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Finastéride dans l'alopécie : désaccord entre la France et l'Europe sur la balance bénéfice-risque

Devant le risque avéré de troubles psychiatriques et de la fonction sexuelle liés à la prise de finastéride (utilisé dans l'alopécie androgénique), les autorités sanitaires françaises et européennes ont décidé de renforcer l'information des patients. Mais pour la France, les mesures recommandées au niveau européen ne suffisent pas. 

26/09/2025 Par Dre Marielle Ammouche
Dermatologie Thérapeutique
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L'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) considère, en effet, au vu de nouvelles données de pharmacovigilance, que la balance bénéfice/risque est défavorable – contrairement à l'Agence européenne des médicaments (EMA) qui a maintenu un avis favorable. Elle souhaite aller plus loin dans les mesures de précaution, en recommandant l'arrêt du traitement en cas de pensées suicidaires sous finastéride, et une réévaluation systématique de la pertinence de la prescription.

L'ANSM avait saisi en septembre 2024 l'EMA afin que soit réévaluée la balance bénéfice/risque de ces médicaments. Le Comité pour l’évaluation des risques en matière de pharmacovigilance (Prac) de l'EMA a confirmé que le finastéride oral (1 mg et 5 mg, ce dernier étant indiqué dans l’hypertrophie bénigne de prostate) était bien associé à un risque d’idées suicidaires. Cependant, le rapport bénéfice/risque de ces médicaments est resté favorable, "sous réserve notamment du renforcement de l'information des patients et des professionnels de santé, en les alertant sur ces risques et sur la conduite à tenir en cas d’apparition de troubles psychiatriques ou sexuels (finastéride 1 mg)".

Plusieurs mesures ont donc été recommandées au niveau européen : modification des RCP et des notices des médicaments avec ajout de ces effets indésirables et/ou mises en garde et précautions d’emploi ; ajout d’une carte patient dans chaque boîte de finastéride 1 mg ; envoi d’une lettre d’information aux professionnels de santé en septembre 2025.

De nouvelles données de pharmacovigilance

Cependant, les autorités sanitaires françaises ont souhaité aller plus loin. Pour en savoir plus sur ces effets indésirables, une expertise de pharmacovigilance a donc été demandée par l’ANSM. Elle a mis en évidence l’existence de 110 cas de troubles psychiatriques isolés ou associés à des troubles sexuels survenus en France entre le 1er janvier 1985 et le 31 mai 2024. Les cas étaient généralement graves (2 fois sur 3), survenant chez des sujets jeunes (âge médian 30 ans), avec une durée moyenne de traitement de 6 ans. En outre, 1 décès par suicide et 4 tentatives de suicide ont été comptabilisés (auxquels il convient d’ajouter 2 autres suicides rapportés après la fin de la période de l’expertise).

L'impact sur la qualité de vie (vie quotidienne, travail, relations familiales) était important pour près de 3 patients sur 10 (29,1 %). Et, dans plus de la moitié des cas, les troubles psychiatriques ou sexuels ont persisté longtemps (3 ans) après l’arrêt du traitement, et parfois très longtemps (8 ans ou plus dans 25% des cas).

Au vu de ces données, l’ANSM s’est dit confirmée dans sa conviction que le rapport bénéfice/risque du finastéride 1 mg dans l’alopécie androgénétique est défavorable, et que "les mesures prévues au niveau européen ne suffisent pas à réduire efficacement le risque d’idées suicidaires". Cette position est renforcée par le fait que des nouveaux cas graves ont été recensés - en particulier avec le finastéride 1 mg utilisé l’alopécie - malgré les actions mises en place dès 2019. Et qu’ils surviennent chez des sujets jeunes et en bonne santé.

L’ANSM recommande donc l’arrêt du traitement en cas de modification de l’humeur, et un avis médical en cas de troubles sexuels ou de tout autre effet indésirable (avec arrêt éventuel du traitement). En outre, une réévaluation régulière de "la pertinence de la poursuite du traitement lors de chaque consultation de suivi", ainsi que de sa tolérance, est préconisée.

Références :

D’après une actualité de l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM, 25 septembre).

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