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11 anciens ministres de la Santé s'érigent en défenseurs des ARS : "Elles sont devenues le punching-ball des gouvernements"

De Claude Evin à Yannick Neuder, en passant par Roselyne Bachelot et Marisol Touraine, onze anciens ministres de la Santé alertent sur le projet de "démembrement" des ARS voulu par le Premier ministre Sébastien Lecornu.

19/11/2025 Par Aveline Marques
Politique de santé
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"Nous venons d’horizons politiques différents, certains de nos désaccords sont profonds. Mais comme ministres de la santé, nous avons piloté le réseau des ARS et une conviction nous anime : la santé est un sujet régalien, qui appelle une mobilisation collective face aux multiples défis auxquels nous sommes confrontés", réagissent dans une tribune publiée par Le Monde, Roselyne Bachelot, François Braun, Agnès Buzyn , Geneviève Darrieussecq, Claude Evin, Agnès Firmin Le Bodo, Yannick Neuder, Aurélien Rousseau, Marisol Touraine, Frédéric Valletoux et Olivier Véran.

Ces onze anciens ministres de la Santé s'opposent ainsi haut et fort au "démembrement des ARS voulu par Sébastien Lecornu". Aux Assises des Départements de France, à Albi, vendredi 17 novembre, le Premier ministre avait annoncé un nouvel acte de décentralisation, passant par une réforme profonde des ARS. La "part régalienne du sanitaire, les analyses de l'eau, la gestion des épidémies" passeraient sous la responsabilité des préfets, tandis que "la planification des soins de proximité" et le déploiement de France santé reviendraient aux départements.

"Les ARS sont devenues le punching-ball récurrent de gouvernements qui pensent ainsi montrer leur détermination à faire bouger les lignes", lancent les anciens locataires de l'avenue de Ségur, rappelant que "les ARS sont nées en 2010 [avec la loi HPST portée par Roselyne Bachelot, NDLR] du constat que le système de pilotage de la santé était défaillant, éclaté entre l’Etat – notamment sous la responsabilité des préfets –, les départements et l’Assurance maladie".

"Certes, la différenciation des politiques publiques en fonction des territoires est indispensable et d’ailleurs déjà à l’œuvre. Elle est certainement perfectible, mais le schéma esquissé par le Premier ministre aboutirait à affaiblir la qualité de la prise en charge de nos concitoyens", mettent-ils en garde.

Les anciens ministres ne voient pas "comment les préfets, qui répondent au ministre de l'Intérieur", pourraient répondre aux défis de la Sécurité sociale et du système de santé. Ni comment les départements pourraient "prendre la main sur les politiques d’incitation à l’installation des professionnels libéraux" ou "réguler le premier accès aux urgences". "Imagine-t-on que communes et intercommunalités ne sont pas des acteurs majeurs de ces dynamiques locales ?", interpellent-ils.

"Baronnies locales"

"En évoquant un transfert d’une part de CSG et l’attribution parallèle d’une compétence santé aux départements, le Premier ministre rompt avec un principe majeur de la Sécurité sociale de 1945 qui inscrit la « Sécu » comme un système complet de protection sociale garanti par la solidarité nationale. Imagine-t-on les inégalités territoriales qu’une telle approche pourrait induire, les effets de clientèles, de baronnies locales ?", alertent encore les signataires.

Les ARS "gèrent un des sujets les plus imbriqués de toutes les politiques publiques. Prétendre que l’on pourrait demain ordonner tout cela comme un jardin à la française, à chaque institution correspondant une seule compétence, c’est au fond céder aux sirènes d’un populisme qui ne produira aucune amélioration pour la santé de nos concitoyens", jugent-ils.

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7 débatteurs en ligne7 en ligne
Photo de profil de Anne SAINT-MARC FUHRER
2 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 28 jours
Quand on lit les noms de tous ces ministres et ce quoi ils renvoient, on ne peut que sourire( jaune) et pour ma part, mon cœur se soulève… par cette défense des ARS, ils se défendent eux-mêmes comme tout bon politicien. Comment défendre l’indéfendable. Chaque médecin sait combien les relations avec les ARS peuvent être difficiles et délétères, des comptables qui ne savent que compter et parfois mal de surcroît, qui n’ont qu’une vision à court terme et ne savent qu’obéir à des directives comme de bons petits soldats le doigt sur la couture du pantalon en s’appuyant sur des textes écrits par des non soignants bien entendu qui n’ont jamais passé une journée à faire un tant soit peut ce dont il est questi…..On n’a pas les mêmes valeurs. Et ce que les ARS coûtent, argent qui ne va pas au soin et aux patients, je n’ose même pas y penser...
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Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 29 jours
11 Ministres responsables et coupables pendant 40 ans d'avoir amené le système de santé où il est , gangréné par son hyperadministration et qui défendent les ARS conspuées par la Cour des Comptes qui les juge coùteuses et inutiles. Il n'y a guère de commentaires à rajouter. Tant qu'on ne se sépare pas de cette politique hyoperadministrée , idéologisée et jacobine de la santé , on ne pourra que s'enfoncer dans la dette et la décrépitude de ce qui a été le meilleur système de santé du monde et qui en deviendra bientôt le pire !...
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10,7 k points
Débatteur Passionné
Anesthésie-réanimation
il y a 28 jours
Il y a une part de vrai dans la défense des ARS sur le rôle régalien des agences et sur certaines de leurs attributions qui étaient effectivement dévolues aux « baronnies » locales, renseignées par les départements et toutes sortes d’informateurs soumis aux influences, qui des maires ou sénateurs, qui des universitaires ou désireux de le devenir. Pour autant l’autonomie des agences est loin d’être parfaite et le « renversement » des influences part souvent des ministères et reste fortement influencé par les doyens des facs de médecine (autrefois les mandarins) et les autres universitaires préretraités recasés comme conseils, pas toujours objectifs. Mais honnêtement, il n’y a pas de point commun entre le monstre d’ARS Île de France avec ses 12,5M d’habitants et sa cohorte de CHU et celle de Corse, véritable île et son isolement géographique, ses 360 000 habitants et sa quête d’université. J’ai peine à voir en Mme Bachelot, une défenderesse de la sécu et de la solidarité nationale quand elle s'est « compromise » dans sa loi HPST qui a transformé les coopérations hospitalières en concurrence impitoyable pour leur survie. Certes la santé est au carrefour des politiques publiques, mais il vaut mieux convoquer les spécialistes de ces politiques dans des « think tank » occasionnels que mal s’approprier les politiques complexes et y faire des erreurs qui durent des années et coûtent « une blinde ». Ne pas vouloir « céder aux sirènes (du) populisme » ne signifie pas ne pas être à l’écoute des besoins de la population et des aspirations des professionnels de la santé. On a suffisamment reproché l’absence de vision de « Jupiter » et de ses prédécesseurs pour réclamer - enfin - un peu d’écoute de "la base" des vrais gens de terrain.
 
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