Étudiantes infirmières : "Les conditions de stage n’ont jamais été aussi dégradées", alerte une enquête

Selon la dernière "enquête bien-être" de la Fédération nationale des étudiantes en sciences infirmières, la santé de ces dernières est notamment plombée par de mauvaises conditions de stage.  

28/03/2025 Par Pauline Machard
Infirmières

"Aujourd’hui, le mal-être n’a jamais été aussi intense", écrit la Fédération nationale des étudiantes en sciences infirmières (Fnesi), dans son "enquête bien-être" 2025*, dont les résultats ont été révélés en exclusivité par Le Parisien. Dans celle-ci, 71,82% des étudiantes en sciences infirmières (ESI) déclarent que leur santé mentale s’est "dégradée" ou "très dégradée" depuis leur entrée en formation (61,4% lors de l’enquête de 2022).

Le document alerte en particulier sur le fait que "les conditions de stage n’ont jamais été aussi dégradées". Cela est - en partie du moins - une conséquence de la politique menée par le Gouvernement depuis le Ségur de la santé en 2020 d’encourager financièrement les capacités d’accueil en Ifsi afin de faire face à la pénurie d'infirmières, explique le quotidien.

Problème : avec l’augmentation des quotas, les terrains de stage disponibles se sont réduits comme peau de chagrin : 39% des ESI se sont donc retrouvées en stage avec plusieurs autres étudiantes, ce qui limite l’accompagnement personnalisé par les encadrants, déjà surmenés par l’augmentation de la charge de travail liée aux tensions pesant sur le système de santé ; 7,5% étudiantes n’auraient pas eu de tuteur lors de leur dernière expérience… Et de manière générale, les conditions d’accueil se dégradent.  

 

Une étudiante sur 10 a tenté de se suicider

À cela s’ajoute le fait que les stages peuvent aussi être le théâtre de violences : une étudiante sur dix estime ainsi avoir été discriminée ; 15,81% disent avoir été victimes de violences sexistes ou sexuelles. Le plus souvent (52,98%), les agressions sont commises par un professionnel de santé, voire par le tuteur du stage (8,91%).

Les stages sont de fait identifiés par la Fnesi comme des "vecteurs de mal-être". Interrogée par Le Parisien, sa présidente, Ilona Denis, révèle qu’il y a eu "une montée des sollicitations sur notre plateforme depuis janvier : certains [étudiants] nous ont appelés, cachés dans les toilettes, avec la peur de retourner dans leur service". En 2025, plus de 100 ESI ont contacté par mail la fédération chaque mois, et plus de dix ont appelé sa ligne téléphonique chaque jour.

Si elles se font de plus en plus accompagner par des professionnels de la santé mentale (38% en 2025 contre 23% en 2022), il semble que les conditions de formation ne soient "plus vivables" pour les étudiantes : 31% prennent des traitements et consomment notamment des anxiolytiques, antidépresseurs, hypnotiques. 20% disent avoir déjà eu des idées suicidaires et une étudiante sur dix a déjà tenté de se suicider.  

 

69,91% ont déjà pensé arrêter la formation

Lorsqu'elles font remonter des problématiques qui touchent la formation, 61,12% des ESI jugent ne pas se sentir écoutées ou moyennement. "Les formateurs sont pris en étau : croire l’étudiant ou le service, mais dans ce contexte, on privilégie le service", regrette la présidente de l’association auprès du Parisien

Ces données peuvent conduire les ESI à interrompre leur formation. Voire l’arrêter : 69,91% des étudiantes y ont déjà pensé (dont 42,11% à cause des conditions de stage). 56% y ont pensé plus d’une fois.

Pour contribuer à toutes ces problématiques la fédération demande notamment "à ce que les quotas en formation soient repensés et adaptés aux ressources structurelles, pédagogiques et de stage" ; un aménagement du temps de travail des tuteurs "afin d’y intégrer des temps d’encadrement, pour mieux accompagner les ESI". Ainsi que la mise en place d’une plateforme nationale d’évaluation des lieux de stage. Pour la Fnesi, "à l’aube d’une réingénierie structurelle de la formation infirmière, il est nécessaire de se questionner sur les actions concrètes qui peuvent encore être mises en place pour améliorer la qualité des formations infirmières, avant qu’il ne soit trop tard".

*L’enquête a été réalisée avec la plateforme Framaforms, entre le 20 novembre 2024 et le 14 février 2025, via les réseaux de la Fnesi. Elle a recueilli 16 867 réponses exploitables.

[avec Le Parisien

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Claire FAUCHERY

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1 débatteur en ligne1 en ligne
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Anesthésie-réanimation
il y a 8 mois
Est il venu à l'idée des responsables de la formation que tout se tient? Quand on ferme des lits parce qu'entre autre, il n'y a pas assez de soignants, on n'a pas à l'esprit qu'il faudrait former des soignants et que ça améliorerait leurs conditions de travail. Cela permettrait de trouver du temps de "compagnonnage" pour encadrer les étudiants en soins infirmier... Mais on préfère informatiser les soins ce qui distrait du temps de soins du temps disponible au profit du renseignement numérique. On préfère encadrer les ide par des cadres de santé, les cadres de santé par des cadres supérieurs, les cadres supérieurs par des dssi chapeautés eux même par des drh. C'est très bien la promotion par le grade. mais la promotion par le salaire et l'attention aux conditions de travail aussi. En gros, c'est ce qui différencie un cercle vertueux d'un cercle vicieux.
il y a 8 mois
Les étudiants ne doivent jamais être considérés comme du personnel j’ai eu des étudiants pendant toute ma carrière et je pense m’en être occupé le mieux possible pourtant j’étais en libéral et il y avait beaucoup de travail. Je m’étais mis comme objectif qu‘aucun stagiaire n’aurait la boule au ventre en venant le matin au travail. Lorsque les étudiants sont mal c’est souvent la faute de ceux qui les encadrent par un manque de respect. Courage à vous les étudiants et lorsque vous serez diplômés ne faites pas la même chose à vos stagiaires c’est souvent le cas.
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Résistant
Chirurgie générale
il y a 8 mois
TOUT est dégradé en FRANCE!
 
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