Thomas Fatôme au congrès d'Avenir Spé, ce vendredi 14 novembre, à La Baule.

Thomas Fatôme au congrès d'Avenir Spé, ce vendredi 14 novembre, à La Baule. Crédit photo : Louise Claereboudt

"Dans cette période très incertaine, il faut que les médecins signent l'Optam", appelle Thomas Fatôme

Le directeur général de la Caisse nationale de l'Assurance maladie (Cnam) était attendu de pied ferme aux Rencontres de la médecine spécialisée, organisées par Avenir Spé à La Baule. Avenir de l'Optam, baisses de tarifs, lutte contre les "rentes"… Le haut-fonctionnaire a tenté de renouer le dialogue avec des médecins spécialistes indignés, tout en défendant la nécessité absolue de "tout faire" pour "rétablir la soutenabilité de l'Assurance maladie".

14/11/2025 Par Louise Claereboudt
Assurance maladie / Mutuelles Syndicalisme Spécialistes
Thomas Fatôme au congrès d'Avenir Spé, ce vendredi 14 novembre, à La Baule.

Thomas Fatôme au congrès d'Avenir Spé, ce vendredi 14 novembre, à La Baule. Crédit photo : Louise Claereboudt

"Notre système est en danger, je le dis très clairement", a déclaré, le ton grave, le numéro 1 de l'Assurance maladie, Thomas Fatôme, aux Rencontres de la médecine spécialisée, ce vendredi 14 novembre, à La Baule. Et de rappeler un chiffre, celui du déficit de la Sécurité sociale, qui s'établit à 17 milliards d'euros et qui "ne se résorbe pas dans la durée" notamment "parce que nos dépenses vont beaucoup plus vite que nos recettes". "Les acteurs de santé, leurs représentants, l'ensemble des parties prenantes, les politiques et les parlementaires aussi, ne mesurent pas la gravité de la situation de l'Assurance maladie", a-t-il poursuivi, se défendant de donner là "une leçon de morale".

Invité en tant que grand témoin d'une table ronde ayant pour titre "l'accès équitable aux soins", le directeur général de la Cnam a tenu, d'emblée, à passer "un petit message" à son auditoire, qui l'attendait de pied ferme. "On peut rétablir la soutenabilité de l'Assurance maladie si on mobilise tous les leviers, tous les leviers, a-t-il insisté. […] Sur les prix, sur les volumes, sur la pertinence, sur la prévention, sur l'organisation du système de soins, sur le juste soin au juste prix, sur la lutte contre la fraude… Il faut tout faire, tout faire, et accélérer sur tous les leviers." Une posture qu'il a défendue tout au long de son échange avec les représentants des différentes verticalités.

Thomas Fatôme a une nouvelle fois assumé la "diminution des dépenses d'imagerie de 300 millions d'euros" actée début novembre. "Je mesure l'impact des décisions tarifaires que j'ai prises", a-t-il dit. Et de rappeler que cette décision est consécutive à "l'échec des négociations" menées avec les syndicats sur le protocole imagerie 2025-2027. "Je ne reviendrai pas sur [ces] baisses tarifaires" entrées en vigueur le 5 novembre, a affirmé le DG de la Cnam, répétant toutefois que "[sa] porte" reste "ouverte" si les syndicats souhaitent rouvrir les discussions. "Il y a aussi des baisses prévues en 2026 et en 2027…", a souligné Thomas Fatôme, laissant entendre que les syndicats ont tout intérêt à revenir s'asseoir à la table des négociations.

Après un échange tendu avec le président de la FNMR Jean-Philippe Masson, présent dans la salle, le directeur général de la Cnam a appelé à "calmer le jeu du côté de tout le monde parce que l'appétence du négociateur à laisser sa porte ouverte finit par diminuer au fur et à mesure de ce qu'il peut entendre parfois…" Et Jean-Philippe Masson de répondre qu'"il est difficile d'aller discuter alors qu'il y a cette épée de Damoclès au-dessus de la tête des médecins", en référence à l'article 24 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2026.

Cet article habilite le directeur de l'Assurance maladie, en cas d'échec des négociations, à procéder à des baisses de tarifs "lorsqu'est documentée une rentabilité manifestement excessive au sein d'un secteur financé par des rémunérations négociées dans le champ conventionnel". Il est issu des propositions de l'Assurance maladie qui, dans son rapport Charges et produits, appelait à des mesures de régulation économique dans les champs notamment de l'anatomopathologie, de la dialyse, de la radiologie, de la biologie, de la médecine nucléaire et de la radiothérapie, où des niveaux élevés de rentabilité ont été mis en exergue par la Cnam.

Je n'utiliserai jamais le terme de rentier

Sur ce sujet, Thomas Fatôme a souhaité "dissiper une ambiguïté". "Une rente économique ça existe. C'est un système [au sein duquel] les tarifs sont anormalement élevés par rapport à des coûts de production. Ça existe dans plein de domaines, ça existe aussi dans la santé : dans le médicament, en ville, à l'hôpital." Par exemple, "les niveaux de valorisation dans la radiothérapie sont trop élevés, dans le privé comme dans le public", a-t-il illustré, reconnaissant qu'il faut "essayer de mieux déterminer ce qu'on appelle des rentabilités anormales". Le DG de la Cnam s'est toutefois défendu d'assimiler les médecins à des "rentiers". "Un professionnel de santé qui […] exerce une activité, il travaille, il n'attend pas que ça se passe. […] Je n'utiliserai jamais le terme de rentier", a-t-il martelé, appelant à "sortir de cette discussion absurde" sur ce sujet.

Thomas Fatôme a, par ailleurs, rappelé, à plusieurs reprises, son attachement au "dialogue conventionnel". Mais s'il "aboutit systématiquement à une impasse" au sujet des ajustements de tarifs, "on va être, chers amis, en grande difficulté", a-t-il lancé.

Autre sujet "chaud" sur lequel le DG de la Cnam a souhaité réagir : les dépassements d'honoraires, qui se sont invités dans le débat parlementaire. "L'Assurance maladie n'a pas proposé d'augmenter la taxe" sur les dépassements, inscrite dans le PLFSS, a-t-il tenu à rappeler. "Je ne pense pas d'ailleurs que ce soit la meilleure idée de l'année." Pour autant, "on a un vrai sujet", a-t-il ajouté, soulignant que leur montant total s'est élevé à 4,5 milliards d'euros en 2024. Les dépassements commencent à "produire un sujet d'accès aux soins, ne sont pas toujours justifiés par l'expertise, l'expérience, [ou] une difficulté au niveau des actes" et "que le tact et la mesure est parfois oublié".

Thomas Fatôme s'est montré favorable à l'ouverture d'une "discussion" sur le sujet, conformément au vœu exprimé par la ministre de la Santé devant les sénateurs. Elles devront aborder les règles d'accès au secteur 2, la question de la couverture par les complémentaires santé, les pratiques tarifaires mais aussi l'Optam, a listé le DG de la Cnam. "On avait considéré dans la convention qu'on faisait 'du paramétrique' sur l'Optam en attente de la réforme de la CCAM, c'est ce qu'on a fait", a, à ce propos, déclaré Thomas Fatôme, précisant qu'"on n'aura pas un nouveau contrat en 2026". Et de lancer un appel : "Dans la période qui est très incertaine aujourd'hui, il faut que les médecins signent l'Optam […] en se disant que c'est un pari provisoire, que ce dispositif a vocation à bouger parce qu'il est trop complexe."

Les spécialistes ont jusqu'au 3 janvier pour signer leur nouveau contrat. "Il n'y a pas un médecin qui va perdre 1 euro à signer l'Optam", a-t-il promis, provoquant quelques rires dans la salle. De nombreux médecins se sont en effet sentis lésés à la vue de leur nouveau contrat. "Les médecins qui reçoivent des taux [de dépassement] inférieurs à ce qu'ils avaient avant, c'est parce que ces taux reflètent, non plus la moyenne régionale, mais leur pratique […] et parce que les tarifs augmentent." "On ne perd peut-être pas 1 euro [avec le nouvel avenant], mais on attendait dans la négociation conventionnelle d'avoir une augmentation d'honoraires, que les [médecins en] secteur 1 ont eue", a rétorqué Elie Winter, président du Syndicat national des psychiatres privés. Thomas Fatôme a reconnu que les dépassements d'honoraires "sont, aussi, la traduction des tarifs qui n'ont pas augmenté du côté de l'Assurance maladie".

Suite au retard pris par le Haut Conseil des nomenclatures sur la CCAM, le président sortant d'Avenir Spé Patrick Gasser n'attend pas de revalorisations des actes techniques avant 2028, l'élection présidentielle s'invitant au printemps 2027 et risquant de retarder encore ces évolutions. Un délai que Thomas Fatôme espère réduire. Le DG de la Cnam s'est, en outre, montré rassurant concernant les revalorisations prévues au 1er juillet et reportées au 1er janvier 2026. "Elles vont s'appliquer." "Mesures sur le cumul d'actes, revalorisations des différentes spécialités, facteur de cotation… C'est plusieurs centaines de millions d'euros qui vont arriver dans les poches des médecins généralistes et spécialistes."

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8 débatteurs en ligne8 en ligne
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Psychiatrie
il y a 1 mois
Plutôt que de dire que les médecins doivent signer l'Optam, il faudrait déjà faire en sorte que les médecins actuellement à l'Optam y restent J'ai plusieurs collègues qui n'ont pas signé le dernier avenant en raison d'objectifs inatteignables et vont quitter l'Optam. ce sera aussi probablement bientôt mon tour au rythme où vont les choses... Par ailleurs cette mesure est totalement inégalitaire, injuste et clivante, avec des objectifs différents selon les médecins. Il n'est pas normal que des médecins exerçant la même spécialité avec une activité et des dépassements similaires aient des objectifs différents. Sans parler de la méthode de calcul pour les objectifs, totalement opaque et incompréhensible...
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2,8 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 1 mois
" le juste soin au juste prix" Le pauvre homme qui n'y connaît déjà rien au soin humain, si ce n'est sur la kafkaïenne nomenclature (et encore faudrait-il le soumettre aux QCM ! ) ne comprend même pas que rien ne peut être juste en médecine humaine dans la mesure ou pour une même "étiquette" pathologique, on ne trouve pas deux malades qui "guériront" avec la même quantité dudit soin (meilleur exemple, la durée d'arrêt de travail pour une grippe A varie du simple au triple selon que vous êtes libéral ou salarié, ouvrier de chantier de construction ou d'autoroute , ou bien SNCF-parlementeur-fonctionnaire européen ou ministériel ). Et deuxièmement, ses arguties sur le " juste prix" et l'OPTAM sont décrédibilisées simplement par l'érosion monétaire et l'inertie d'étalonnage des revalorisation des actes de la nomenclature dont les calculs sont volontairement faits non pas au plus "juste", mais bien trop juste depuis plus de 40 ans! Et ,il le sait très bien, l'hypocrite qui tremble simplement de tous ses membres en pensant qu'en prolongement du déclin désertique du soin libéral, c'est sa grosse caisse et son poste et son propre salaire (combien par mois, au juste ?) qui sont au bord du vide-ordures .
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4,8 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 1 mois
Comme avait dit un certain: les promesses n'engagent que ceux qui les croient! Mr fatome nous demande de le croire sur parole alors que tout prouve que le contraire nous attend. Vous ne perdrez pas un euro, les actes vont être revalorisés, je vais accélérer les choses .... Bla bla bla.... Il n'y a pas de juste soin au juste prix puisque les prix sont d'une indignité écrasante. Nous ne sommes pas la variable d'ajustement. Pourquoi ne mettrait il pas son salaire dans le même schéma que l'optam? S'il échoue dans sa tâche, son salaire est décoté , ça ferait des économies !
 
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