Sandrine Rousseau, en 2021 (crédit photo : Greenbox, via Wikimedia Commons)
"Le psychiatre n'est pas un spécialiste du discernement" : la profession dénonce les propos "stigmatisants" de Sandrine Rousseau
Alors que les députés débattaient de la procédure de demande d'accès à l'aide à mourir, jeudi 22 mai, Sandrine Rousseau s'est opposée à un amendement gouvernemental prévoyant que le médecin recevant la demande consulte un psychiatre en cas de "doute sérieux" sur le discernement de son patient. Le psychiatre "n'est pas un spécialiste du discernement", a-t-elle affirmé dans l'hémicycle. Des propos qui nient les réalités de la discipline, selon le Syndicat des psychiatres français.
Sandrine Rousseau, en 2021 (crédit photo : Greenbox, via Wikimedia Commons)
Jeudi 22 mai, les députés ont renforcé la procédure collégiale dans le cadre d'une demande d'aide à mourir. Avant d'accéder à la demande de son patient, le médecin devra nécessairement convoquer une réunion avec au moins un spécialiste et un soignant qui donneront leur avis. La version initiale de la proposition de loi du député Olivier Falorni - débattue ces derniers jours à l'Assemblée nationale - prévoyait que le médecin, après avoir vérifié que la personne remplit bien les critères d'éligibilité, recueille obligatoirement "l'avis écrit" d'un médecin spécialiste de la pathologie et d'un auxiliaire médical ou aide-soignant intervenant dans le traitement du malade. Les députés ont voulu aller plus loin en imposant une réunion.
Le Gouvernement a toutefois échoué à faire adopter un amendement prévoyant que le médecin qui reçoit la demande d'aide à mourir requiert l'expertise supplémentaire d'un psychiatre ou d'un neurologue "lorsqu'il a un doute sérieux sur le discernement de la personne". La gauche, notamment, s'est opposée à cet amendement. "Je pense que vous faites une confusion à propos de la mission et des compétences du psychiatre : il est là pour diagnostiquer des maladies psychiques, ce n'est pas un spécialiste du discernement", a estimé Sandrine Rousseau, députée "Ecologiste et social", après que la ministre de la Santé, Catherine Vautrin, a défendu son amendement.
"La maladie psychique et l'absence de discernement, ce sont deux choses différentes […] Confondre discernement et maladie psychique, c'est renvoyer toutes les personnes atteintes d'une maladie psychique à une absence de discernement, donc, finalement, à un statut de sous-citoyen qui nie leur capacité de réflexion, a poursuivi la députée. […] Or, les personnes atteintes de maladies psychiques combattent depuis des années pour que soient reconnues leur autonomie et leur capacité à vivre en société !"
Nous avons besoin de propositions constructives et non de déclarations qui attaquent la confiance des citoyens envers leurs médecins
Des propos qui ne passent pas auprès de la profession. "Affirmer que le psychiatre n’est pas un spécialiste du discernement vous expose. Est-ce le but recherché en cette année de grande cause nationale pour la santé mentale ?", interroge le président du Syndicat des psychiatres français, dans un communiqué de presse, diffusé lundi 26 mai. Pour le Dr Maurice Bensoussan, par ses "propos stigmatisants", Sandrine Rousseau met "en cause les psychiatres médecins spécialistes du diagnostic, du traitement et de la prévention des troubles mentaux".
"Voulez-vous les réduire à être des spécialistes de l'enfermement alors que la procédure juridique ou pénale les sollicite pour arriver à établir responsabilité et discernement des mis en cause ?", écrit le psychiatre. Et de préciser que "toutes les mesures de protection comme les curatelles impliquent d’apprécier le discernement". "Vos propos minimisent l'importance et la complexité de l'évaluation de la capacité d'une personne à prendre des décisions éclairées concernant sa santé et son bien-être", dénonce le Dr Bensoussan pour qui, si "une députée doit pouvoir tout dire" dans un pays démocratique, "elle engage sa crédibilité".
"Nous avons besoin de propositions constructives et non de déclarations qui attaquent la confiance des citoyens envers leurs médecins", insiste le président du SPF. Ce dernier demande à Sandrine Rousseau de "rectifier" et de "clarifier" ses propos et à s'"engager dans un dialogue plus constructif avec les représentants de la psychiatrie pour mieux comprendre les enjeux et les réalités de notre discipline médicale". "Il est temps de travailler ensemble pour améliorer les soins en santé mentale et soutenir ceux qui en ont besoin", lance enfin le Dr Bensoussan.
Le vote de la proposition de loi dans son ensemble, en première lecture, est prévu ce mardi 27 mai.
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