taxi ambulance

Avec le transport sanitaire partagé, le trajet des patients pourrait être rallongé jusqu’à 30 kilomètres

Pour rejoindre ou repartir de l’hôpital en ambulance ou en taxi, les patients, désormais appelés à partager leur transport, pourraient voir leur trajet significativement augmenté, selon un projet de décret non finalisé. Un premier texte inquiétant pour l’association Renaloo. 

06/05/2024 Par Pauline Machard
Transport sanitaire
taxi ambulance

“L’acharnement contre les plus malades et les plus fragiles continue !”, alerte Renaloo, par la voie d’un communiqué publié le 5 mai dernier. L’association, qui représente des patients touchés par une maladie rénale, dialysés ou greffés, s’inquiète d’un projet de décret, révélé vendredi par franceinfo et qu'Egora a pu consulter. Celui-ci prévoit l’obligation de covoiturage - transport simultané d’au moins deux patients - pour les transports en taxi, ambulance ou VSL. Les transports sanitaires effectués au titre de l’aide médicale urgente, eux, ne sont pas concernés. 

Si, selon le ministère, il est “encore en train d’être discuté”, le projet de décret dans sa forme actuelle prévoit en effet un détour de 10 kilomètres possible par passager transporté, dans la limite d’un détour total de 30 km par trajet. Mais si ce seuil figure bien dans le texte, ce “n’est pas forcément ce qui va être retenu”, assure l’avenue de Ségur à l'AFP. Quid de l’attente pour le départ du véhicule sanitaire ? Le texte évoque un “délai raisonnable”. 

“Une mesure de maltraitance”

Des associations s’inquiètent de l’impact de ces changements, notamment pour les malades qui doivent être traités par dialyse ou chimiothérapie, sévèrement immunodéprimés. Renaloo fait ainsi valoir dans son communiqué que cette disposition “frappe en tout premier lieu ceux qui n’ont pas d’autre choix que d’être transportés pour des traitements vitaux, éprouvants, récurrents”. C’est “en particulier le cas des patients dialysés, qui, pour survivre, écrit-elle, doivent se déplacer trois fois par semaine pour des séances de quatre à cinq heures, dont ils sortent exténués”. 

“Leur imposer le covoiturage est une mesure de maltraitance”, estime-t-elle. Car cela impliquerait, selon elle, “des temps d’attente et de transport singulièrement augmentés, et autant de fatigue imposée en plus”. Mais aussi “le risque que les retards de transport entraînent une diminution de la durée de leurs dialyses”. Ou encore “une promiscuité - à trois ou quatre par véhicule - qui va les exposer à des virus respiratoires”.

Renaloo a adressé le 3 mai un courrier au ministère et à l’Assurance maladie pour réclamer que “ni les délais d’attente ni les retards liés à cette nouvelle organisation des transports ne puissent entraîner une dégradation de la qualité, de la continuité et de la durée des soins”. Autre préoccupation des représentants des malades : garantir le strict respect des mesures d’hygiène et “en particulier le port du masque”, par les agents des entreprises de transport sanitaire ou de taxi conventionnés et par les personnes transportées.

Le médecin devra spécifier sur l'ordonnance que l'état du patient est incompatible avec un transport partagé

Pour rappel, le projet de décret vise à appliquer une mesure de la loi de financement de la Sécurité sociale 2024. Le Gouvernement, en quête de plusieurs milliards d’euros d’économies dans le budget de la Sécurité sociale, a prévu qu’un patient ne pourra plus refuser un transport sanitaire partagé s’il est possible médicalement, sous peine de devoir avancer les frais et de n’être remboursé que sur la base du transport partagé. À partir de 2025, une pénalité s’appliquerait aussi. Pour obtenir un transport individuel remboursé, le médecin devra spécifier sur l’ordonnance que l’état du patient est incompatible avec un transport partagé.

[Avec AFP]

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Claire FAUCHERY

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1 débatteur en ligne1 en ligne
Photo de profil de M A G
4,6 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 2 ans
Ce que je trouve scandaleux dans cette histoire c'est que, une fois de plus, on se décharge sur le médecin pour nommer les heureux élus à la manne étatique, alors qu'il n'y a pas de critère objectif pour dire qui "a droit" à un VSL privé et qui non. Les cas où le patient doit être "isolé" sont, finalement, rares (le patient vraiment immunodéprimé, ou alors celui qui vomit ses tripes). Mais le patient simplement fatigué, a-t-il droit à un chauffeur privé, ou non ? Grande sera la tentation des patients et des familles pour faire pression sur le médecin. On s'abrite toujours derrière le médecin pour limiter l'open bar médico- social ("le médecin a dit qu'il doit sortir", c'est le médecin qui dit qu'il faut reprendre le chemin du boulot, etc), car les politiciens sont trop lâches pour poser des limites claires. Mais le médecin n'en peut plus, il en a marre d'être le punching-ball des uns et des autres...
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424 points
Incontournable
Autre spécialité médicale
il y a 2 ans
J'ai eu un cancer métastasé de très mauvais pronostic il y a 19 ans, et une chimiothérapie d'environ 5 mois dans un centre anti-cancéreux à 100 kms de mon domicile. Tous les trajets ont été faits en VSL partagé et cela ne m'a ni choqué, ni contaminé ! Je trouve ce partage normal et générateur d'économies substantielles.
Photo de profil de Michel Rivoal
10,7 k points
Débatteur Passionné
Anesthésie-réanimation
il y a 2 ans
A priori, on peut penser que c'est une mesure de "bon sens" surtout quand on connait les délais d'attente dans nombre de parcours, notamment dans certaines pathologies chroniques. Bien sûr il faut des précautions d'hygiène et préserver les possibilités d'accompagnement par un proche plus que des "obligations tarifaires".
 
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