Délivrance de médicaments à l'unité : la Cour des comptes ne recommande pas sa généralisation
Si la délivrance à l'unité de médicaments peut être "un moyen de remédier" au gaspillage, elle ne constitue pas, pour autant, "un levier décisif pour réduire les dépenses de santé", estime la Cour des comptes, qui ne prône pas sa généralisation.
Alors qu'en France les médicaments sont essentiellement conditionnés et distribués au public en boîtes, "ce conditionnement et ce mode de délivrance suscitent des interrogations dans la mesure où une délivrance à l'unité généralisée apparaît comme susceptible d'engendrer d’importantes économies", souligne la Cour des comptes, dans un rapport rendu public vendredi 7 novembre. En 2024, la dépense de médicaments en officines de ville s'est élevée à un montant total de 30 milliards d'euros, rappelle l'institution.
Saisie par le président de la commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale, la Cour des comptes a cherché à apprécier "quels seraient les avantages, les inconvénients et les conditions d'un passage de la délivrance à la boîte à une délivrance à l'unité des médicaments, du point de vue de la santé publique, du financement du système de santé, des patients et des nuisances environnementales". Même si elle ne constitue pas "un levier décisif pour réduire les dépenses de santé", la pratique "pourrait être développée et rendue obligatoire de manière sélective", préconisent les Sages de la rue Cambon.
Cette délivrance à l'unité pourrait s'imposer "au moins" pour les "antibiotiques", les "médicaments les plus dangereux ou onéreux", et "en cas de pénurie".
La Cour des comptes ne plaide pas, en revanche, pour une généralisation, car celle-ci "bouleverserait l'ensemble de la production et de la distribution des médicaments, et augmenterait dans une proportion non négligeable la durée de l'acte de délivrance au comptoir des pharmacies ainsi que la rémunération de celle-ci", justifie l'institution. "Les éléments observés et les hypothèses étudiées montrent qu'une telle transformation ne serait pas de nature à limiter substantiellement la structure et la dynamique des dépenses de santé", ajoute-t-elle.
La Cour souligne que "la comparaison des grands indicateurs de dépenses de santé entre pays de l'OCDE ne met d'ailleurs pas en évidence de corrélation entre délivrance à l'unité et moindre dépense pharmaceutique".
Une fausse bonne idée
Les syndicats de pharmaciens d'officine mais aussi de l'industrie du médicament ne cessent de répéter que systématiser ce mode de délivrance est "une fausse bonne idée" tant sa mise en œuvre s'annoncerait compliquée et coûteuse. La Cour des comptes s'accorde à dire que "les difficultés matérielles de mise en œuvre au comptoir, de gestion des reliquats des boîtes et de tarification n'incitent pas les pharmaciens à la pratiquer en dehors des cas où elle est obligatoire".
Aujourd'hui, en effet, "toute la chaîne pharmaceutique en France, de la fabrication du médicament à la remise au patient en passant par la répartition entre les officines, est organisée en fonction de la boîte, y compris les logiciels de gestion des stocks et la tarification pour la vente au public". La boîte constitue, en outre, "le support de l'authenticité, de la traçabilité et de la sécurisation du médicament". Une généralisation de cette pratique risquerait de poser un problème de traçabilité et nécessiterait de faire évoluer le mode de rémunération des pharmaciens, avance le rapport.
Toutefois, la Cour des comptes reconnaît que la vente à l'unité, qui ne peut s'appliquer qu'aux médicaments sous forme orale sèche (comprimés et gélules), présente certains "avantages significatifs" pour l'environnement et en termes de réduction du gaspillage de médicaments et de risque pour les patients (automédication, antibiorésistance...).
A ce jour, les délivrances à l'unité ne représentent que 0,08% des dépenses de médicaments délivrés en ville. Elle est obligatoire de longue date pour la vente de produits stupéfiants et, depuis 2024, pour la vente de produits soumis à des difficultés d'approvisionnement lorsque les autorités sanitaires le décident (cas de la quétiapine, antipsychotique, en 2025). Elle est aussi autorisée depuis 2022 pour la vente d'antibiotiques, pour lutter contre le gaspillage et l'antibiorésistance.
[avec AFP]
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