Fibromyalgie : améliorer le diagnostic
Les premières recommandations sur la fibromyalgie – affection à part entière d’origine multifactorielle reposant sur une dysrégulation du système de modulation de la douleur – viennent d’être publiées par la Haute Autorité de santé.
La fibromyalgie, douleur nociplastique chronique par essence, touche environ 1,6 % des Français, avec une prédominance féminine. L’OMS la définit comme une douleur chronique, primaire ou secondaire, d’une durée supérieure à trois mois. La fibromyalgie primaire touche une ou plusieurs régions anatomiques sans autre pathologie. "Des douleurs intenses surviennent malgré l’absence de lésion. Ces patients peuvent avoir une allodynie, une hyperalgésie, des douleurs spontanées ainsi qu’une hypersensibilité (au bruit, à la lumière, aux goûts, aux odeurs, etc.)", a prévenu la Pre Françoise Laroche, rhumatologue et algologue, responsable du centre d’évaluation et de traitement de la douleur (hôpitaux Saint-Antoine et Rothschild), présidente du Collège des enseignants de médecine de la douleur, lors des JNMG 2025.
La fibromyalgie secondaire est associée à de l’arthrose ou à une pathologie inflammatoire chronique (RIC, Mici…) qui, au-delà de trois mois et malgré son contrôle, va conduire à une douleur nociplastique. "Une articulation peut être parfaitement indolente, mais le périarticulaire – tendons, insertions tendineuses, muscles et surtout les fascias (aponévroses) – est douloureux", précise-t-elle.
"First" est un auto-questionnaire facilitant le dépistage de la fibromyalgie. Les critères diagnostiques sont des douleurs diffuses touchant au moins quatre régions du corps depuis plus de trois mois pouvant être associées à des troubles cognitifs, de la fatigue, des céphalées, des crampes abdominales. "Environ deux tiers des patients n’ont pas de formes graves, mais un tiers doivent aller dans un centre de la douleur", complète-t-elle.
Implication du système nerveux central
Des phénomènes de sensibilisation reflètent des dysfonctionnements au niveau central, médullaire et en périphérie, notamment au niveau des fibres A delta et C. Les faisceaux inhibiteurs descendants, freins naturels à la douleur, sont de moins en moins efficaces avec le temps en cas de douleur chronique.
Une élévation des neuromédiateurs et des cytokines inflammatoires du système nerveux central survient, avec une stimulation des substances proalgogènes (substance P, glutamate) et une inflammation neurogène (TNFα et IL-6).
La connectivité entre les neurones diminue et le volume de la substance grise périaqueducale rétrécit. En périphérie, une neuropathie des petites fibres, des troubles dysimmunitaires, des radicaux libres sont évoqués.
Un terrain favorise la fibromyalgie (génétique, hormones, stress…), auquel s’ajoutent des facteurs déclenchants (infection, traumatisme, événement) ainsi que des facteurs d’entretien et d’aggravation (émotions, comportement…).
Premières recommandations
Les premières recommandations de bonne pratique dédiées à la fibromyalgie ont été publiées par la Haute Autorité de santé (HAS). Le bilan biologique (NFS, CRP, TSH, CPK, transaminases, EPP) permet de rechercher des maladies concomitantes ou un syndrome avec symptômes proches. "Ces diagnostics différentiels permettent d’exclure des RIC, des pathologies neurologiques, endocriniennes, tumorales, psychiatriques et des infections, mais ils sont parfois aussi associés à une fibromyalgie. Des médicaments peuvent également provoquer des douleurs musculaires (statines) ou une hyperalgésie (opioïdes)", ajoute la Pre Laroche. En l’absence de biomarqueurs, le diagnostic de fibromyalgie est clinique.
La stratégie thérapeutique doit être personnalisée, graduée, coordonnée et évolutive, avec des approches pharmacologiques et non pharmacologiques. La HAS recommande en première intention la pratique d’une activité physique adaptée, la diminution de la sédentarité et la mise en place de stratégies d’adaptation et d’autogestion de la douleur. "La psychoéducation à la douleur diminue énormément le stress et l’anxiété générés par celle-ci", indique la spécialiste.
En deuxième ligne, la HAS conseille en traitement de fond les antidépresseurs (tricycliques et IRSNA) et les antiépileptiques gabapentinoïdes (notamment la gabapentine) mais également des interventions telles que la relaxation, l’hypnose et la méditation.
Enfin, en troisième ligne, la neurostimulation périphérique transcutanée (Tens) est recommandée de façon transitoire pour ses effets sur les douleurs localisées ou locorégionales, ainsi que la stimulation magnétique transcrânienne (rTMS) et celle à courant direct (tDCS) pour leurs effets sur les douleurs et la qualité de vie.
"La rTMS est efficace dans les douleurs chroniques (42 études dans une méta-analyse Cochrane de 2018). Nous l’utilisons pour les patients ayant des formes rebelles, avec des résultats intéressants. Le protocole comporte dix séances à réaliser en six mois", informe la Pre Laroche.
Au programme de ce congrès :
- Obésité : une nouvelle définition
- Obésité : de nouveaux outils pour améliorer la prise en charge globale
- Stéatopathies métaboliques : dépister précocement les patients à risque de fibrose avancée
- VIH : mieux intégrer la PrEP comme outil de prévention
- Dysménorrhée chez l’adolescente : quelle prise en charge ?
- Maladie de Basedow : vigilance particulière chez la femme enceinte
- Maladie de Parkinson : une prise en charge à adapter au fil du temps
Références :
D’après la session "Et si c’était une fibromyalgie ?" aux Journées nationales de médecine générale (JNMG, Cnit Forest Paris-La Défense, 9 et 10 octobre).
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