La kétamine, très nocive pour l’appareil urinaire

Les urologues s’inquiètent de la consommation croissante de kétamine, stupéfiant qui engendre d’importantes atteintes, parfois irréversibles, à l’appareil urinaire. En octobre, de premières recommandations de prise en charge des cystites liées à la kétamine ont été publiées par l’Association française d’urologie.

06/01/2025 Par Romain Loury

118e Congrès français d'urologie Urologie

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Découverte en 1962, d’abord utilisée comme anesthésiant, la kétamine a rapidement fait l’objet d’un usage détourné pour ses effets hallucinogènes et euphorisants, principalement sous forme "sniffée", avant d’être inscrite en 1997 sur la liste des substances classées comme stupéfiants. Selon les chiffres 2023 de l’Observatoire français des drogues et des tendances addictives (OFDT), 2,6% des adultes français l’ont expérimentée dans leur vie, devant l’héroïne (2%), mais loin derrière la cocaïne (9,4%) et le cannabis (50,4%).

Au-delà de ses méfaits neurologiques, la kétamine a comme particularité de causer des dommages, souvent irréversibles, à l’appareil urinaire, et ce bien plus que d’autres stupéfiants. "L’excrétion du métabolite actif se fait par la voie urinaire, il y a donc une atteinte qui touche tout le système urinaire, pas uniquement la vessie. On parle beaucoup des cystites à la kétamine, mais on compte jusqu’à 30% d’atteintes du haut appareil urinaire", a rappelé le Dr François Meyer, du service d’urologie de l’hôpital Saint-Louis (Paris), lors du Congrès français d’urologie.

Parmi les effets urinaires les plus fréquents, la pollakiurie, l’urgenturie, les douleurs sus-pubiennes, la nycturie et l’incontinence, voire, au niveau du haut appareil urinaire, l’insuffisance rénale⁽¹⁾. Principales victimes, des hommes jeunes "qui font usage de kétamine depuis au moins un an" avant l’apparition des troubles mictionnels, ajoute François Meyer.

Le sevrage, une nécessité absolue

Alors que la consommation de drogues est à la hausse selon l’OFDT, l’Association française d’urologie a publié en octobre de premières recommandations pour la prise en charge des cystites liées à la kétamine⁽²⁾. Première ligne de traitement : le sevrage. "Ce sont des patients difficiles à prendre en charge (…). Les symptômes peuvent être réversibles dans 50 à 85% des cas selon les séries, il est donc très important d’axer la prise en charge sur le sevrage. Car en cas de rechute, les symptômes reviennent très rapidement", explique François Meyer.

Autres drogues liées à des troubles mictionnels, les amphétamines et l’ecstasy (MDMA), que respectivement 4,3% et 8,2% des Français ont consommées dans leur vie. Ces substances engendrent une destruction des neurones dopaminergique qui, au-delà d’un risque accru de maladie de Parkinson, pourrait favoriser l’hyperactivité vésicale. À l’inverse, via leur action sur le système nerveux périphérique, elles ont été liées à des cas de rétention urinaire.

Produit le plus consommé en France, le cannabis pourrait, en revanche, avoir des effets bénéfiques, lorsqu’il est à visée médicale. Lors d’essais britanniques menés dans les années 2000, la prise orale d’extraits de cannabis a été associée, chez des patients atteints de sclérose en plaques, à une diminution des symptômes d’hyperactivité vésicale, telles que pollakiurie diurne et nycturie^(3,4).