Erreur médicale : après la condamnation d'un ex-interne, les syndicats dénoncent le statut "faussement protecteur" des carabins

26/01/2024 Par Chloé Subileau
Suite à la condamnation d'un ex-interne à 15 mois de prison avec sursis pour une surdose de morphine ayant coûté la vie d'un patient, des organisations étudiantes pointent le "double statut faussement protecteur" des internes. Dans un communiqué, elles appellent à une clarification juridique. 

 

Ils tiennent à dénoncer le "double statut faussement protecteur" des internes. Dans un communiqué, publié ce vendredi 26 janvier, l'Isni, l'Isnar-IMG, le SNIO et la FNSIP-BM* – organisations représentantes des internes – appellent à "une vigilance particulière quant au respect des normes de prescription", à "une réelle application des règles du temps de travail des internes" et à "une clarification [du] statut juridique" de ces derniers.  

"Si les internes ne se sentent pas protégés dans leur exercice du soin quotidien, nous risquons une désertion de notre métier", écrivent-elles, en réaction à la condamnation d'un ancien interne à 15 mois de prison avec sursis pour homicide involontaire après l'administration d'une surdose de morphine à un patient.  

En janvier 2014, cet ex-interne des hôpitaux de Marseille, désormais chirurgien orthopédique, s'apprêtait à procéder à la réduction de la luxation d'un patient de 80 ans. Il avait alors prescrit oralement à une infirmière une injection de morphine de 5 milligrammes de ce produit, sans rédiger une ordonnance. Une pratique contraire à la réglementation en vigueur sur les produits stupéfiants. 

L'infirmière, qui soutient qu'il lui a été demandé cinq ampoules de morphine, avait alors administré une dose totale de 50 milligrammes au patient. Une confusion fatale puisqu'elle a mené au décès de l'octogénaire. Mercredi 24 janvier, l'ancien interne et l'infirmière ont donc été condamnés respectivement à 15 mois et deux ans de prison avec sursis pour homicide involontaire.  

Dans ce contexte, les organisations étudiantes tiennent à rappeler qu'un interne prescrit avant tout et selon l'article R6153-3 du code de la santé publique "par délégation et sous la responsabilité du praticien dont il relève". Les prescriptions des internes "ne leur sont pas opposables car ils exercent sous la responsabilité du médecin responsable de l'unité ou du pôle ou de leur maître de stage", poursuivent-elles, citant ainsi les propos de François Braun, ancien ministre de la Santé.  

 

Les internes signent jusqu'à 70% des prescriptions à l'hôpital

Pour ces représentant syndicaux, le double statut des internes, "pourtant protecteur sur le papier, assure en réalité nombre de désavantages". "Professionnels de santé à un moment, étudiant à un autre, ce flou permanent promet le cumul du pire", ajoutent-ils : "En pratique quotidienne, les internes sont des professionnels de santé indispensables au bon fonctionnement des hôpitaux. Ils signent jusqu'à 70 % des prescriptions à l'hôpital." 

Plus largement, ces organisations dénoncent l'irrespect des seuils légaux encadrant le temps de travail des internes. Si ce dernier est "légalement limité à 48 heures par semaine", il est "en pratique largement dépassé", note leur communiqué. Un dépassement non sans risques. "Le système de garde actuel en 24 heures consécutives favorise les risques d'erreurs médicales en lien avec une durée de veille et un stress croissant de l'interne", conclut le texte, appelant ainsi à une réelle application des règles de temps de travail, ainsi qu'à la clarification du statut juridique des internes.  

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Claire FAUCHERY

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2 débatteurs en ligne2 en ligne
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Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 2 ans
Ce ne sont pas que les internes qui souffrent de cette ambiguïté. Être senior est un exercice délicat aussi. Tu es supposé vérifier tout ce que l'interne fait: sinon, comment en être tenu responsable ? Impossible avec les logiciels actuels. Pour être logiques, il faudrait que le senior valide systématiquement toutes les prescriptions des internes. (Et ça, d'un simple clic, si ce n'est pas trop demander , car les logiciels médicaux sont des vrais clicquodromes, et qui se complexifient toujours plus , à force de devoir répondre aux lubies des gouvernements successifs.) Ou alors tu dois faire confiance à l'aveugle ; mais ce n'est pas toi qui a choisi l'interne, et ce n'est pas toi qui l'a formé. Et ça, sans trop froisser l'interne, qui, normalement, est tout fier d'avoir enfin grandi.
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1 k points
Débatteur Passionné
Médecine physique et de réadaptation
il y a 2 ans
"faussement protecteur" ? il s'agit de pénal, aucune assurance, syndicat ou autre ange gardien ne couvre ce risque. Certains internes, avec un discours très militant, oubli que la réalité est tout autre que ce qu'ils veullent faire croire dans bien des domaines et oubli que l'on y est confronté à tous les échelons, interne ou pas. Maintenant en terme civil, ce ne sont pas les sénior ni même les établissements qui décide de ce qui relève d'une faute ou de "couvrir" un tel ou un tel, ce sont les assurances directement via des rapports interne et expertises.
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356 points
Incontournable
Médecine interne
il y a 2 ans
au commencement il y a le filtre des doses léthales du logiciel de prescription.... j'ai toujours été surpris de constater que l'on pouvait laisser trainer de nombreuses heures des erreurs concernant les unités , par exemple 20 flacons matin , 20 flacons à midi, 40 flacons le soir de TERCIAN au lieu de gouttes.Ou bien 35 flacons de LANTUS au lieu d'unités ces erreurs sont corrigées dés que l'infirmière en a lecture, ou bien la pharmacienne.DE même à contrario, la prescription de doses pédiatriques à un adulte. mais à noter qu'il n'y a pas de filtre des logiciels de prescription avant la lecture.
 
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