Intérim : le médecin "cannibale", ce coupable idéal

15/11/2022
Ça vous a fait réagir
1170 euros pour 24 heures de garde, à prendre ou à laisser. Déclarant la guerre à l'intérim "cannibale", le ministre de la Santé François Braun est déterminé à faire appliquer au printemps prochain le plafond de rémunération réglementaire en vigueur depuis le 1er janvier 2019, mais jamais réellement respecté par des hôpitaux aux abois. Quitte à déclencher une grève dure de plusieurs semaines… Lecteurs d'Egora, vous avez choisi votre camp.

  "Quand un médecin gagne en une nuit deux fois ce que gagne une infirmière en un mois, là je dis stop. C'est indécent", martelait François Braun la semaine dernière, lors d'une rencontre organisée par l'Association des journalistes de l'information sociale. A l'instar de ses prédécesseurs Agnès Buzyn et Olivier Véran, le ministre de la Santé a déclaré la guerre à ces médecins "mercenaires", qu'il va jusqu'à qualifier de "cannibales", accusés de faire "monter les enchères" dans des services désertés par les titulaires. Au printemps prochain, la loi dite Rist, qui permet au comptable public de bloquer toute rémunération supérieure au plafond réglementaire de 1170 euros pour 24 heures, sera enfin appliquée, promet le ministre. Alors que 20 à 40% des services, selon les spécialités, tournent avec des médecins intérimaires, l'ancien chef de service des urgences de Metz a demandé aux établissements d'anticiper une "grève d'un mois". Lecteurs d'Egora, vous avez été nombreux à commenter ces propos, justifiant la rémunération de ces confrères de par leur expérience et leur exercice précaire.    

"Il est temps que les directeurs mettent de l’ordre dans le fonctionnement de certains services"

Par Dr Thierry Moll

"Ce qui est décrit par l'excellent Dr Braun concerne les services d'urgences et le SMUR. Notre ministre en a été un haut dirigeant et c'est maintenant qu'il s'aperçoit du problème ! Concernant l'intérim, les médecins sont payés 40 € brut/h pour 48 h/semaine, déduction faites de la prime de précarité, de la monétisation des RTT et des congès annuels. Si les médecins quittent les services hospitaliers, c'est à cause des conditions de travail en lien avec les relations entre médecins, où 5 à 10% des PH, que l'on peut qualifier de tordus, pourrissent la vie des autres. Il est effectivement temps que les Directeurs mettent de l'ordre dans le fonctionnement de certains services, où les médecins souvent titulaires "travaillent" 48 heures d'affilées, perçoivent le salaire d'une semaine et disposent des 5 jours restant à leur convenance, par exemple pour faire de l'intérim dans un autre hôpital. Cette situation devait être corrigée, mais les Directeurs semblent toujours fermer les yeux. J'espère que le Dr Braun est plus au courant de ses dossiers de ministre que de ceux de son ancien travail."      

"Le vrai scandale c’est de payer moins de 2500 euros un infirmier de SAU"

Par  Romain_L_6

"Je crois que sa sortie sur les intérimaires est celle qui m'a le plus énervé : 

Quand un médecin gagne en une nuit deux fois ce que gagne une infirmière en un mois, là je dis stop. 
Si on part sur une rémunération nette de 1800 € pour un infirmier débutant, ça voudrait dire qu'un mercenaire serait payé > 3000 € la garde de 12 heures... C'est évidemment faux. 
Déjà le salaire net d'un infirmier tourne plutôt autour de 2000-2200 €. Ensuite le mercenaire gagne plutôt autour de 1000 à 1500 € la garde de 24 heures, sachant que ces gardes nécessitent de grandes compétences, une haute résistance à la fatigue et au stress, et plusieurs jours pour s'en remettre. Notons également que ces mercenaires n'ont pas de week-ends et de congés payés, et pas de couverture sociale. 
Si Mr Braun veut moins de mercenaires, il n'a qu'à améliorer tout simplement les conditions de travail dans les SAU, à commencer par les salaires de tout le monde. S'il croit que ça amuse les gens d'avoir un emploi précaire... 
Le vrai scandale c'est de payer moins de 2500 € un infirmier de SAU et de trouver cela normal."

 

 

"Je fais partie de ces horribles mercenaires qui crèvent le budget de l’hôpital"

Par Rémi_G_2

"Encore un ministre qui croit que cette mesure sera appliquée, de nombreux services ne peuvent pas tourner sans les intérimaires, c'est peut-être malheureux mais c'est un constat incontournable. De plus mettre en avant les quelques abus de rémunération de rares cas pour discréditer l'intérim ne vous crédibilise pas Monsieur le Ministre. Personnellement je fais partie de ces horribles mercenaires qui crèvent le budget de l'hôpital, eh bien oui à 650 € les 10 h ou 1300 € la garde de 24 h, en tant qu'ancien PH payé des clopinettes pour toutes les gardes que j'ai pu faire, maintenant retraité en cumul emploi je n'ai aucun scrupule à toucher ce salaire. Le jour où la loi Rist sera appliquée, pour autant qu'elle le soit, je n'irai plus à 69 ans bosser dans les blocs opératoires ou les services de réanimation. Je ne suis bien sûr pas le.seul dans ce cas. Je sais je suis un horrible égoïste, mes malheureux confrères PH ne pourront plus prendre leur repos de sécurité ou leurs vacances ou encore leur congé de formation mais ce n'est pas auprès de moi qu'ils viendront se plaindre mais auprès de vous Monsieur le Ministre. A part de belles paroles vous n'aurez rien à leur offrir."
 

 

 

 

"Un PDG gagne toutes les 24 heures plus de deux fois ce qu’un médecin gagne en un mois"

Par Bozboz

"Il faut plafonner les rémunérations…, certaines sont indécentes, v’là t’y pas que notre gouvernement libéral à souhait tournerait communiste (Georges Marchais, sors du corps d’Emmanuel Macron !)  

 Le plafonnement des rémunérations …, ok c’est visiblement un souci gouvernemental… Total respect pour le concept, mais pour qui ce plafonnement ? Pour nos PDG du CAC 40, nos footballeurs, nos artistes en tous genres, nos cabinets de conseil … ? Non, ça s’adresse exclusivement aux médecins intérimaires "cannibales " qui boufferaient tout l’argent de leurs congénères, à l’hôpital et bientôt en ville ! Si nos hôpitaux sont en faillite, si nos actes ne sont pas mieux valorisés, la faute à qui ? Aux cannibales !  

En parlant de plafonnement des rémunérations, l’exemple le plus récent est peut-être celui de ce pauvre PDG de Total qui n’aurait touché que 6 000 000 d’euros environ en 2021 ! Pour lui, un salaire simplement comparable à celui de ses pairs, et évidemment bien inférieur à celui qu’il toucherait s’il officiait outre-Atlantique !  

Mais pour nous autres, en valeur "charge de travail d’un généraliste", ça représente quoi un revenu de 6 000 000 d’euros ?  

6 000 000 : 365 = 16 438 euros par jour environ, faut déjà les dépenser surtout qu’avec les avantages en nature qui vont avec, notre PDG doit rarement sortir sa carte bleue ou plutôt sa carte Infinite ! 

16 438 : 25 = 657,5 consultations par jour environ, alors évidemment, il nous faudrait une sacrée organisation pour réussir à approcher, ne serait-ce qu’une journée (1440 minutes) dans l’année ce chiffre !  

Le premier qui y arrive à droit à un article sur Egora ! 1440 : 657 = 2,19 minutes par consultations si on ne fait aucune pause durant 24 heures !  

Environ 660 consultations par jour ! À 20 consultations en moyenne par médecin, notre PDG encaisse journellement, 365 jours par an, l’équivalent du travail de 33 médecins généralistes (je dis bien travail, si l’on parle revenu, faut doubler) !  

Vous me direz, qu’est-ce que vient faire le PDG de Total dans la guerre totale menée contre les intérimaires depuis des années ? Rien si ce n’est que nos ministres successifs s’offusquent de toute rémunération supérieure à 1140 euros pour une garde de 24 heures ! 1140 euros remis en perspective représente environ 14 fois moins que ce que gagne notre PDG en 24 heures, et lui, gagne cette rondelette petite somme (1140 X 14) 365 fois dans l’année !  

Alors, trop payés nos intérimaires, peut-être, faut demander au PDG de Total ou à un cabinet de conseil …, de l’argent de poche pour eux !  

Pas assez payé notre PDG, faut demander à notre ministre !  

Pas assez payés nos médecins hospitaliers, de ville, tous nos soignants, une évidence ! Monsieur le ministre, comme le fait notre PDG de Total pour son malheureux salaire, faudrait comparer avec nos pairs européens (à l’heure de travail évidemment) !  

Pour les généralistes, comment gagner plus ? La tendance de la mode ministérielle 2022-2023 serait d’optimiser et d’optimiser encore notre temps médical ! Mais jusqu’où aller ? doit-on faire de plus en plus court et avoir pour objectif d’abattage idéal les 2,19 minutes par consultations… ? Notre gouvernement nous le dira !  

Notre ministre a fait lui aussi sa page de calculs, sans nous la montrer, et arrive à cette conclusion : "Je ne peux pas accepter qu'un médecin gagne en une nuit deux fois ce qu'une infirmière gagne en un mois". Par contre qu’un PDG gagne toutes les 24 heures plus de deux fois ce qu’un médecin gagne en un mois, notre ministre l’accepte volontiers !  

Attention monsieur le ministre, lorsque l’on a le regard fixé sur le plafond, on ne voit pas le poteau qui vous arrive droit devant !"

 

"Ce qu’il paye, ce n’est pas une nuit de travail, ce sont 10 ans de sa jeunesse"

Par MAG

"'Un médecin gagne en une nuit deux fois ce qu'une infirmière gagne en un mois' 

- toutes les infirmières sont au SMIC ? 

- ce n'est pas "une nuit", mais 24h 

- le payement est toujours deux fois le SMIC? J'avais l'impression que le chiffre habituel est bien plus bas   

- il n'y a pas de droits aux congés etc.

- le "net" n'est pas ce qui va rester dans la poche de l'intérimaire ; il va payer des impôts dessus

- ce n'est pas que la nuit qui est payée mais aussi l'angoisse avant et après, la fatigue, le trajet (la compensation est seulement pour les kilométrages, mais pas pour les heures de conduite, le départ tôt le matin, les soirées solitaires...)  

- l'intensité du travail (avec tout mon respect pour le travail des infirmières)  

Et ce qui, à mes yeux, est la malhonneteté suprême : ce qu'il paye, ce n'est pas une nuit de travail. Ce sont 10 ans de sa jeunesse (plus une nuit de travail).  

Quelqu'un qui sort une telle phrase, à mes yeux, s'est complétement disqualifié. Rien à attendre d'une telle personne." 

 
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