Angioplasties injustifiées, revenus record… Deux cardiologues suspendus de leur activité libérale

19/10/2020 Par Sandy Bonin
Faits divers / Justice

Deux cardiologues du CHR d'Orléans viennent d'être suspendus temporairement de leur activité libérale et ne peuvent plus pratiquer d'angioplastie coronaire. Les autorités sanitaires leur reprochent d'avoir multiplié les interventions, souvent de façon "injustifiée", pendant des années en mettant en danger la santé des patients.   Le 10 février dernier, à la demande de l'Agence régionale de santé, une inspection a été menée dans le service cardiologie de Centre hospitalier régional d'Orléans. Deux professeurs, membres du Gaci, un groupe d'experts qui dépend de la Société Française de Cardiologie, sont venus in situ consulter quelques dossiers et rencontrer les médecins du service. Ils ont constaté que les deux cardiologues du service semblaient avoir multiplié sans raison les interventions d'angioplastie coronaire. En effet, depuis quatre ans, le nombre d'angioplasties coronaires pratiquées à l'hôpital d'Orléans a été multiplié par quatre passant de 500 à 600 procédures par an en 2015 à plus de 2.200 en 2018. Cette explosion correspond à l'arrivée dans le service cardiologie de l'un des deux médecins mis en cause. En 2018, ce même médecin a sans doute battu "un record de France", note le rapport, avec 1.250 interventions. C'est pratiquement le double de ce que font habituellement les cardiologues dont c'est l'unique activité.

L'inspection a mis en lumière que deux médecins du service avaient souvent " surévalué la gravité" des lésions observées pour procéder à des angioplasties. D'ailleurs, il est noté que dans les cas litigieux, il est rarement fait recours à des tests au préalable. L'âge de leurs patients étonne aussi avec des personnes très âgées, de plus de 90 ou 95 ans, parfois en soins palliatifs. Les compétences des deux cardiologues orléanais ne sont pas mises en cause. Au contraire, le rapport fait état " d'une certaine habilité technique témoignant d'une expérience certaine. Aucune complication notable n'a été relevée dans les dossiers examinés." Mais, les conclusions du rapport sont claires : " recours inapproprié à l'angioplastie coronaire ne se justifiant pas et mettant en danger la santé des patients, absence de concertations médicales et réalisation de gestes inappropriés chez des patients très âgés (patient de 90 ans stenté en cinq temps)", note France Bleu qui cite le rapport d'inspection. En effet, la pratique du "feuilletonage" a également été relevé chez...

les deux cardiologues. Cette méthode consistant à traiter en plusieurs fois, et surtout plusieurs hospitalisations, les différentes lésions, sans aucune justification médicale". En clair, des patients ont subi trois, quatre voire cinq interventions quand une seule ou deux auraient suffi selon le Gaci. Ces activités procuraient aux praticiens d'importants revenus. "On a constaté un chiffre d’affaires hors norme. Les revenus globaux de cette personne, qui n’exerçait qu’à temps partiel, étaient surprenants puisqu’il figurait dans le top 10 des revenus des cardiologues libéraux de la région. Il percevait trois fois la moyenne régionale", indique le Dr Michel Matas, médecin conseil à la CPAM au sujet d'un des deux praticiens. Suite à cette inspection, l'Agence régionale de santé a ordonné en août dernier que les deux cardiologues du CHRO mis en cause soient suspendus de leur activité libérale. L'un pour un an, l'autre pour six mois. Ils contestent tous les deux cette décision et ont déposé un recours. Les deux médecins ne peuvent plus pratiquer d'angioplasties coronaires à l'hôpital d'Orléans jusqu'à nouvel ordre. "Choqués", les deux praticiens contestent fermement les faits qui leur sont reprochés, point par point. Ils ont déposé un recours. Dans un entretien à la République du Centre, ils justifient leurs pratiques et déplorent un rapport à charge. "Pour moi, quand on travaille bien et beaucoup on doit être récompensés, pas sanctionnés. J'ai été très déstabilisé par cette histoire. J'ai été arrêté pendant trois semaines pour syndrome dépressif. J'avais demandé à avoir un peu de repos mais aujourd'hui je ne suis pas contre reprendre mon activité. J'avais la tête dans le guidon. Je regrette que quelqu'un ne m'ait pas ouvert les yeux de façon plus confraternelle que ce rapport à charge. On se sent poussés vers la sortie. Mais on n’a rien à cacher", témoigne l'un des cardiologues. Le conseil régional de l'Ordre des médecins a été saisi, ainsi que la Caisse primaire d'Assurance maladie.   [Avec larep.fr et francebleu.fr]  

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Claire FAUCHERY

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