"Nomadisme médical" et surmédication au cœur d'un procès pour meurtre aux assises
Maylis Daubon, 53 ans, est jugée depuis lundi devant la cour d'assises des Landes pour l'empoisonnement médicamenteux de ses deux filles et la tentative d'assassinat de son ex-mari. Mercredi, le psychiatre qui suivait son ainée de 18 ans, décédée en 2019 d'un surdosage de Propanolol, a comparu à la barre.
Comment Enea, morte à l'hôpital de Dax six jours après un arrêt cardiorespiratoire au domicile familial le 13 novembre 2019, a-t-elle pu se faire prescrire 59 médicaments différents cette année-là, 55 durant la précédente, comme l'a établi l'enquête ? Comment a-t-elle pu absorber les quelque 50 cachets de Propanolol -9 à 10 fois la dose maximale- révélés par l'autopsie ? Les analyses des cheveux et des fluides de la jeune fille de 18 ans, ont mis au jour la prise de neuroleptiques, d'anxiolytiques, de sédatifs, de traitements contre les convulsions et d'antidépresseurs, depuis une année.
"Je suis tenu au secret médical", prévient d'emblée le psychiatre qui suivait la jeune fille, seul des médecins cités dans le dossier à témoigner au procès de sa mère, Maylis Daubon. L'accusée n'était pas sa patiente mais le spécialiste lui a néanmoins délivré sept ordonnances en 2018, autant en 2019 et huit en 2020, après le décès de sa fille. Durant l'instruction, le psychiatre avait expliqué "dépanner" la mère quand ses propres médecins n'étaient pas disponibles. L'enquête a en effet révélé le "nomadisme médical" de la famille : 60 consultations et 32 spécialistes vus rien que pour Enea entre 2018 et 2019. L’autopsie a établi que l'adolescente ne souffrait d’aucune pathologie physique à l’exception d’une pelade, mais selon sa mère elle était dépressive et se serait en réalité suicidée.
"En février 2020, Maylis Daubon voit quatre médecins pour se faire prescrire 10 boîtes de somnifères, vous en pensez quoi ?", demande la présidente de la cour. "Si c'est bien ou mal ? Oui, c'est mal", bredouille le témoin. Des analyses toxicologiques ont révélé chez les deux filles des taux de Zopiclone supérieurs à ceux de leur mère, qui s'était procurée pour elle-même 123 boîtes de ce somnifère à l'aide d'ordonnances falsifiées entre 2018 et 2021. Questionné sur cette pratique du "dépannage", le psychiatre répond qu'un "médecin doit soigner tout le monde, le riche, le pauvre. Je fais une ordonnance, je ne sais pas si elle (Maylis Daubon) va la prendre, la donner à sa voisine, je ne peux pas le vérifier", répond celui pour qui sa patiente, Enea, était "en crise d'adolescence".
Jeudi, une experte en toxicologie a décrit à la barre "l'état de vulnérabilité chimique" dans lequel se trouvait l'adolescente durant les mois précédents son décès. La pharmacienne, directrice d'un laboratoire d'analyse médicale, a dépeint une jeune fille "amoindrie par la prise médicamenteuse", "complètement somnolente", qui peut avoir "des gestes automatiques" et ne pas réaliser "ce qui se passe autour d'elle". "Même chez un adulte, trois hypnotiques associés en même temps, ça me paraît du délire", a-t-elle déclaré.
Le procès se poursuit jusqu'au 3 décembre.
[avec AFP]
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