Généraliste, pourquoi j'ai fait le choix de refuser la ROSP

26/04/2017 Par F. Na.

"Madame, je vous informe de ma décision de ne pas adhérer à la ROSP, les critères n'étant pas plus pertinents que la fois précédente." Dans un courrier sec et courtois, le Dr Georges Delamare informait sa CPAM de son rejet de la ROSP. Pour Egora, ce généraliste explique pourquoi il refuse ce système qui réduit le "temps de cerveau disponible des médecins".

Généraliste en secteur 1, le Dr Georges Delamare est installé dans une ZUP du Loir-et-Cher "avec 50% de CMU et 70 nationalités". "J'ai déjà refusé la ROSP l'année dernière. C'est un système qui ne repose sur rien d'efficient sur le plan de la santé. Les items de santé publique ne sont pas pertinents. Décompter le nombre de fonds d'œil chez les diabétiques alors qu'on n'a plus assez d'ophtalmos ? C'est un objectif inatteignable dans les conditions dans lesquelles j'exerce.

Les autres objectifs sont très flous, incompréhensibles ou ne reposent sur rien de scientifique. Prenons les benzodiazépines. On nous dit qu'il ne faut plus en donner aux patients âgés. Bon, c'est un vœu pieu mais tout va bien. Sauf que les syndicats ont expliqué à leurs adhérents comment contourner le problème, c'est-à-dire comment atteindre les objectifs en continuant à prescrire des tranquillisants qui n'étaient pas des benzodiazépines. Ça fait plaisir aux syndicats de faire croire aux médecins qu'ils vont pouvoir gagner plus d'argent. C'est d'une rare hypocrisie, d'une rare médiocrité et ça n'a donc aucun intérêt. Prenons d'autres items, comme l'informatique. Moi, par exemple, je suis informatisé avec un logiciel qui a été mis à jour la dernière fois en 2002. Tous les confrères se sont plaints de l'augmentation du tarif des logiciels, compte tenu des obligations que réclamait la Sécurité sociale. En plus on leur a mis de la pub dedans. Ils ont bouffé en informatique la prime de la ROSP. La moyenne de la prime est à 6 000 euros par généraliste. Quand vous avez payé la moitié d'impôts là-dessus, il en reste 3 000. Et quand vous avez payé l'augmentation du prix des logiciels et de tout le reste, il ne reste plus rien. Ça n'a vraiment aucun intérêt. Le principe même de la ROSP me dérange. On a vu des gens se vanter de toucher 14 000 euros de ROSP. Quand vous pensez que c'est l'équivalent d'un SMIC annuel pour quelqu'un qui travaille… C'est quand même assez scandaleux qu'on donne de l'argent aux médecins pour mettre des croix dans des cases pour rentrer dans les items de la Sécurité sociale. Et qu'ils se vantent d'avoir une grosse ROSP en pensant qu'avec ça, ils font un bon travail. Alors que ça n'a rien à voir. Si on a vraiment besoin d'argent, ce qui peut se comprendre pour certains jeunes confrères, qui viennent de s'installer, ça correspond à deux consultations de plus par jour, en travaillant cinq jours par semaine. Ce n'est quand même pas la mer à boire, et compte tenu de la pénurie médicale, ce n'est pas un objectif inatteignable. On sait que les données sont biaisées dès le départ, et les statistiques foireuses, mais on fait quand même la course à la ROSP. On a entendu des médecins raconter qu'ils comptabilisaient le fond d'œil alors qu'il était fait à l'hôpital, que le patient était suivi par les diabétologues de l'hôpital. Le temps de cerveau disponible du médecin est focalisé sur le gain maximal. C'est complètement aberrant, ça n'a rien à voir avec ce qu'on doit faire en tant que médecin. On est dans la technique de l'évaluation, Dominique Dupagne nous a bien expliqué que ça ne valait rien. Pour que la ROSP ait un sens, il faudrait que les objectifs soient définis d'une façon intelligente. Ce qui n'est pas le cas. On fait à peu près du n'importe quoi, pour boucher les trous, pour faire semblant. "

La consultation longue à 60 euros pour les patients de plus de 80 ans et/ou handicapés est-elle une bonne mesure ?

A Rem

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