Arrêt de travail : la suspension des IJ suite à un contrôle du médecin envoyé par l'employeur censurée par le Conseil constitutionnel
"Tout être humain qui, en raison de son âge, de son état physique ou mental, de la situation économique, se trouve dans l’incapacité de travailler a le droit d’obtenir de la collectivité des moyens convenables d’existence", garantit le Préambule de la Constitution de 1946. Or, pour le Conseil constitutionnel, la possibilité pour les CPAM de suspendre automatiquement le versement des indemnités journalières (IJ) à un employé dont l'arrêt de travail aurait été jugé non justifié par le médecin contrôleur dépêché par son employeur est contraire à cette "exigence constitutionnelle".
Si l'objectif de lutte contre la fraude est légitime, "les dispositions contestées ont pour effet de priver du versement des indemnités journalières l’assuré social alors même que son incapacité physique de continuer ou de reprendre le travail a été constatée par un médecin qui lui a prescrit un arrêt de travail pour une certaine durée", pointe le Conseil constitutionnel.
Il relève que selon la loi adoptée au Parlement (par le biais du 49.3), seules les personnes en ALD, dont l'arrêt de travail est en lien avec cette pathologie, bénéficieraient d'un nouvel examen du service du contrôle médical de la CPAM. "Dans tous les autres cas, en revanche, la réalisation d’un nouvel examen est laissée à l’appréciation de ce service au seul vu du rapport établi par le médecin diligenté par l’employeur. En l’absence d’un tel examen, la suspension du versement des indemnités journalières s’applique automatiquement." Si l'assuré a la possibilité de saisir le service de contrôle médical, "cette saisine ne met pas fin à la suspension du versement des indemnités journalières". En outre, "l’examen de la situation de l’assuré auquel procède le service du contrôle médical, saisi d’office ou à la demande de l’assuré, peut se limiter à un examen administratif et n’implique pas nécessairement la réalisation d’un nouvel examen médical", souligne le Conseil.
MG France, opposant de la première heure à cette mesure, s'est réjoui de cette décision. Dans un communiqué du 21 décembre, le syndicat dit regretter "l'obstination du Gouvernement et de certains parlementaires à tenter de maitriser, de façon purement comptable, l'augmentation du nombre des arrêts de travail, sans s'interroger sur leurs causes".
Priver un patient d'un médicament nécessaire "au seul motif qu'il a consulté un médecin à distance"
Une autre disposition de la LFSS 2024 a été censurée : la possibilité pour le ministère de limiter, voire d'interdire, la prescription par un acte de télémédecine de "certains médicaments" (en particulier les antibiotiques) en cas de rupture d'approvisionnement. "Les dispositions contestées peuvent avoir pour effet de priver un patient de la possibilité de se voir prescrire un médicament nécessaire au regard de son état de santé au seul motif qu’il a consulté un médecin à distance", juge le Conseil constitutionnel, considérant que là encore le 11e alinéa du Préambule de la Constitution de 1946, qui garantit à tous "la protection de la santé", est bafoué.
Pointant un "cavalier social" n'ayant pas sa place dans un texte budgétaire, les Sages ont également retoqué l'article qui prévoyait que l'Assurance maladie était tenue "de communiquer à l'Ordre compétent" des informations "sur des faits à caractère frauduleux commis par un professionnel de santé".
Ils ont en revanche validé la limitation à trois jours – sauf exceptions - des arrêts de travail par téléconsultation et la prise en charge "minorée" pour les patients qui refuseraient un transport sanitaire partagé avec d'autres malades.
[avec AFP]
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