violence

Un médecin salarié agressé par un patient peut-il faire condamner son employeur ?

Comme vient de le rappeler la Cour de Cassation, un manquement à une obligation légale de sécurité et de protection de la santé, à laquelle un employeur est tenu envers ses salariés, a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis son salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

27/05/2024 Par Nicolas Loubry
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Au sein d’un hôpital, une femme médecin subit une agression physique par une patiente, rentrée dans l’espace ambulatoire du service des urgences, alors que ce médecin ne prêtait pas attention à elle, et que seule l’équipe de soins est intervenue pour les séparer. Reprochant à l’hôpital le caractère insuffisant des mesures mises en œuvre par son employeur pour prévenir ce risque d’agressions, cette médecin salariée a saisi la justice, qui lui a donné raison. Dans un arrêt du 16 juin 2022, la Cour d’appel de Versailles a ainsi relevé « que la recrudescence d’actes violents au sein du service des urgences de l’hôpital avait été évoquée dès 2015, en raison, notamment, de l’engorgement des services générant l’insatisfaction des usagers, l’altération des conditions de travail et la dégradation de la qualité des soins. Il en déduit que l’employeur ne pouvait ignorer le risque d’agression encouru par son personnel soignant, médecins compris ». Pour sa défense, l’hôpital employeur de cette médecin faisait valoir que le fait que les accès aux urgences aient été ouverts 24 heures sur 24 était indifférent dès lors qu’un patient, une fois pris en charge, pouvait être l’auteur d’une agression, et que la mise en place d’agents de sécurité dédiés à la protection et de portes fermant la zone de soins n’aurait pas été en mesure d’empêcher l’accident. Des arguments insuffisants, selon la Cour d’appel de Versailles et pour la Cour de Cassation qui, dans un arrêt du 29 février 2024, a rejeté le pourvoi de cet établissement hospitalier, en estimant notamment « que le recrutement d’un agent de sécurité et la fermeture de la zone de soins par des portes coulissantes, qui lui avaient été demandés par certains salariés pour sécuriser les locaux, sont postérieurs à l’accident du travail. Il relève que le contrat de sécurité cynophile était manifestement insuffisant à prévenir les risques d’agression au sein même de l’hôpital et retient que l’organisation de formations sur la gestion de la violence constituait une réponse sous-dimensionnée par rapport à la réalité et la gravité du risque encouru. Il en déduit que les mesures de protection mises en œuvre par l’employeur étaient insuffisantes ou inefficaces à prévenir le risque d’agression auquel était soumis son personnel ».

Une faute inexcusable

Le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à l’égard de ses salariés a ainsi été retenu à l’encontre de cet hôpital  qui avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis son salarié, alors qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. Un manquement qui a le caractère d’une faute inexcusable, selon la Cour de Cassation.

Rappelons qu’il est de la responsabilité d’un employeur de s’assurer de la sécurité de ses salariés pendant leur travail. Il s’agit d’une obligation de résultat et il doit ainsi prendre toutes les dispositions nécessaires pour assurer la protection de la santé mentale et physique de ses salariés. En faisant reconnaître la faute inexcusable de son employeur, à la suite d’un accident du travail, un salarié peut obtenir l’entière réparation de ses préjudices (souffrances physiques et morales, préjudices esthétiques, d’agrément…). Si la victime perçoit une rente, celle-ci sera majorée afin de couvrir les préjudices liés à la perte de revenus et à l’incapacité professionnelle.  

 
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