Proposition

Pour sauver la liberté d'installation des médecins, l'Ordre, les doyens et les étudiants proposent un "assistanat territorial"

Alors que la menace de la régulation à l'installation des médecins n'a jamais été aussi forte, l'Ordre, les doyens des facultés de médecine et les organisations étudiantes proposent une alternative. Ils suggèrent de créer un statut d'assistant territorial, qui serait le pendant de l'assistant des hôpitaux, et permettrait d'apporter une solution aux zones où l'accès aux soins est catastrophique.  

09/01/2025 Par Louise Claereboudt
Déserts médicaux
Proposition

Face à la menace, ils ont décidé d'être force de proposition. Le Conseil national de l'Ordre des médecins (Cnom), la Conférence des doyens des facultés de médecine, l'Intersyndicale nationale des internes (Isni) ainsi que l'Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) avancent conjointement une solution pour un meilleur accès aux soins.

Alors que les propositions de loi visant à réguler l'installation des médecins se font de plus en plus nombreuses et font de plus en plus consensus à l'Assemblée nationale – la PPL Garot a déjà obtenu plus de 230 signatures de députés –, les principaux concernés viennent de faire une contreproposition : créer un nouveau statut permettant de repeupler les territoires sous-dotés en médecins.  

Nommé assistanat territorial, ce statut s'adresserait aux jeunes médecins qui viennent de terminer leur cursus (thèse et diplôme de DES validés). Il durerait "une ou deux années", précisent le Cnom, les doyens, l'Isni et l'Anemf dans un communiqué commun, diffusé ce jeudi 9 janvier. Au lieu d'aller faire des remplacements – comme c'est majoritairement le cas pour les jeunes diplômés -, ils s'engageraient à exercer dans un territoire fixe. 

Cet assistanat "doit concerner la grande majorité des disciplines médicales car les difficultés d'accès aux soins ne concernent pas que la médecine générale", peut-on lire dans le communiqué. 

 

Vers un plus grand accès au secteur 2 ?  

En contrepartie, ces jeunes assistants territoriaux bénéficieraient d'un accompagnement renforcé pour eux et leur famille (en ce qui concerne le logement, le transport, l'aide à l'installation…), du contrat de début d'exercice, mais aussi de droits comparables à ceux des assistants des hôpitaux, et ce "dès la fin de la première année effectuée". Une forme de "contrat gagnant-gagnant", en somme.

Le statut d'assistant des hôpitaux "a plusieurs avantages", observe le président de l'Anemf, Lucas Poittevin, joint par Egora. "Ça peut permettre [au diplômé] de pouvoir avoir une meilleure rémunération lorsqu'il s'installera ensuite [notamment un accès au secteur 2, NDLR], de se perfectionner dans sa pratique, mais aussi de basculer vers une carrière de recherche." Ce que l'Ordre, les doyens et les organisations étudiantes souhaitent donc, c'est "transposer ce principe" en créant l'assistanat territorial. 

Cela signifierait-il ouvrir plus largement le secteur 2 ? Et notamment aux médecins généralistes ? La question n'est pas tranchée, répond Lucas Poittevin. "L'idée serait d'avoir des droits comparables aux assistants hospitaliers. Est-ce que ce serait plutôt un secteur 2, un secteur 2 avec Optam, sous quelles conditions exactes… ? C'est encore à déterminer et à éclaircir."

Les modalités de ce statut, qui a fait son chemin ces dernières semaines et qui vise à répondre "à certaines propositions [parlementaires] que l'on ne jugeait pas forcément bonnes pour le système de santé", restent en effet à préciser, ajoute le président de l'Anemf. Notamment sur les zones concernées par l'ouverture de postes d'assistants territoriaux. 

 

"D'autres voies que la coercition existent"

"L'ARS pourrait ouvrir des postes d'assistants territoriaux dans certains territoires", en cabinet de ville "ou dans des centres hospitaliers périphériques" pour les spécialités "qui ne s'exercent pas en ville", suggère Lucas Poittevin. "La réalisation de cet assistanat en milieu hospitalier sous-dense (CHG) leur donnerait la possibilité d’entrer dans la carrière de praticien hospitalier (PH), avec un échelon supérieur à ceux ne l’ayant pas fait (troisième échelon pour la première année et quatrième échelon pour la deuxième année)", précise le communiqué.

La proposition – qui se veut innovante et pourrait être mise en œuvre rapidement – a été transmise au nouveau ministre chargé de la Santé, Yannick Neuder, "et à l'ensemble des acteurs politiques et du système de santé". Objectif : "y trouver un écho et avancer sur cette proposition" en montrant que "d'autres voies [que la coercition, NDLR] existent", explique le président de l'Anemf. En l'occurrence, "des solutions plus conformes à la fois aux attentes des jeunes médecins et plus utiles pour les patients".

Car "l'avantage de cet assistanat territorial, c'est que ça n'offre pas une régulation complète de l'installation des médecins et donc cela éviterait que certains territoires qui sont un peu mieux dotés [sans être pour autant surdotés] se voient privés de l'installation" de praticiens, justifie l'étudiant. Le zonage devra "prioriser les territoires les plus en difficulté à l'heure actuelle". "On pourra avoir une offre qui soit modulée tous les ans avec une adaptation de l'ouverture des postes." 

En outre, justifient l'Ordre, les doyens et les organisations étudiantes, cet assistanat territorial pourrait participer à créer un vivier de maitres de stages universitaires (MSU), ô combien nécessaire en vue de la mise en place de la 4e année d'internat de médecine générale. "Ce sont actuellement généralement les étudiants qui passent par un assistanat hospitalier qui vont se tourner vers la maîtrise de stage", observe Lucas Poittevin. "On pourrait aussi inclure dans cette maquette d'assistanat territorial la possibilité de dispenser la formation de maître de stage directement pour que les médecins puissent y avoir accès et accueillir des étudiants en stage", conclut le président de l'Anemf.

Soutenez-vous la proposition d'un "assistanat territorial", ouvrant l'accès au secteur 2?

Jerry Tulassan

Jerry Tulassan

Oui

Secteur 2 pour tous. Le tarif universel national unique est économiquement une hérésie et sources de tous les maux. Nos cabine... Lire plus

4 débatteurs en ligne4 en ligne
Photo de profil de A Rilgt
725 points
Débatteur Renommé
Autre spécialité médicale
il y a 14 jours
Proposition salutaire si elle peut nous éviter la coercition pure et simple. Mes craintes cependant : en quelques années tous les jeunes médecins ont le secteur 2....donc quelques années plus tard un
Photo de profil de Jean Scheffer
52 points
il y a 14 jours
Cette proposition rejoint seulement en partie mon « Clinicat-Assistanat pour tous ». En effet il n’est pas clairement exprimé que c’est une obligation pour tous les futurs généralistes et po
Photo de profil de Laurent Seguin
1,3 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 14 jours
Chez les promoteurs de ce projet de loi debile (parceque forcément contre-productif à terme), combien ont de enfants auxquels ils conseillent de faire Médecine. Qui plus est Générale. Qui plus est ”De
 
Vignette
Vignette

La sélection de la rédaction

Négociations conventionnelles : 2025, l'année des maisons de santé et des CPTS?
01/01/2025
2
Externat
Partis étudier la médecine en Roumanie, deux internes racontent leur retour en France : "On ne nous facilite...
14/01/2025
30
La Revue du Praticien
Diabétologie
HbA1c : attention aux pièges !
06/12/2024
2
Podcast Médecine légale
"J'ai été projeté dans ce monde macabre" : l'affaire Troadec racontée par le médecin légiste
03/12/2024
0
Enquête Hôpital
Pourquoi le statut de PU-PH ne fait plus rêver les médecins
14/11/2024
9
Concours pluripro
CPTS
Les CPTS, un "échec" à 1,5 milliard d'euros, calcule un syndicat de médecins dans un rapport à charge
27/11/2024
14