"Une violence institutionnelle inédite" : les soignants libéraux vent debout contre la nouvelle mesure anti-fraude du Gouvernement

18/04/2023 Par Aveline Marques
Assurance maladie / Mutuelles
D'après les syndicats de kinés, d'Idel et de médecins, le futur plan de lutte contre la fraude sociale qui sera prochainement présenté par le ministre des Comptes publics pourrait inclure une mesure permettant de suspendre la prise en charge par la CPAM des cotisations sociales d'un professionnel libéral dès qu’une fraude a été détectée. 

 

"On pensait que le paroxysme avait été atteint avec l’adoption sans débat parlementaire de l’article 44 du PLFSS [2023, NDLR] qui a créé la présomption de culpabilité pour les professionnels de santé libéraux. C’était sans compter sur l’inventivité du Gouvernement", s'insurge le syndicat de masseurs-kinésithérapeutes libéraux Alizé, dans un tweet du 13 avril. 

Le syndicat rapporte avoir été informé la veille "dans un mail" de l'intention du Gouvernement d’inclure dans son prochain plan de lutte contre la fraude sociale "une mesure permettant aux CPAM, en cas de fraude, de stopper automatiquement la participation à la prise en charge [des] cotisations sociales" des professionnels concernés. Et ce, "sans attendre les résultats d'une procédure judiciaire". 

 

"Rouleau compresseur administratif" 

Le mail, qu’Egora a pu consulter, a été envoyé par un membre de la Direction de la Sécurité sociale. Il précise que cette suspension de la prise en charge des cotisations est déjà possible (dans la limite de 12 mois maximum) mais qu’elle n’intervient à l’heure actuelle "qu’à l’issue de la procédure conventionnelle pour fraude". "Et pendant la durée de la procédure le professionnel de santé fraudeur continue de bénéficier de tous les avantages de la convention", pointe la DSS. Il est donc proposé de "pouvoir suspendre automatiquement la prise en charge des cotisations sociales par l’Assurance maladie dès lors que des fraudes ont été détectées et avérées à l’encontre d’un professionnel de santé", une disposition "un peu similaire" à celle en vigueur en matière de travail illégal en entreprise. 

"Cette suspension automatique aura donc vocation à s’appliquer uniquement aux cas de fraude et non à tous les cas de réclamation d’indus", affirme la DSS. "Sa mise en œuvre nécessitera au préalable une modification législative voire règlementaire qui précisera les conditions et modalités d’application précises, notamment la durée de la sanction possible selon la gravité des manquements."

Pas de quoi rassurer la Fédération nationale des infirmiers (FNI) qui dénonce la stigmatisation des Idel en matière de fraude. "Le constat que nous dressons aujourd’hui en termes de gestion du risque tient au fait que ces fautes ou abus sont souvent assimilées à de la fraude sans que l’intentionnalité...

de celle-ci ne soit établie, souligne le président du syndicat, Daniel Guillerm, dans sa réponse. Le professionnel isolé ne pèse alors pas lourd face au rouleau compresseur administratif et juridique déployé par certains échelons locaux de l’Assurance maladie." Et le syndicaliste de déplorer "l’arsenal dissuasif déployé depuis quelques années" dans les différentes lois de financement de la Sécurité sociale, qui instaurent un "climat de défiance très prégnant au niveau du partenariat conventionnel". 

 

"Une attaque de plus contre le monde libéral" 

Dans un communiqué daté du 14 avril, le syndicat Convergence infirmière, autre représentant des infirmières libérales, dénonce à son tour "une violence institutionnelle inédite" et déplore "une logique comptable et répressive". Après l'article 102 de la LFSS 2023, qui permet de récupérer des indus par extrapolation des fraudes constatées, "cette nouvelle disposition est encore un peu plus une marque de défiance et même de mépris pour notre profession". "Nous parlons de santé publique, de soignants, de patients, d’êtres humains et nous sommes confrontés à des comptables et à des procureurs qui sont obsédés par une seule chose : récupérer l’argent du 'quoi qu’il en coûte' Covid sur notre dos." 

Les médecins libéraux sont également concernés, confirme à Egora le Dr Richard Talbot, de la FMF, indiquant qu'un communiqué intersyndical est en préparation. La mesure, si elle était adoptée, serait en contradiction avec les "procédures conventionnelles existantes" et constituerait "une attaque de plus contre le monde libéral", pointe-t-il. 

Faut-il octroyer plus d'autonomie aux infirmières ?

Angélique  Zecchi-Cabanes

Angélique Zecchi-Cabanes

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Pourquoi pas? À partir du moment où elles ont la responsabilité totale de ce qu’elles font et que les médecins généralistes n’ont ... Lire plus

 
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