Alzheimer : le lécanémab non autorisé en accès précoce
Le lécanémab (Leqembi, Biogen et Eisai), nouveau traitement contre la maladie d'Alzheimer, ne sera pas remboursé dans l'immédiat en France. La Haute autorité de santé (HAS) vient, en effet, de lui refuser sa demande d’accès précoce, du fait des effets secondaires du produit.
"L'accès précoce à Leqembi n'a pas été retenu", a résumé Pierre Cochat, président de la commission de la transparence de la HAS, à l'occasion d'un avis rendu mardi par l'institution et très attendu par les spécialistes de la maladie d'Alzheimer.
Le lécanémab est l'un des principaux espoirs des associations de patients et de proches. Comme le donanémab (Kisunla, Eli Lilly) qui a récemment obtenu le feu vert du comité scientifique d’évaluation des médicaments pour l’Europe (CHMP), c’est un anticorps monoclonal dirigé contre la protéine amyloïde β. Lors des essais cliniques, il a montré un ralentissement du déclin cognitif de 27 %, après 18 mois de traitement. Nombre de spécialistes y voient donc une avancée majeure, alors que la recherche de médicaments anti-Alzheimer patine depuis des décennies.
Mais d'autres estiment que les bénéfices observés sont si maigres qu'ils ne font pas de différence pour les patients, d'autant que des effets graves et parfois mortels - hémorragies et œdèmes cérébraux, dus à des anomalies d’imagerie liées à l’amyloïde (Aria) : Aria-E (œdème) et Aria (hémorragie) - sont clairement avérés.
Vive controverse
Selon ces experts sceptiques, la faible efficacité de ces médicaments signifie que la recherche se concentre depuis trop longtemps sur une piste inadéquate, suivie par Leqembi comme Kisunla: chercher à limiter la formation de plaques amyloïdes dans le cerveau des malades.
La HAS s'exprime donc à un moment où la controverse reste vive et où d'autres autorités sanitaires se sont déjà prononcées.
Les Etats-Unis ont déjà approuvé ces traitements et l'Union européenne (UE) a fait de même. Mais, après avoir initialement refusé son feu vert, celle-ci n'a finalement donné son approbation qu'au printemps dernier, la restreignant aux patients les moins à risque d'effets graves.
Surtout, autorisation ne veut pas dire remboursement, et ce alors que ces médicaments ont un coût élevé: plusieurs dizaines de milliers de dollars par an aux Etats-Unis. Signe que la distinction est importante, le Royaume-Uni a déçu les associations en autorisant ces traitements sur le principe, mais sans valider leur remboursement.
C'est sur ce dernier point que la HAS devait se prononcer et, plus spécifiquement, sur le bien-fondé d'un "accès précoce", qui permet au produit innovant d’être remboursé dès a présent à un prix fixé par son fabricant. L'intérêt est pour les patients de disposer d'un traitement innovant, et pour le laboratoire de vite commercialiser son médicament.
Bénéfices "très insuffisants"
Ce ne sera pas le cas pour le Leqembi. « On sait bien à quel point tout le monde avait beaucoup d'espoir », a reconnu M. Cochat. Mais il met en regard des bénéfices "très insuffisants par rapport à ce qu'on attendait" avec "des effets secondaires qui ne sont pas faibles du tout".
Cela ne remet pas en cause la possibilité que Leqembi soit un jour remboursé en France. La HAS, qui se prononcera d'ici quelques mois sur l'opportunité d'une procédure normale, assure que rien n'est exclu. Mais "c'est évident qu'on ne peut pas s'attendre à une évaluation mirobolante", a prévenu M. Cochat.
Au sein du monde médical, cette décision a suscité des réactions contrastées, entre convaincus et sceptiques. “La Fondation Vaincre Alzheimer est extrêmement surprise et déçue par cette décision. C’est, en effet, une immense déception pour les malades et leurs proches, alors que ces derniers attendaient avec impatience cette avancée. Un nouvel espoir leur est retiré” a déploré Marion Lévy, directrice scientifique de la Fondation Vaincre Alzheimer. De même, la Fondation Recherche Alzheimer a déploré « une décision française à contre-courant » et s’est indignée : « veut-on réserver ce traitement uniquement à ceux qui en ont les moyens ? ».
"Il y a quand même une déception", admet auprès de l'AFP le chercheur Bruno Dubois, neurologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP), appelant à ne pas négliger l'intérêt de "quelques mois en plus à pouvoir parler à ses petits-enfants ou aller au théâtre".
Au contraire, "c'est la meilleure décision pour les patients atteints de la maladie d'Alzheimer et leurs familles", assure à l'AFP le psychiatre britannique Rob Howard, spécialiste du grand âge à l'University College de Londres, selon qui des données plus récentes confirment que Leqembi et Kisunla "ne modifient pas réellement la maladie".
Références :
D’après AFP, et des communiqués de la Fondation Vaincre Alzheimer et de la Fondation Recherche Alzheimer
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