"On frappe un médecin et on s’en sort avec un stage de citoyenneté": un généraliste déplore la peine légère de son agresseur

28/02/2024 Par Mathilde Gendron
Faits divers / Justice
Un homme de 68 ans a été condamné, mardi 27 février, par le tribunal correctionnel de Montbéliard à un stage de citoyenneté et à une amende. Il avait agressé, le 30 janvier dernier, un médecin généraliste exerçant à Audincourt (Doubs). Une vingtaine de médecins en blouse blanche se sont réunis devant le tribunal pour "sensibiliser" face à ces actes de violence. 

 

Ce mardi 27 février, le tribunal correctionnel de Montbéliard a condamné un homme de 68 ans pour "violence sur personne chargée de service public". Il avait agressé un médecin généraliste, exerçant à Audincourt (Doubs). Le praticien avait raconté les faits à Egora. Le 30 janvier dernier, une patiente en retard rentre dans son cabinet, accompagnée d’un sexagénaire qu'il ne connait pas. La secrétaire lui indique qu’il faut reprendre rendez-vous, le médecin ayant mis en place des "règles" au sein de son cabinet. Mais l’accompagnant devient vite très agressif.  

Après un aller-retour dans la salle d’attente pour essayer de calmer le jeu, le médecin qui était en consultation, décide d’y retourner en entendant des éclats de voix. "Je suis tombé nez à nez avec lui. Il était en position d'affrontement, comme un boxeur : il serrait les poings. Il me disait : 'Viens, qu'est-ce que tu vas me faire?' Quand je me suis approché pour essayer de le calmer, lui dire de ne pas se mettre dans cet état-là, il m'a pris le bras et m'a fait tomber par terre. Il était sur moi. J'étais vraiment sous le choc", avait-t-il détaillé.

 

Le sexagénaire avait fait l’objet d’une comparution immédiate, le 8 février dernier, mais avait finalement bénéficié d’un délai afin de préparer sa défense. Il était cependant placé sous contrôle judiciaire, avec une interdiction d’entrer en contact avec le médecin. Si le procureur de la République avait requis quatre mois de prison avec sursis lors de l'audience le 27 février, le verdict a finalement été beaucoup moins lourd. L’homme de 68 ans a été condamné à un stage de citoyenneté et à une amende, dont le montant sera défini ultérieurement. Il a également l’interdiction de se rendre au cabinet médical du médecin agressé pendant deux ans. 

 

"J'arrêterai très probablement la médecine générale"

Contacté par Egora, le généraliste s’est dit "très déçu" par cette condamnation, "à mon sens très légère". "On frappe un médecin et on s'en sort avec un stage de citoyenneté", déplore-t-il. C’est sa troisième agression depuis son installation en 2022. Il avait décidé de fermer son cabinet pour protester contre ces violences injustifiées. "J'arrêterais probablement la médecine générale", nous confie-t-il.

L’association gérant la PDSA du Pays de Montbéliard avait appelé les médecins à fermer leur cabinet et à se réunir devant le tribunal pour "sensibiliser" la patientèle à la problématique de la violence. Ce mardi, une vingtaine de praticiens se sont mobilisés, comme la Dre Liliana Borges, médecin généraliste à Grandvillars (Territoire de Belfort) : "Là, on en arrive à des agressions physiques, des menaces de mort aussi chez certains de nos collègues. On ne peut plus laisser passer, il faut vraiment faire quelque chose. On adore notre métier, on aime bien aider les gens, nos patients, mais pas dans ces conditions-là."

Pour la Dre Frédérique Nassoy-Stehlin, présidente du Conseil départemental de l’Ordre des médecins du Territoire de Belfort, il faut que "les patients qui agressent un médecin [rendent] des comptes, c'est indispensable. Parce que les médecins aujourd'hui ne comprennent pas que, malgré le Plan interministériel de lutte contre les violences faites aux professionnels de santé, et toutes les annonces qui ont été faites, sur le terrain, le compte n'y est pas et on en est très loin." 

De son côté, Me Rosa-Salomé Kupper, avocate du sexagénaire, reconnaît également la présence "de violence au sein des cabinets médicaux". Elle estime cependant que son "client ne doit pas servir d’exemple à tout prix".

[Avec France 3

5 débatteurs en ligne5 en ligne
Photo de profil de Nicolas  Delestret
305 points
Incontournable
Psychiatrie
il y a 2 ans
Essayez de faire la même chose à un juge (et même à un juge très à gauche assumant une grande tolérance habituellement) et voyez la peine que vous allez prendre. Enfin non, je plaisante, ne le faite pas ! Vous finirez avec de la prison ferme, et ce pour un bout de temps ! Nos juges actuels assument (enfin surtout les 30% appartenant au syndicat de la magistrature) que leur boulot n'est PAS de condamner de façon neutre mais de "compenser" les injustices de la société. Donc si vous vous faites tabasser par un énorme psychopathe, et que celui-ci a une origine que le juge considèrera comme défavorisées (selon ses propres critères personnels subjectifs et idéologiques), alors le coupable n'aura aucune peine, en dehors, au mieux, d'une condamnation symbolique. Votre vie, elle n'a pas de valeur. Surtout si, selon les critères subjectifs de ce juge, vous êtes un "favorisé". Vous êtes médecins, donc vous êtes considéré comme quelqu'un de favorisé. Donc votre vie n'aura jamais aucune valeur, aux yeux d'un juge du syndicat de la magistrature. C'est ainsi qu'ils jugent, et ils ne s'en cachent même pas ! Mais bien, toute ces belles idées ne sont valables que lorsque c'est la vie des autres qui est menacée. La vôtre, la mienne, celle de vos parents ou enfants... Lorsque c'est la vie du juge qui est menacée, là, il y a une exception à ces beaux principes. Dans cette situation il convient d'appliquer la loi dans toute sa rigueur. Les bons sentiments c'est sympa, mais faut pas déconner non plus.
Photo de profil de Sybil Tuna
280 points
Incontournable
Médecine générale
il y a 2 ans
On est sous-payé, agressé, dévalorisé, méprisé par les institutions, les médias et les patients consommateurs et devenus pseudo-docteur par Google. C'est cela la médecine actuelle, c'est à dire exercice dans de mauvaises conditions et absence d'autorité/respect ne permettant pas une qualité de soins. Les médecins sont les experts soignants de la France. Si rien ne change rapidement, tous les médecins se deconventionneront ou iront à l'étranger. A bon entendeur...
Photo de profil de PIERRE GANZIN
474 points
Incontournable
Médecins (CNOM)
il y a 2 ans
Moi j'ai été agressé ( strangulation et crachats sur le visage) car il y avait de la musique classique en fin sonore discret dans la salle d'attente. J'ai porté plainte mais l'agresseur est allé chez un"confrére" qui a fait un certificat indiquant des lésions d'agression sur les mains et avant-bras !!! Résultat : le C.O ne m'a pas défendu, je suis passé en instance ordinale ( conseil régional) . Finalement j'ai pris un avocat et j'ai pu faire condamner le patient à 8000€ devant les tribunaux mais aucune autre peine... Méditez!
 
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