Avis négatifs sur Google : médecins, quels sont vos droits ?
Dans quelle mesure un médecin peut-il répondre aux avis rédigés sur sa fiche Google My Business tout en respectant le secret médical ? On fait le point.
La réputation d’un professionnel de santé passe par le "bouche à oreille", mais également par la réputation digitale. Celle-ci est notamment véhiculée par les avis rédigés par les patients. Or, les avis sont par nature subjectifs. Les commentaires négatifs, qu’ils soient fondés ou non, traduisent une expérience vécue par le patient, qui peut parfois refléter de façon imparfaite la réalité des faits.
Contrairement aux idées reçues, le médecin a la possibilité de réagir aux avis, sous réserve de respecter ses règles déontologiques et de ne pas porter atteinte au secret médical.
Dans quelle mesure le médecin peut-il répondre aux avis rédigés sur sa fiche Google My Business tout en respectant le secret médical ?
Que recouvre le secret médical auquel un professionnel de santé est tenu ?
Les articles L1110-4, I. et R4127-4 du code de la santé publique énoncent que le secret médical couvre "l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel" dans l’exercice de sa profession, "c'est-à-dire non seulement ce qui lui a été confié, mais aussi ce qu'il a vu, entendu ou compris".
Le respect du secret médical consiste à ne pas divulguer à des tiers des informations concernant l’identité et l’état de santé de son patient, ainsi que ce qui a été vu et entendu lors d’une consultation.
Dès lors, il convient de réagir avec discernement lorsque le médecin souhaite répondre au patient qui lui laisse un avis.
Comment réagir à un avis négatif sur sa fiche Google My Business ?
Que l’avis laissé par le patient soit rédigé de façon anonyme, sous un pseudonyme ou sous le nom véritable de la personne, le professionnel de santé s’expose au risque de violation du secret médical s’il confirme ou relate le déroulement d’une consultation, et ce, même si le patient tient le récit de la consultation.
En effet, l’usage d’un pseudonyme n’empêche pas de pouvoir ré-identifier le patient à l’aide des détails relatés dans son avis, ou encore après une démarche juridique permettant de révéler son identité véritable.
De la même façon, un avis rédigé de façon anonyme est susceptible, sur la base des circonstances de fait relatés, de ré-identifier le patient, ou après une démarche juridique permettant de révéler son identité.
Dans tous les cas, si le patient qui s’exprime par un avis sur votre page Google My Business fait usage de sa liberté d’expression, en tant que médecin, vous disposez aussi de votre propre liberté d’expression, laquelle est limitée par le respect du secret médical.
Des réponses objectives, qui ne reviennent pas sur le contenu de la consultation, peuvent permettre de rétablir la réalité des faits, et ainsi contribuer à préserver votre réputation.
Par exemple, en cas d’invective liée à un prétendu diagnostic erroné, le professionnel de santé peut réagir en prenant de la hauteur de vue : invoquer le fait que le diagnostic de telle maladie nécessite des analyses médicales plus approfondies et que le commentaire n’est de fait pas fondé.
Bien que la libre expression des patients – comme celle des médecins - est garantie et constitue un droit fondamental, il reste que cette liberté d’expression est réprimée en cas d’abus.
Qu’est-ce qu’un avis abusif, injurieux, diffamant ou dénigrant ?
Un avis est abusif lorsqu'il outrepasse la liberté d’expression. A ce titre, sont réprimés :
L'injure (article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) : elle consiste en une expression outrageante, termes de mépris ou invective qui ne vise aucun fait précis (par exemple : une insulte) ;
La diffamation (article 29 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse) : il s'agit de l'allégation d’un fait précis qui porte atteinte à l'honneur ou à la considération de la personne visée ;
Le dénigrement (article 1240 du Code civil) : cela consiste à jeter le discrédit sur les prestations d’une personne, ce dont il résulte un préjudice pour celle-ci (telle qu’une perte de patientèle).
Il convient ainsi de distinguer les propos qui constituent des opinions, appréciations personnelles et jugements de valeur (avis licites), de ceux qui outrepassent les limites de la liberté d’expression (avis illicites).
Dans tous les cas, seul un texte de loi peut fonder et donc permettre de demander le retrait d’un avis jugé illicite.
L’injure ou la diffamation envers un particulier est sanctionnée par une amende de 12 000 euros (avec des peines plus élevées en cas de racisme ou de discrimination notamment).
Il est recommandé de prendre conseil auprès de votre avocat afin d’étudier quelle qualification juridique est applicable aux propos concernés et quelles démarches appropriées mener. En effet, en cas d’injure ou de diffamation, le délai pour pouvoir agir en justice est court (3 mois à partir de la publication). Passé ce délai, aucune action judiciaire menée devant les tribunaux n’est recevable.
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