Fermé.

"Ce sont les patients qui en payent le prix" : en pleine épidémie de grippe, la fermeture partielle de ces centres médicaux plombe les urgences

Depuis plusieurs semaines, une vingtaine de centres médicaux à horaires élargis (CHE) des Bouches-du-Rhône n'ouvrent plus leurs portes les soirs et les week-ends. Ces structures, qui avaient lancé une grève fin 2024, dénoncent les nouvelles règles de cotation des majorations d'urgence aux horaires de la PDSA (hors régulation), entrées en vigueur en décembre. Selon leurs représentants, la restriction de leur activité engendrerait une surcharge d'activité dans les urgences du territoire et des retards de soins. "Nous n’avons pas d’autres choix pour [nous] faire entendre", insistent-ils. 

21/01/2025 Par Sylvain Labaune
Fermé.

Dans les Bouches-du-Rhône, 25 centres médicaux à horaires élargis (CHE) sur 45 restent fermés après 20h et le week-end. Mécontents des nouvelles règles de cotation des consultations non programmées, ces centres ont choisi depuis début janvier de limiter leur activité aux horaires de journée, en semaine uniquement.

Selon les représentants des CHE, ces fermetures partielles entraînent un afflux assez important de patients vers les hôpitaux, aggravant l’engorgement des urgences déjà sous forte pression avec l’épidémie de grippe. Plusieurs hôpitaux du département ont récemment déclenché leur plan blanc, dont les CH de Martigues, d’Aix-Pertuis et de Salon-de-Provence.  

En temps normal, ces centres accueillent des patients sans rendez-vous, 7 jours sur 7, de 9 heures à 22 heures, pour des consultations de médecine générale. Cela représente environ 6 000 patients par jour dans le département en cumulant l’activité des 45 centres, dont un quart après 20 heures et le week-end. "La fermeture partielle des 25 centres représente environ 3 000 patients non pris en charge chaque samedi, 2 500 le dimanche, et autour de 500 à 1 000 chaque soir", estime le Dr Antoine Juhel, à la tête de plusieurs centres sur la Côte Bleue, près de Marseille, désormais fermés après 20 heures.  

Au total, il y aurait actuellement au minimum 8 000 patients non pris en charge chaque semaine à cause de la fermeture partielle des CHE.  

 

Des patients dont l’état risque de se dégrader 

Si l’impact des fermetures partielles est encore difficile à mesurer, il est "probable" que cela provoque des retards de soins, affirme Antoine Juhel. "De nombreux patients attendent le lendemain pour venir consulter, car ils ne veulent pas aller aux urgences, au vu de l'affluence, et de ce qu’ils entendent dans les médias."

"Or, les patients qui retardent leurs soins risquent de se dégrader voire d’être hospitalisés, alors que nous aurions pu les prendre en charge en amont pour éviter cela", complète la Dre Aurore Baudoin-Haloche, responsable de l’Espace médical Corderie, dans le 7e arrondissement de Marseille. "Une situation d’autant plus inquiétante qu’il m’arrive actuellement d’avoir 30 consultations en journée pour des grippes", ajoute la généraliste.  

Toutefois, les représentants des CHE assurent que l’objectif n’est pas de mettre sous tension le système de santé des Bouches-du-Rhône. "Malheureusement, nous n’avons pas d’autres choix pour se faire entendre et pouvoir enfin discuter des tarifs avec la CPAM et l’ARS", précise Antoine Juhel. 

A ce jour, les représentants des CHE affirment n’avoir toujours pas obtenu de rendez-vous avec l’ARS et la CPAM, malgré la grève totale organisée récemment. Les 45 centres du département ont fermé leurs portes du 23 décembre au 2 janvier, y compris en journée, pour protester contre les nouveaux tarifs.  

"Nous demandons à être rapidement reçus pour pouvoir enfin discuter de façon sereine sur cette nouvelle convention qui a été réalisée trop vite. Finalement, ce sont les patients qui en payent le prix", déclare Antoine Juhel. "Nous avons l’impression que cette absence de retour est souhaitée par les instances, de même qu’une minimisation de l’impact de nos fermetures", ajoute-t-il.  

Pourtant, la grève totale à la fin d’année a eu un impact "indéniable", et elle peut être "directement liée" au déclenchement des plans blancs, d’après les représentants des CHE.  

"Preuve en est, la situation à la régulation et dans les hôpitaux s’est améliorée concomitamment à la reprise de notre activité à partir du 2 janvier", déclare le Dr Jérémie Chaumoitre, responsable de plusieurs centres dans les Bouches-du-Rhône.  

La nouvelle convention avec l’Assurance maladie, en vigueur depuis le 22 décembre, ne prévoit plus qu’une majoration de 5 euros pour les consultations réalisées aux horaires de la PDSA, mais hors régulation. Auparavant, la majoration était de 35 euros tous les jours après 20h, et de 19,06 euros les dimanches, jours fériés et samedis (après 12 heures). 

Pour bénéficier de majorations, les CHE doivent désormais être sollicités par la régulation dans le cadre de la PDSA, ou bien justifier du caractère urgent de la consultation lorsque le patient se rend de lui-même au centre. L’objectif affiché par l’Assurance maladie est de mettre fin à certains abus de tarification, qu’elle explique avoir constatés avec le précédent système.  

 

Pas de surcharge d’activité liée aux fermetures pour l'ARS

Interrogée par Egora, l’ARS Paca se dit totalement disposée à recevoir en 2025 les représentants des CHE. "On organisera une rencontre à l’issue de la période hivernale de tension, sous la forme d’un retour d’expérience avec les acteurs de ville, dont les cabinets à horaires élargis", explique Augustin Viard, directeur des soins de proximité à l’ARS. 

Toutefois, l’ARS conteste l’existence d’un lien direct entre la saturation des urgences et la fermeture totale puis partielle des CHE. "Ce qui fait la surcharge, c’est d’abord et de loin l’épidémie de grippe, particulièrement forte cette année, accentuée par une faible vaccination. Il faut être très clair là-dessus, répond Augustin Viard. Mais, effectivement, la situation n’a pas été aidée par la fermeture non seulement des CHE mais aussi, dans l’ensemble, par le départ en congés de nombreux médecins libéraux pendant les fêtes."

Augustin Viard précise, par ailleurs, que la convention entre les médecins libéraux relève de l’Assurance maladie et non pas des ARS. Néanmoins, l’ARS coordonne l’organisation de la PDSA. A ce titre, elle encourage fortement les médecins des CHE à participer au dispositif, sachant que le planning n’est "pas toujours rempli à 100%" dans les Bouches-du-Rhône. "Cela leur permettrait notamment de continuer à bénéficier des majorations sur les horaires de nuit et de week-end", conclut Augustin Viard. 

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Claire FAUCHERY

Claire FAUCHERY

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3 débatteurs en ligne3 en ligne
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Débatteur Passionné
Anesthésie-réanimation
il y a 11 mois
Mouais, comment entamer un dialogue de sourds?! Et qui a commencé, l’œuf ou la poule?! Alors en vrac les consultations non programmées rendent bien des services. Pour les "soucis" médicaux quotidiens douloureux ou inquiétants mais pas "invalidants", on peut concevoir que après la journée de travail ou le we c'est plus "pratique". On entend bien aussi que longtemps la consultation était mal rémunérée (elle l'est sans doute encore) et que "pour quelques € de plus" ce n'est pas très motivant d'assurer une permanence. Est-il bien nécessaire de tarifer ces consultations au tarif des urgences en arnaquant la sécu? Alors qu'il est possible de tarifer les "vraies urgences" au vrai tarif. Les ARS ont beau jeu de crier à l'escroquerie et de botter en touche puisque dans les nombreuses tâches où elles ne sont pas compétentes, il y a les conventions qui relèvent de l'assurance maladie. L'assurance maladie a beau jeu de crier à l'escroquerie et de se défiler puisque ce n'est pas elle qui vote l'ondam. L'Assemblée Nationale a beau lieu de crier à l'escroquerie quand elle n'est pas dissoute et se défiler quand même puisque vous comprenez, avec les déficits, toussa, c'est bien difficile... Pourtant, chacun fait le constat: les déserts, la fatigue, la démotivation.... Et même que "c'est le patient qui paye le prix" doublement, une partie lui est remboursée mais ni le temps perdu ni le mépris dont il fait l'objet (consommateur de soins, impatient) alors que dans le lot il y a de vraies difficultés. Ce qui me choque c'est que les médecins de ces centres aient vu un moyen commode de "mettre du beurre dans les épinards" et aient rendu complices les patients en installant non seulement des pratiques douteuses mais parfois réellement frauduleuses avec des pseudo cabines pour appeler le 15 et justifier une régulation et un "envoi" dans ces centres. Ce qui me choque c'est que tout le monde (œuf et poule) connait l'arnaque et s'en lave les mains tant que ça ne fait pas de vague. Et quand la vague survient, tout le monde dit "c'est l'autre" qui est responsable comme ça les mains sont bien propres mais cela n’empêche ni l'épidémie de grippe ni les plans blancs qui bien sûr n'ont rien à voir... Ah bon? Mais alors y aurait il d'autres dysfonctionnements? D'autres problèmes non réglés? ... Chhuutt!!! Passez votre chemin, "y" a rien à voir "On" vous dit! "On" va créer une mission Flash des fois que "y" aurait des solutions faciles qu'"On" n'aurait pas vues.
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17,5 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 11 mois
Faut dire quand même ce qui est, ces centres ont fait leur beurre en grande partie en arnaquant la sécu pendant des années, pour prendre en charge au tarif de l'urgence des patients simplement impatients. L'entorse bénigne ou la gastro à 70 €, c'était un peu abusé quand même. C'est bien qu'on remette un peu d'ordre dans le poulailler.
il y a 11 mois
Centre de soins non programmés près de chez moi. J'avais déjà remarqué mais par curiosité, pour alimenter la discussion ici, j'ai regardé de nouveau sur Doctolib. J'ai une ribambelle de créneaux de rendez-vous disponibles et proposés : un peu dès aujourd'hui, de plus en plus chaque jour jusqu'à fin juillet ! "Non programmés" qu'on a dit ? Il y a quelque chose qui m'échappe.
 
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