Règles

Dysménorrhée chez l’adolescente : quelle prise en charge ?

D’origine fonctionnelle ou organique, l’étiologie de la dysménorrhée détermine sa prise en charge. L’anamnèse reste essentielle pour la caractériser. 

20/11/2025 Par Marie Ruelleux-Dagorne
JNMG 2025 Gynécologie-Obstétrique
Règles

Première plainte gynécologique chez les adolescentes, "les dysménorrhées correspondent à des douleurs contemporaines aux règles pouvant irradier dans l’aine, le dos ou les membres inférieurs et qui apparaissent le plus souvent dans l’année qui suit la ménarche mais pas forcément dès les premiers cycles", a précisé la Dre Sandrine Pérol, gynécologue, lors des JNMG 2025. On estime qu’environ 80 % des adolescentes souffrent de dysménorrhées, dont 10 à 15 % de forme sévère(1), même si cette prévalence demeure toutefois difficile à évaluer en raison de symptômes sous-estimés, car "il persiste encore cette idée selon laquelle il est normal de souffrir pendant les règles", a regretté la spécialiste. 

Et on sait aujourd’hui que ces douleurs ont souvent un impact considérable sur la qualité de vie et notamment sur la scolarité. Une étude transversale australienne de 2020(2) portant sur 4 202 femmes entre 13 et 25 ans a montré que les dysménorrhées étaient responsables d’environ 30 % d’absentéisme scolaire ou d’éviction d’activités sportives.

On distingue les dysménorrhées fonctionnelles (DF), qui sont largement majoritaires, des dysménorrhées organiques (DO), qui peuvent provenir de malformations utéro-vaginales, d’une endométriose ou d’une adénomyose. Le tabagisme, un âge précoce de la ménarche, un IMC élevé ou inférieur à 18, l’alcool et des cycles longs et abondants constituent les principaux facteurs de risque. "Il convient également de distinguer les douleurs prémenstruelles, qui sont soulagées dès le premier jour des règles, à l’inverse des dysménorrhées, a souligné la gynécologue. L’anamnèse est fondamentale pour s’orienter vers un type de dysménorrhée. Dans le cas d’une DF, les douleurs apparaissent entre six et douze mois après les premières règles et ne s’aggravent pas au cours des cycles alors que dans la DO, les douleurs surviennent plusieurs années après la ménarche, sont plus intenses et s’aggravent avec le temps."

Évaluer l’abondance des règles

"Il faut aussi évaluer systématiquement l’abondance des règles, car une ménorragie peut être responsable de la dysménorrhée. Plus les règles sont abondantes et plus la dysménorrhée est intense", a expliqué la gynécologue. Ici, les patientes sont invitées à s’appuyer sur le score de Higham en prospectif pour quantifier le volume de la perte de sang. Un tableau sera rempli pendant trois cycles successifs en précisant la durée des règles, le nombre de protections utilisées par vingt-quatre heures ainsi que le niveau d’imprégnation de ces dernières. Un score supérieur à 100 correspond à des pertes sanguines supérieures à 80 ml, traduisant une ménorragie.

"Les DF sont dues à une surproduction de prostaglandines au niveau de l’utérus qui entraîne une hypercontractibilité du myomètre, des hypoxies, voire des ischémies locales qui vont être responsables de douleurs pouvant être extrêmement intenses", a précisé la Dre Pérol. Les AINS sont des antiprostaglandines par inhibition de l’enzyme COX et "si leur utilisation offre une amélioration des douleurs dans 70 à 90 % des cas, il faut anticiper leur prise avant l’apparition des douleurs pour que le traitement soit efficace", a averti la Dre Ryma Bessa, du service de gynécologie médicale de l’hôpital Cochin (AP-HP, Paris). "Si aucune supériorité franche d’une molécule sur l’autre n’a pu être démontrée(3), le respect de l’AMM implique de ne pas prescrire d’acide méfénamique avant 12 ans et de flurbiprofène avant 15 ans. En revanche, l’ibuprofène peut être prescrit à tout âge. Enfin, en cas de ménorragie associée, on peut également prescrire de la progestérone pendant dix jours par mois en deuxième moitié de cycle", a-t-elle ajouté.

Une COP en deuxième ligne

Une pilule de deuxième génération ou équivalent est recommandée. "Si une prise en continu est envisagée, il vaut mieux proposer une COP en monophasique pour éviter les variations hormonales et augmenter les chances d’être en aménorrhée. Une pause de sept jours est à prévoir après trois plaquettes ou en cas de saignements. En tout état de cause, après prescription de COP, une surveillance s’impose, avec un bilan glucido-lipidique et une réévaluation clinique à trois mois. Il est également important de rechercher d’autres facteurs de risque qui seraient apparus entre-temps, comme un événement cardiovasculaire familial", a détaillé la Dre Bessa. En cas de contre-indication à la COP, un microprogestatif en continu pourra être proposé.

Si les douleurs persistent ou s’aggravent malgré un traitement bien conduit se posera la question d’une DO, qui représente environ 10 % des cas. Une éventuelle malformation utérovaginale à l’origine d’une rétention douloureuse de pertes sanguines sera recherchée par voie échographique. Enfin, l’endométriose est une autre cause, qui reste assez rare chez l’adolescente, puisque sa prévalence est estimée à 5 % dans cette tranche d’âge. 

(1) Harel Z. J Pediatr Adolesc Gynecol 2006 ;19(6):363-71.

(2) Armour M. J Pediatr Adolesc Gynecol 2020;33(5):511-8.

(3) Marjoribanks J, et al. Cochrane Database of Systematic Reviews 2015, issue 7. art. n° CD001751.

Références :

D’après la session "Dysménorrhée de l’adolescente" aux Journées nationales de médecine générale (JNMG, Cnit Forest Paris-La Défense, 9 et 10 octobre).

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Claire FAUCHERY

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