Pensées suicidaires, alcool… La santé mentale des médecins se dégrade partout en Europe
Une enquête de la branche Europe de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), publiée ce vendredi 10 octobre, alerte sur la santé mentale des médecins et infirmières.
"Alors que l'Europe risque de manquer de près d'1 million de professionnels de santé d'ici 2030, nous ne pouvons pas nous permettre de les perdre à cause de l'épuisement professionnel, du désespoir ou de la violence", met en garde le directeur de la branche Europe de l'OMS, le Dr Hans Kluge, cité dans un communiqué de presse. A l'occasion de la Journée mondiale de la santé mentale, l'organisation onusienne publie une enquête menée entre octobre 2024 et avril 2025 auprès des médecins et infirmières exerçant dans l'Union européenne, en Islande et en Norvège. Parmi les 122 048 réponses obtenues, un peu plus de 90 000 ont été jugées valides.
Les résultats sont plus qu'alarmants. "En Europe, un médecin ou une infirmière sur 3 souffre de dépression ou d’anxiété", souligne ainsi le Dr Hans Kluge. Un taux cinq fois supérieur aux estimations dans la population générale européenne. Parmi les répondants, 3 % montrent des signes de probable dépendance à l'alcool. En outre, "plus d'un sur 10 a déjà envisagé de mettre fin à ses jours ou de se faire du mal. C'est un fardeau inacceptable pour ceux qui prennent soin de nous". Les infirmières et les femmes médecins sont plus sujettes à la dépression et à l'anxiété, tandis que les hommes médecins signalent une prévalence plus élevée de probable dépendance à l'alcool, lit-on dans l'enquête.


Source : rapport de l'OMS Europe.
Les professionnels de santé exerçant notamment aux urgences présentaient les niveaux d'anxiété et de dépression les plus élevés. C'est en Lettonie et en Pologne que les taux de dépression les plus élevés (près de la moitié des répondants) ont été observés. En revanche, les soignants du Danemark et de l'Islande affichent des niveaux de prévalence bien inférieurs (environ 15%). Concernant l'anxiété, la France se hisse au deuxième rang des pays où les médecins et infirmières sont les plus angoissés. Selon cette enquête menée auprès des médecins et infirmières, l'Hexagone se trouve en tête des pays européens pour la dépendance à l'alcool.
Menaces, violences physiques et harcèlement sexuel
L'enquête montre également qu'un médecin ou une infirmière sur 3 en Europe a été victime d’intimidation ou de menaces au travail. 70% des répondants déclarent être "fréquemment exposés" à des patients ou des proches en colère sur leur lieu de travail. Et plus de 10 % ont signalé des violences physiques et du harcèlement sexuel au cours de l'année. C'est à Chypre, en Grèce et en Espagne que des actes de violence, quels qu'ils soient, ont été le plus signalés.
Les médecins et infirmières exposés à la violence signalent une santé mentale plus fragile et une prévalence accrue de dépendance à l'alcool. La santé mentale la plus fragile a été constatée chez les soignants exposés au harcèlement sexuel et à l'intimidation.
Un focus a été consacré aux horaires de travail et aux types de contrats des médecins et infirmières européens. Un médecin sur quatre en Europe travaille plus de 50 heures par semaine. Les professionnels exposés à des horaires et des contrats de travail moins stables – "tels que des horaires prolongés fréquents, des gardes de nuit, des rotations et des contrats temporaires", très fréquents en France selon l'enquête – déclarent des taux plus élevés d'anxiété et de dépression, ainsi qu'une prévalence accrue de dépendance à l'alcool.
🔴 1 in 3 doctors & nurses in Europe is struggling with depression or anxiety.
🔴1 in 10 has recently thought they would be better off dead.
🔴1 in 3 faces bullying or threats at work.
🔴1 in 10 has been physically assaulted or sexually harassed.
These are the findings of… pic.twitter.com/b5gFOwUzTo— Hans Kluge (@hans_kluge) October 10, 2025
Pour améliorer les conditions de travail des soignants en Europe et, ainsi, leur santé mentale, la branche régionale de l'OMS préconise sept pistes d'action, comme appliquer une tolérance zéro à l'égard de l'intimidation, du harcèlement et des autres formes de violence au travail ou encore réformer la politique sur les heures supplémentaires.
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