Trahison

Pas d'accès direct, une prescription restreinte… La profession infirmière s'estime "trahie" par le projet de décret

Le texte soumis à concertation, qu'Egora a pu consulter, est jugé "restrictif" et en "décalage" avec les avancées majeures permises par la loi infirmière du 27 juin dernier. Syndicats et Ordre appellent le futur Gouvernement à corriger la copie. 

26/09/2025 Par Aveline Marques
Infirmières
Trahison

"Ce projet de décret ne se contente pas de préciser la loi : il en corrige l’esprit, dans un sens restrictif", déplorait le Syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), dans un flash du 12 septembre. Jeudi 25 septembre, c'était au tour de l'Ordre national des infirmiers (ONI) de dénoncer "un décalage préoccupant entre la reconnaissance législative majeure pour la profession infirmière" que représente la loi du 27 juin 2025 et la "rédaction actuelle" du projet de décret d'application, soumis à la concertation par la DGOS. Pour Convergence infirmière, le constat est sans appel : "la loi infirmière est trahie", juge le syndicat d'Idel, dans un communiqué diffusé ce vendredi 26 septembre.

Ce projet de décret, qu'Egora a pu consulter, vise à "définir l'exercice de la profession infirmière". Il précise pour cela les "domaines d'activités et de compétences" de l'IDE, définit ses "rôles" et décline "les modalités de la consultation infirmière", consacrée par la loi Dubré-Chirat. 

Mais plusieurs manquements sont relevés par les organisations infirmières. Ainsi, la conciliation médicamenteuse, qui fait partie des missions reconnues par la loi, est absente et les soins relationnels ne sont pas définis, soulignait le SNPI ; quant à la mission d'orientation dans le parcours de soins, elle se transforme en "coordination", limitant ce rôle "à une fonction passive", déplore l'ONI.

La consultation infirmière est décrite, mais rien n’indique qu’un patient puisse y accéder sans prescription

Autre grand absent : l'accès direct. Alors que "pour des millions de patients sans médecin traitant, il représentait un espoir : celui d’accéder rapidement à un professionnel de santé compétent, sans passer par un parcours administratif compliqué", le projet de décret "reste muet", pointe le SNPI. "La consultation infirmière est décrite, mais rien n’indique qu’un patient puisse y accéder sans prescription", estime le syndicat. Même lecture pour l'Ordre infirmier, qui considère que "le projet de décret ignore cette avancée majeure". Or, "sans traduction concrète ni remboursement par l’Assurance Maladie, l’accès direct resterait une promesse sans effet", redoute l'instance.

Par ailleurs, si le projet de décret permet à l'infirmière "de prescrire des produits de santé et des examens complémentaires", il prévoit qu'un arrêté en fixe la liste et limite son champ au "domaine des soins infirmiers". "Réduire la prescription infirmière, c’est multiplier les allers-retours inutiles pour obtenir une signature médicale. C’est ralentir la prise en charge, encombrer les cabinets et retarder les traitements", alerte le SNPI. "Une telle approche ne reflète pas la réalité : chaque jour, les infirmiers exercent déjà un rôle autonome, au plus près des patients. Le décret doit traduire clairement cette reconnaissance", insiste l'ONI.

Actes délégués aux aides-soignantes

Dernier point, soulevé par Convergence infirmière : la possibilité de déléguer des actes aux aides-soignantes, y compris hors supervision. L'IDE pourrait ainsi "confier à l'aide-soignant ou l'auxiliaire de puériculture la réalisation, le cas échéant en dehors de sa présence, de soins courants de la vie quotidienne, définis comme des soins liés à un état de santé stabilisé ou à une pathologie chronique stabilisée et qui pourraient être réalisés par la personne elle-même si elle était autonome ou par un aidant". "La réforme doit valoriser les infirmières et infirmiers au bénéfice des patients, et non organiser une mise en danger institutionnalisée des IDE et des patients", s'insurge Convergence infirmière.

Autant de raisons pour lesquelles l'Ordre infirmier appelle le futur Gouvernement à "réviser ce projet afin qu'il soit pleinement fidèle à l'esprit de la loi". 

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Claire FAUCHERY

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474 points
Incontournable
Médecine générale
il y a 2 mois
"La réforme doit valoriser les infirmières et infirmiers au bénéfice des patients, et non organiser une mise en danger institutionnalisée des IDE et des patients", s'insurge Convergence infirmière." Comme s'est amusant... c'est exactement ce que les médecins disent quand on le gouvernement veut autoriser les IPA a prescrire des anti-HTA...
 
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