Sondage : les trois-quarts des généralistes ne comprennent rien aux CPTS

06/06/2019 Par Yvan Pandelé
Système de santé

D'après une enquête Ifop menée auprès de 200 généralistes libéraux, les mesures du Gouvernement pour lutter contre les déserts médicaux et améliorer la coordination de la médecine de ville se heurtent au scepticisme, voire au rejet, des principaux intéressés.   Elles sont censées révolutionner la médecine de ville. Pourtant, 75 % des généralistes ne comprennent toujours pas ce que sont les communautés pluriprofessionnelles territoriales de santé (CPTS). C'est l'un des constats d'une enquête Ifop pour la Mutuelle du médecin, sur le plan santé 2022 et ce qu'il inspire aux médecins généralistes. Les répondants sont même 25 % à déclarer avoir "très mal compris" la notion de CPTS. Au temps pour la révolution en médecine générale ! Autre dispositif phare de la politique de santé du Gouvernement : les assistants médicaux. Alors que les assistants doivent aider à récupérer du temps médical – une demande forte de la profession et de ses représentants –, les deux-tiers des généralistes (65 %) se disent peu ou pas du tout intéressés. Pour un tiers d'entre eux (33 %), c'est même un refus franc et massif. Faut-il y voir un effet des contreparties imposées en matière d'augmentation de la file active ou de la patientèle, largement dénoncées par les syndicats ? Les conditions d'éligibilité aux assistants médicaux, justement, restent assez opaques aux yeux des généralistes : un répondant sur deux déclare ignorer s'il sera éligible au dispositif. Même chez les médecins se déclarant éligibles (18 % de l'échantillon) l'enthousiasme demeure limité : environ un répondant sur deux (53 %) se dit intéressé. Pour les autres, c'est : merci, mais non merci. L'objectif gouvernemental de 4000 assistants d'ici à 2022 semble lointain.

  D'après le projet de texte final (encore à signer par les syndicats), l'éligibilité aux assistants médicaux est notamment conditionnée à un seuil de patientèle, à l'exercer en secteur 1 ou secteur 2 Optam, et à l'engagement dans une démarche d'exercice coordonné. MSP, centre de santé, mais aussi ESP, CPTS, maison de garde, association de permanence des soins : n'importe quelle forme d'organisation territoriale fera l'affaire, si tant est qu'elle est reconnue par la commission paritaire locale.

Dans l'ensemble, l'enquête témoigne de la persistance d'une conception traditionnelle de la médecine libérale. Une majorité (55 %) des répondants se déclarent hostiles à la remise en cause du paiement à l'acte. Une opposition d'autant plus marquée si le médecin est âgé (63 % d'opposition chez les praticien avec plus de 30 ans de carrière) et exerce en cabinet individuel (61 %).   Moi salarié ? Jamais ! pour 1/3 des MG Quant aux hôpitaux de proximité, censés favoriser la concertation entre hospitaliers et médecins de ville, ils se heurtent au scepticisme de la profession. Les deux-tiers (65 %) d'entre eux jugent que la refonte de la carte hospitalière (500 à 600 hôpitaux de proximité sont prévus) ne sera pas efficace pour répondre à la problématique des déserts médicaux. Intégrer une structure salariée dans sa région est d'ailleurs totalement inenvisageable chez un tiers (33 %) des répondants. Chez les autres, tout dépend de la rémunération : il faudra proposer entre 5000 et 8000 euros brut par mois pour qu'une part substantielle de généralistes (45 %) envisagent de changer de mode d'exercice.

  Un îlot de consensus dans cet océan de scepticisme ? Il est à chercher du côté de l'augmentation des effectifs : l'assouplissement du numerus clausus et l'augmentation du nombre de médecins formés attendue à la clé (+ 20 % annoncé par la ministre, une prévision sans doute optimiste) figurent dans le tiercé des meilleurs outils de lutte contre les déserts médicaux chez 71 % des répondants.   Déléguer, oui – au pharmacien, non La délégation de tâches est aussi plébiscitée : elle est mentionnée par 56 % des répondants – surtout chez les jeunes. Dans le détail, la délégation de tâche aux orthoptistes (examen de la vue, lunettes) et aux infirmières en pratique avancée (suivi de patients) font plutôt consensus, avec respectivement 78 % et 60 % de répondants favorables. Seule exception : la délégation aux pharmaciens (téléconsultation, vaccins) qui fait l'unanimité… contre elle : seuls 20 % des généralistes y sont favorables. La télémédecine et la télé-expertise, qui décollent doucement avec la bénédiction précautionneuse de l'avenue Duquesne, semblent également recueillir les suffrages : 52 % des répondants les placent dans leur tiercé gagnant pour venir à bout des déserts médicaux.

* Enquête Ifop pour COMM Santé et La Mutuelle du médecin sur un échantillon représentatif (méthode des quotas) de 200 médecin généralistes libéraux, par questionnaire auto-administré en ligne du 29 avril au 14 mai 2019.
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