Edulcorants et diabète de type 2 : alliés ou faux amis ?
Les édulcorants sont-ils à conseiller aux patients atteints d’un diabète de type 2 ? Si plusieurs études observationnelles suggèrent des risques sanitaires, ils constituent peut-être un moindre mal chez des personnes accros au sucre. Toutefois, l’eau constitue de loin la meilleure alternative.
En 2013, une étude française jetait un pavé dans la mare : la consommation de boissons "diet" serait liée à un risque accru de diabète de type 2 (1). Pire : à consommation égale, ces boissons édulcorées semblent même associées à un risque de diabète supérieur aux boissons sucrées, de +15% pour une consommation de 0,5 L/semaine, de +59% pour 1,5 L/semaine.
Comment expliquer ce résultat, alors que les boissons édulcorées visent justement à réduire les dégâts du sucre ? Dans un communiqué, l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) avançait que "la relation avec le diabète pourrait s’expliquer par une appétence plus forte pour le sucre en général, chez les consommatrices de ce type de boissons". Les boissons édulcorées serviraient donc de cache-misère à un régime par ailleurs riche en sucres.
Autre hypothèse, celle d’un effet direct : "l’aspartame, qui est un des principaux édulcorants utilisés aujourd’hui, induirait une augmentation de la glycémie et de ce fait une hausse du taux d’insuline, comparable à celle engendrée par le sucrose", expliquait l’Inserm.
Idem lorsque les édulcorants sont consommés sous forme de sucrettes (2). En 2017, une équipe française révélait que les femmes recourant "toujours ou presque" aux édulcorants avaient 33% plus de risques de développer un diabète de type 2 que celles en utilisant "peu ou jamais", après prise en compte de l’indice de masse corporelle (IMC). Chez les utilisatrices au long cours (plus de 10 ans), le risque de diabète était accru de 15%.
Diabétogène ou non ?
Au-delà de l’association statistique, les édulcorants sont-ils réellement diabétogènes, ou bien s’agit-il d’une simple corrélation ? Difficile de trancher. "Peut-être que les femmes qui consomment des édulcorants ont plus d’antécédents familiaux, sont plus sensibilisées au risque de diabète, ont plus peur de devenir diabétiques, ou sont plus souvent en surpoids", avance le Pr Fabrice Bonnet, diabétologue au CHU de Rennes.
Selon une étude qu’il a cosignée en 2018, les édulcorants semblent sans impact métabolique (3). Lors de cette étude randomisée contrôlée, 60 participants non diabétiques ont été répartis en deux groupes, l’un consommant deux cannettes par jour d’une boisson édulcorée (aspartame, acésulfame K), l’autre deux cannettes d’une boisson acalorique, non sucrée et non édulcorée. Au bout de 12 semaines, les groupes étaient inversés. Au terme de l’étude, aucune évolution significative n’était observée quant à la résistance à l’insuline ou à l’insulinosécrétion.
Depuis, d’autres résultats observationnels ont pourtant pointé de nouveaux risques liés aux édulcorants. En 2022, deux études françaises, menées sur plus de 100 000 participants de la cohorte NutriNetSanté, ont suggéré un risque cardiovasculaire accru chez ceux consommant des édulcorants, mais aussi de cancers tous types confondus, en particulier celui du sein et ceux liés à l’obésité (4) (5).
L’eau, supérieure aux boissons édulcorées
Quelle attitude les médecins doivent-ils adopter quant à ces additifs alimentaires ? Selon Fabrice Bonnet, "c’est au cas par cas. Chez des patients diabétiques, les édulcorants semblent avoir un effet neutre sur la glycémie. Si un patient me dit qu’il ne parvient pas arrêter les boissons sucrées, je vais lui demander s’il a essayé les équivalents édulcorés. Il s’agit donc plutôt d’une proposition par défaut, car les boissons édulcorées seront toujours moins nocives que celles à ‘plein sucre’. Mais il ne s’agit pas pour autant de les promouvoir auprès de nos patients."
D’autant que rien ne vaut l’eau, comme l’ont confirmé des travaux canadiens présentés fin juin au congrès de l’American Diabetes Association (ADA, 20-23 juin). Cette étude randomisée (6), parmi les rares à comparer les boissons édulcorées à l’eau, a évalué chez 81 femmes diabétiques en surpoids l’impact de l’une ou l’autre de ces stratégies, en complément d’un régime. A 18 mois, la perte de poids était plus prononcée dans le groupe ‘eau’, de -6,82 kg contre -4,85 kg dans le groupe ‘boissons édulcorées’.
De même, la consommation d’eau était associée à une évolution plus favorable de la glycémie, de l’insulinémie, de la sensibilité à l’insuline et de la triglycéridémie. Les résultats révèlent même un taux de rémission du diabète de 90% dans le groupe ‘eau’, contre seulement 45% dans le groupe ‘boissons édulcorées’. Des taux certes encourageants, mais "un peu astronomiques, à moins d’un diabète léger ou récent", tempère Fabrice Bonnet. Selon le diabétologue, "à la fin de l’étude, la différence n’est pas négligeable. C’est une évidence, mais il est bon de le rappeler : il n’y a rien de mieux que l’eau".
- Fagherazzi G et al., American Journal of Clinical Nutrition, 30 janvier 2013
- Fagherazzi G et al., Annals of Nutrition and Metabolism, 18 février 2017
- Bonnet F et al., Journal of Nutrition, 1er août 2018
- Debras C et al., British Medical Journal, 7 septembre 2022
- Debras C et al., PLoS Medicine, 24 mars 2022
- Farshchi et al. Diabetes 2025;74(Supplement_1):586-P.
Références :
D’après les propos du Pr Fabrice Bonnet (CHU de Rennes).
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