Les pharmaciens accusés de voler des actes aux infirmiers : la profession porte plainte

La guerre est déclarée entre représentants des infirmières libérales et des pharmaciens. Alors que la campagne de vaccination contre la grippe bat son plein, les communiqués fusent. Surtout du côté de Convergence infirmière, syndicat représentatif des Idel, qui vient notamment de dévoiler les résultats d'une enquête faisant état de "dérives" de la part des officinaux. 

Cette consultation, à laquelle 2790 Idel ont répondu, révèle d'abord l'"effondrement" de l'activité vaccinale infirmière : 6 répondantes sur 10 estiment qu'elle a baissé de plus de 50%, en grande majorité (95%) car la vaccination est désormais réalisée "par un autre professionnel de santé". "Depuis que les pharmaciens vaccinent, je n’ai plus aucun rendez-vous au cabinet", témoigne une Idel, citée par le syndicat. "Les pharmacies ont récupéré 80% de la vaccination", estime une autre répondante. 

D'autres témoignages dénoncent le "forcing" et la "captation des patients par les pharmaciens" : "Les pharmaciens proposent systématiquement de faire les vaccins dès l’achat", "le patient se sent contraint de se faire vacciner en pharmacie", "les pharmaciens ne laissent pas le choix au patient"… Des faits préoccupants pour Convergence infirmière, qui appelle à "une clarification urgente des règles de délivrance, un accès garanti aux vaccins pour les Idel, afin d’assurer leur mission de santé publique, une meilleure coordination interprofessionnelle et une reconnaissance pleine et entière du rôle des Idel dans la stratégie vaccinale, au même titre que les autres professions de santé".

"Il faut arrêter de diffamer"

Le syndicat s'offusque également de la généralisation de l'expérimentation Osys en pharmacie, qui va permettre aux officinaux "de s’implanter dans le champ infirmier et de réaliser des pansements". "Les pharmaciens ont décidément à cœur de s’attribuer les rôles de toutes les professions de santé : médecin, vaccinateur, dermatologue, et désormais… infirmier ! Comment peut-on tout vouloir sans jamais se soucier des compétences, de la qualité ni de la sécurité des patients ?", fustigeait Convergence, dans un communiqué du 26 septembre dernier.

Dénonçant ces "vagues de dénigrement par d’autres professionnels de santé, à travers la voix de leur président(e) de syndicat via les réseaux sociaux", l'Union des syndicats de pharmaciens d'officine (Uspo) annonce ce vendredi 21 novembre qu'il s'associera à la plainte déposée par le Conseil central de la section A de l’Ordre des pharmaciens. "Ces agissements portent atteinte d’une part à la légitimité des missions de santé publique assurées par les pharmaciens et d’autre part à leur statut de professionnel de santé déontologiquement responsable", pointe le syndicat. 

Si le communiqué de l'Uspo ne mentionne pas de nom, le président du syndicat, Pierre-Olivier Variot, joint par Egora, confirme que la procédure vise "pour l'instant" Convergence infirmière mais que d'autres responsables syndicaux pourraient être ciblés. "S'il y a des choses factuelles, s'il faut poursuivre un pharmacien qui bosse mal, on le fera, j'ai aucun état d'âme là-dessus. Par contre, il faut arrêter de diffamer."

Contactée par Egora, Ghislaine Sicre, présidente de Convergence infirmière, indique n'avoir pas encore reçu de plainte. "Je ne peux pas réagir à quelque chose que je n'ai pas reçu, commente-t-elle. Ce que je peux dire, c'est que je défends les infirmiers, nous avons plus de 900 témoignages d'infirmières qui se plaignent des agissements des pharmaciens. On voulait mettre en avant et arrêter ces dérives. On ira se défendre, on ira défendre le travail infirmier sur le terrain, et la sécurité des patients."