoutent les trois instances.
Des niveaux variables selon les universités d'origine
Elles pointent également le caractère "redondant", et "à nouveau injuste", de cette mesure puisque les carabins partis réaliser leur externat à l'étranger peuvent déjà revenir passer les EDN et les Ecos en France. "Notons que le retour 'anticipé' en quatrième année de médecine, proposé par le ministère, aboutirait à la réintégration d’étudiants de niveaux très variables voire insuffisants selon les universités d’origine, comme en attestent les résultats médiocres obtenus à l’EN [épreuves nationales du concours de l'internat, NDLR] de 2024 : 83% d’échecs pour les étudiants issus d’universités européennes vs 3% pour les étudiants faisant leur cursus en France."
Par ailleurs, les doyens, le Cnom et l'Anemf pensent que cette mesure sera "inefficace", "car l'admission de ces étudiants qui 'contournent' les parcours classiques surchargeraient brutalement nos universités et aurait indiscutablement une répercussion sur les places offertes aux étudiants ayant suivi leur parcours en France".
La suppression du numerus apertus – également prévue dans la PPL de Yannick Neuder – "n'est pas une 'baguette magique' pour augmenter mécaniquement nos capacités d'accueil et d'encadrement des étudiants déjà en saturation", selon les trois instances. "Dès lors, chaque place offerte à un étudiant dans le cadre d’un retour précoce se fera aux dépens d’une place offerte dans le cursus normal", poursuivent-elles, craignant une hausse des tentatives de contournement du cursus français et une diminution des places disponibles en deuxième année de médecine.
Pour elles, aucun doute : "Les solutions urgentes pour améliorer l'accès aux soins sont ailleurs et une telle mesure ne fera qu'alimenter la dégradation des conditions de formation de nos étudiants." La CDD, le Cnom et l'Anemf appellent ainsi le ministère de la Santé à accompagner les propositions déjà avancées par les doyens, à commencer par la mise en place des assistants territoriaux ou le développement des IPA dans le cadre d'un exercice coordonné par un médecin.
"Pour conclure, insistent les trois instances, il est regrettable que sous prétexte d'une mesure prétendument 'simplificatrice', le ministère prenne le risque d'altérer la qualité de formation médicale en surchargeant nos facultés de médecine avec une proposition injuste, inéquitable, et inefficace pour résoudre le problème des déserts médicaux."
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