Variant Omicron : le Conseil scientifique fait le point sur les dernières données avant les fêtes

23/12/2021 Par Louise Claereboudt
Infectiologie
A la veille du réveillon de Noël, le Conseil scientifique a fait un point sur la situation sanitaire, "très évolutive" depuis l’apparition du variant Omicron il y a quelques semaines sur le territoire français. Malgré "un haut niveau d’incertitudes, un certain nombre de points commencent à se clarifier", a indiqué son président, le Pr Jean-François Delfraissy. Transmission, sévérité, traitements… le point sur l’état actuel des connaissances.
 

Le variant Omicron est "beaucoup plus transmissible" et "sera dominant en France dans les jours qui viennent", a prévenu le Pr Jean-François Delfraissy, président du Conseil scientifique, lors d’une conférence de presse organisée ce jeudi 23 décembre, à la veille du réveillon de Noël. Actuellement, le variant Omicron – détecté pour la première fois début novembre en Afrique du Sud – représente 10% des contaminations en France, a précisé le Pr Bruno Lina, virologiste à Lyon et membre du Conseil. Malgré "un haut niveau d’incertitudes, un certain nombre de points commencent à se clarifier", a indiqué son président, le Pr Jean-François Delfraissy. Le Pr Bruno Lina a évoqué de nouveaux éléments qui permettent de mieux comprendre le comportement de ce variant, qui présente "des évolutions génétiques très importantes par rapport aux autres virus qui circulaient jusqu’à présent". Son évolution n’a pas été "linéaire".  Il "n’est pas un descendant du virus Delta, Beta, ou Gamma. Le processus évolutif a pris beaucoup de temps", a-t-il expliqué. Il présente par ailleurs "plus de 10 mutations qui surviennent dans la région de la protéine Spike. Le maximum que l’on avait vu jusqu’à présent était de 3 mutations." Sur le plan biologique, Omicron a "un potentiel de transmission par voie aérienne augmenté","très certainement" à ces mutations qui permettent au virus "d’être plus facilement transmissible par de simples aérosols", a précisé le Pr Lina. Il semblerait par ailleurs qu’il "infecte un peu plus facilement les voies aériennes supérieures et un peu moins facilement les voies aériennes inférieures". En revanche, il n’y a "pas de différence en quantité de virus produit par les personnes".

Point rassurant toutefois évoqué par le Conseil scientifique, les outils de diagnostic restent performants, y compris les tests antigéniques. "Il a fallu adapter notre système de criblage pour avoir des réponses rapides en termes de circulation du virus. Cette nouvelle stratégie de criblage a été mise en place en début de semaine et permet d’avoir une détection spécifique de ce variant avec la position D sur SI-DEP et la mutation en 417", a indiqué le Pr Lina.   Qu’en est-il de la circulation en France ? Apparu progressivement en France à partir de la fin du mois de novembre, le variant circule aujourd’hui de façon "hétérogène". Il est très présent dans certaines régions, comme en Ile-de-France – où "des éléments laissent penser qu’il y est déjà majoritaire", selon le Pr Arnaud Fontanet. "Et il le deviendra sur l’ensemble du territoire d’ici la fin de l’année", a ajouté l’épidémiologiste, qui rapporte des taux d’incidence record, "qu’on n’a jamais connus depuis mars 2020", avec 84.000 cas pour la journée d'hier. "La progression la plus importante se trouve en Ile-de-France avec dans la tranche d’âge des 20-29 ans, 1.000 cas pour 100.000 habitants." "On s’attend à ce qu’on ait des centaines de milliers de cas par jour au mois de janvier sur le territoire français", a déclaré le Pr Fontanet. En Afrique du Sud, dans la province de Gauteng où il est apparu, "on pense aujourd’hui que le pic épidémique a été atteint et qu’on est déjà sur une redescente, ce qui est un élément un peu surprenant […] L’épidémie a été de courte durée, a-t-il ajouté, précisant que le contexte y était néanmoins très différent. En Europe, c’est à Londres que le variant Omicron circule de la façon la plus active. Il y est apparu début décembre et le 11, "il représentait 50% des séquences, et 85% le 14 décembre", note le Pr Fontanet, témoignant de la vitesse de propagation du variant, qui, là-aussi, a été la plus rapide chez les 20-29 ans.   Quel impact sur les hospitalisations ? L’impact sur l’hôpital est encore difficile à évaluer en France, mais note le Pr Fontanet, à Londres, "les hospitalisations ont doublé entre fin novembre et mi-décembre, passant de 100 par jour à 200 par jour". Quelques études sur la sévérité...

relative du variant Omicron par rapport au variant Delta ont par ailleurs été récemment publiées. Une première venant d’Afrique du Sud où les chercheurs "estiment qu’il y a une diminution de 80% du risque d’hospitalisation chez des personnes infectées avec le variant Omicron par rapport à Delta". En Ecosse, où seulement 15 personnes contaminées par Omicron ont été hospitalisées, "la diminution du risque d’hospitalisation pour une personne infectée avec le variant Omicron par rapport à Delta est de 68%". Au Royaume-Uni,les nouvelles sont un peu moins bonnes", indique l’épidémiologiste. Selon une étude de l’Imperial College au Royaume-Uni, la réduction de sévérité du variant Omicron par rapport à Delta ne serait que de 35%. Le Pr Fontanet a noté de fait la persistance d’incertitudes. "Lorsque l’on discute avec des confrères [d’Afrique du Sud ou du Royaume-Uni], ils nous disent que les patients sont moins souvent hospitalisés, que la durée des séjours est moins importante, qu’ils ont moins souvent besoin d’oxygène et moins souvent besoin d'être transférés en réanimation", a complété le Pr Yazdan Yazdanpanah. Ce variant apparaît "moins sévère, mais à quel point ? On ne le sait pas encore précisément." Même si la sévérité semble "moins grande que ce qu’on l’avait imaginé", le président du Conseil scientifique s’inquiète d’une "possible désorganisation sociétale dès début janvier quand on va avoir de très nombreuses contaminations à Omicron, dont la majorité sera asymptomatique ou paucisymptomatique" mais provoquant un important absentéisme. Et il faut s’attendre à ce que l’on fonctionne "dans un mode dégradé". Une désorganisation liée aux règles d’éviction – actuellement jusqu’à 17 jours – ajoute le Dr Olivier Guérin, médecin gériatre au CHU de Nice et membre du Conseil scientifique. Tous les secteurs pourraient être touchés au regard de la diffusion fulgurante du variant : la sécurité, l’énergie, les transports, les communications et la santé. "Cela nécessite de réfléchir à ces règles d’éviction." Selon lui, les soignants pourraient se retrouver davantage face à des "difficultés structurelles" pour gérer les patients. D’autant que, s’il semble moins sévère, la diffusion rapide du variant Omicron pourrait tout de même provoquer un afflux dans les établissements de santé.

Comment enrayer cette 5e vague ? Quels traitements ? Face à cette menace, le Conseil scientifique a appelé à accélérer la campagne de rappel. "Actuellement plus de 3 millions de personnes de plus de 65 ans n’ont pas encore eu leur dose de rappel", a regretté le Dr Guérin. Selon le Pr Yazdan Yazdanpanah, à Londres, "aucune personne vaccinée à trois doses n’est hospitalisée", le rappel est donc "l’arme principale". "La vaccination est un atout majeur", a ajouté le Pr Lina, qui a insisté sur l’importance "d’avoir 3 administrations vaccinales" pour réduire "le risque de faire une forme grave". Néanmoins...

 a-t-il nuancé, "la vaccination n’est pas stérilisante", elle n’empêche pas l’infection et la transmission, ainsi il est indispensable de "maintenir les mesures barrières et d’hygiène en présence de personnes fragiles ou non vaccinées". Du côté des traitements, "pour l’instant, nous n’avons que les anticorps monoclonaux", indique le Pr Yazdanpanah, mais "on se pose la question de la sensibilité d’Omicron à ces anticorps". Avec le variant Omicron, le Ronapreve de Roche-Regeneron "deviendrait résistant et bientôt on ne pourra plus l’utiliser", a-t-il déploré. "Pour le traitement prophylactique, il semblerait que les molécules d’AstraZeneca [L'Evusheld] resteraient partiellement efficaces et pourraient être utilisées." Ce traitement peut être utilisé contre les formes graves chez les patients immunodéprimés par exemple. Le sotrovimab, anticorps monoclonal de GSK qui devrait arriver en France mi-janvier, pourrait être utilisé "dans les formes curatives", selon l’infectiologue. Un autre traitement qui "devrait être également efficace" contre Omicron, mais qui n’est pas encore disponible (il devrait arriver "en février"), est celui de Pfizer : le Paxlovid – un antiviral oral qui doit être donné précocement aux patients.  

Faut-il octroyer plus d'autonomie aux infirmières ?

Angélique  Zecchi-Cabanes

Angélique Zecchi-Cabanes

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