Obésité : une nouvelle définition
Un consensus d’experts internationaux a redéfini la maladie obésité, qui n’est plus fondée uniquement sur le calcul de l’IMC. L’examen du patient permet ensuite de la classer en obésité préclinique ou clinique.
Jusqu’à présent, l’obésité était définie par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) comme une accumulation excessive ou anormale de graisse qui présente un risque pour la santé. Plus concrètement, elle était fondée sur le calcul de l’indice de masse corporelle (IMC) et le classement en trois catégories qui reposent sur des données anglo-saxonnes établissant une relation en forme de courbe en J entre l’IMC et la mortalité. "Ces courbes avaient été commandées par les compagnies d’assurances américaines afin de taxer les 'gros'", a rappelé la Pre Martine Laville (Lyon), professeure émérite de nutrition, lors des JNMG 2025. Ces données restent néanmoins importantes afin d’estimer et suivre l’évolution de l’obésité dans le monde.
Selon de récents chiffres publiés dans The Lancet, 2,2 milliards d’individus sont actuellement en situation d’obésité ou de surpoids. Et on estime que ce devrait être le cas de 3,3 milliards à l’horizon 2035. "On est face à une épidémie mondiale qui touche tous les pays."
La France n’est pas épargnée. Selon Martine Laville, la surveillance épidémiologique dans ce domaine pourrait être meilleure, notamment concernant les enfants. Elle déplore, en particulier, que les données de la médecine scolaire ne remontent pas et que les chiffres soient issus uniquement de données d’enquêtes. Ainsi, l’enquête ObÉpi (débutée en 1997) confirme l’augmentation de l’obésité dans notre pays, avec, en 2020, 8,5 millions de sujets obèses, soit 17 % de la population. En 2024, une étude Odoxa pour La Ligue contre l’obésité (même méthodologie que ObÉpi) montre que cette proportion avait encore augmenté à 18,1 %, et 1 million de Français ont un indice IMC supérieur à 40 kg/m2.
Malgré l’utilité de l’IMC pour l’épidémiologie, on constate, au niveau individuel, une grande variabilité entre l’IMC et la masse grasse : "L’IMC est un reflet de la masse grasse, mais n’est pas l’arme absolue quand on est face au patient", souligne Martine Laville, d’autant que l’IMC ne donne aucune indication sur la santé actuelle du patient.
Diagnostic positif : trois nouveaux critères pour mieux prendre en compte la répartition des graisses
D’où la commission du Lancet, qui s’est penchée sur ce sujet de la définition de l’obésité. 58 experts internationaux de spécialité et de nationalité variées se sont réunis à plusieurs reprises pendant deux ans. Cette définition a ensuite été présentée aux sociétés savantes et aux associations de patients.
La définition de l’obésité repose tout d’abord sur des critères anthropométriques qui définissent l’excès d’adiposité. Outre l’IMC, qui reste un élément facile et important – et qui définit l’obésité si elle est supérieure à 40 kg/m2 – et qui est toujours intégré dans la définition, trois critères ont été ajoutés, parce qu’ils appréhendent mieux la répartition de l’obésité : le tour de taille (≥ 102 cm chez les hommes et ≥ 88 cm chez les femmes), le rapport taille/hanche (> 0,88 chez les hommes et > 0,85 chez les femmes) et le rapport taille/hauteur (> 0,50 pour tous).
Pour diagnostiquer un excès d’adiposité, l’idéal serait de mesurer la masse grasse en impédancemétrie ou Dexa, par exemple. Mais souvent ce n’est pas possible. Le nouveau consensus définit donc cela par un IMC supérieur à 30 kg/m2, associé à l’un des trois critères positifs ci-dessus. En l’absence d’IMC, deux de ces trois critères positifs sont nécessaires.
L’étape suivante est d’évaluer l’impact de cet excès d’adiposité sur la santé du patient. S’il n’y a pas d’atteinte de son mode de vie ni d’atteinte d’organes, on est dans l’obésité préclinique. S’il y a des atteintes d’organes (Mash, Saos, FA…), on est dans l’obésité clinique.
Finalement, cette nouvelle définition permet de bien positionner l’obésité comme une maladie et pas comme une corpulence – ce qui est important quant à la stigmatisation des patients. Ce n’est plus qu’un facteur de risque. Elle oblige aussi à faire un examen clinique avant tout diagnostic.
Une prise en charge adaptée à chaque situation
La prise en charge de l’obésité clinique est centrée sur la réduction du risque et la prévention de la progression vers l’obésité clinique ou d’autres maladies associées à l’obésité. Elle repose sur des conseils pour la perte de poids et des interventions actives, avec un suivi dans la durée. "L’obésité préclinique passe souvent au stade clinique si on ne fait rien, souligne la Pre Laville. Il faut donc suivre ces patients en les aidant sur le mode de vie." La prise en charge de l’obésité clinique est centrée sur l’amélioration ou la disparition des dysfonctions d’organes. Elle repose sur les traitements qui ont fait leurs preuves.
Est-ce que cette nouvelle définition remet en cause les dernières recommandations sur la prise en charge de l’obésité qui viennent d’être éditées par la Haute Autorité de santé ? Non. "En France, cela fait bien longtemps que l’IMC ne suffit pas à établir un diagnostic d’obésité et qu’il faut regarder le patient." D’après ces recommandations, il faut phénotyper le patient avec sept critères : IMC, retentissement médical, retentissement fonctionnel et qualité de vie, troubles psychologiques et neurocognitifs, étiologie de l’obésité, comportement alimentaire, et trajectoire pondérale.
Les recommandations françaises définissent trois niveaux de prise en charge en fonction de la sévérité du patient : soins primaires, soins spécialisés, centres de référence (40 en France actuellement).
Au programme de ce congrès :
- Obésité : de nouveaux outils pour améliorer la prise en charge globale
- Stéatopathies métaboliques : dépister précocement les patients à risque de fibrose avancée
- VIH : mieux intégrer la PrEP comme outil de prévention
- Dysménorrhée chez l’adolescente : quelle prise en charge ?
- Maladie de Basedow : vigilance particulière chez la femme enceinte
- Maladie de Parkinson : une prise en charge à adapter au fil du temps
Références :
D’après la plénière "Obésité - Nouvelle définition et nouveautés dans la prise en charge" aux Journées nationales de médecine générale (JNMG, Cnit Forest Paris-La Défense, 9 et 10 octobre).
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