
Les nombreux bénéfices de la supplémentation vitamino-calcique
Bénéfiques pour la santé osseuse, et bien au-delà, la vitamine D et le calcium font encore l’objet de fréquentes carences dans la population. Lors du congrès, le Pr Patrice Fardellone, du service de rhumatologie du CHU Amiens-Picardie, a fait le point sur les connaissances.

«Lorsqu’on mène une étude épidémiologique, on s’aperçoit que 80% de la population soit n’ingère pas assez de calcium, soit présente des concentrations de vitamine D insuffisantes», constate le Pr Patrice Fardellone. Pourtant, ces deux éléments sont gages de santé osseuse, tandis que leur carence est liée à un risque accru d’ostéoporose, et donc de fracture, chez les personnes âgées.
Pour la population générale, la plupart des recommandations proposent une cible comprise entre 20 et 60 ng/ml de sang de 25-hydroxyvitamine D, métabolite actif de la vitamine D, rappelle l’expert. En revanche, la cible minimale est ajustée à 30 ng/ml chez les populations sur qui l’insuffisance en vitamine D fait peser un risque critique, en particulier les personnes ostéoporotiques, les personnes âgées à fort risque de chute ainsi que celles atteintes d’insuffisance rénale chronique ou présentant une malabsorption intestinale.
«Par extension, cette cible de 30 ng/ml peut être utilisée chez tous les patients atteints de maladies dont on sait qu’il existe peut-être un lien de causalité avec de faibles taux de vitamine D, telles que les maladies auto-immunes, les cancers, les maladies infectieuses, les pathologies infectieuses virales de la personne âgée ou les maladies cardiovasculaires», ajoute Patrice Fardellone.
Chez ces patients, l’expert recommande d’«effectuer un contrôle initial de la 25-hydroxyvitamine D avant de commencer la supplémentation, puis de contrôler trois à six mois plus tard qu’on a bien atteint la cible de 30 ng/ml».
En matière de supplémentation, le cholécalciférol, à savoir la vitamine D3, ne fait pas toujours l’affaire, en raison de sa liposolubilité élevée qui favorise sa séquestration par le tissu adipeux. D’où la nécessité, dans certaines populations, d’utiliser plutôt le calcifédiol (25-hydroxyvitamine D3), moins liposoluble, qui agit donc de manière plus efficace et plus rapide pour augmenter le taux sanguin. Selon des recommandations européennes publiées en 2022, le calcifédiol peut donc être préféré au cholécalciférol dans certains cas, notamment ceux d’insuffisance hépatique et de maladies rénales (1).
Vitamine D quotidienne plutôt qu’en dose de charge
Quant à la posologie, Patrice Fardellone penche plutôt pour l’administration de vitamine D quotidienne, voire hebdomadaire, plutôt que mensuelle. Plusieurs travaux ont, en effet, montré que les deux premières formes engendreraient des niveaux sanguins plus élevés de 25-hydroxyvitamine D. En termes de résultats cliniques, «rien ne permet de trancher quant au risque fracturaire. En revanche, des travaux ont révélé que la prise quotidienne ou hebdomadaire de vitamine D, plutôt qu’en dose de charge, était plus efficace sur l’équilibre, la locomotion et la force musculaire (2), qui constituent 50% du déterminisme du risque fracturaire».
D’autres études ont aussi suggéré un avantage de la prise quotidienne sur la mortalité cancéreuse (mais non sur l’incidence de cancer), pour réduire la pression artérielle chez les hypertendus, ainsi qu’en prévention des infections respiratoires aiguës (3,4,5).
Quant à la prévention des fractures, les études se suivent mais ne se ressemblent pas toutes. S’il semble désormais certain que la seule supplémentation en calcium ne suffit pas à réduire le risque, les résultats divergent souvent, d’une étude à l’autre, quant à l’intérêt de la double supplémentation calcium-vitamine D. Selon Patrice Fardellone, une méta-analyse britannique, publiée en 2019, fait foi (6). Laissant de côté toute étude de faible qualité (effectif inférieur à 500 personnes, moins de dix fractures dans la cohorte étudiée), elle a confirmé l’efficacité préventive contre le risque fracturaire, avec un risque diminué de 6% toutes fractures confondues, voire de 16% pour la fracture de la hanche.
Autre population dans laquelle il est recommandé de supplémenter en vitamine D : les femmes enceintes. Selon toutes les recommandations en vigueur, il est conseillé d’administrer une dose de 100 000 UI de cholécalciférol au début du troisième trimestre de grossesse. Selon une revue de la littérature de 2019, la supplémentation en vitamine D durant la grossesse prévient le risque de complications chez la mère et l’enfant, notamment de prééclampsie (-52%), de diabète gestationnel (-49%) et de naissance prématurée (-34%) (7). Pourtant, une étude de 2018 a révélé que, malgré cette supplémentation, l’insuffisance en vitamine D demeure fréquente chez les femmes enceintes françaises et leurs nouveau-nés, rappelle Patrice Fardellone, qui appelle à «revoir les recommandations» en la matière (8).
Au programme du congrès :
- CAR-T cells : une révolution en gestation
- Arthrose de la main : de premières recommandations françaises
- Gonarthrose : une recherche sur plusieurs fronts
- Rhumatismes inflammatoires chroniques : la pollution de l’air favoriserait les poussées
- Rhumatismes inflammatoires : l’horizon lointain d’un traitement préventif
Références :
D’après le 37e Congrès français de rhumatologie, Paris, 8 au 10 décembre 2024. D’après la présentation du Pr Patrice Fardellone (CHU Amiens-Picardie) lors de la session « Supplémentation vitamino-calcique à tous les âges de la vie ».
1. Chevalley T, et al. Aging Clinical and Experimental Research, 26 octobre 2022.
2. Muir SW, et al. Journal of the American Geriatrics Society, 1er décembre 2011.
3. Keum N, et al. Annals of Oncology, 1er mai 2019.
4. Chen S, et al. Current Hypertension Reports, 23 juin 2022.
5. Martineau AR, et al. British Medical Journal, 15 février 2017.
6. Yao P, et al. JAMA Network Open, 2 décembre 2019.
7. Palacios C, et al. Cochrane Database of Systematic Reviews, 26 juillet 2019.
8. Courbebaisse M, et al. Clinical Nutrition, 31 août 2018.
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