Pénurie de médicaments : l’ANSM inflige plus de 8 millions d’euros d’amende à 11 labos
Onze laboratoires ont été sanctionnés, depuis le mois d’août, par l’ANSM pour ne pas avoir respecté leur obligation de constituer un stock de sécurité de quatre mois pour plusieurs médicaments d’intérêt thérapeutique majeur.
Le montant de l’amende infligée est historique. L’ANSM a annoncé ce mardi 24 septembre avoir prononcé, depuis le mois d’août, des sanctions financières à l’encontre de 11 laboratoires pharmaceutiques n’ayant pas respecté leur obligation de constituer un stock de sécurité de quatre mois pour des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur (MIT), pour un montant total de 8 millions d’euros.
L’an dernier, l’ANSM avait pris six sanctions financières pour un montant de 560 000 euros, pour des manquements similaires.
L’agence, dont les pouvoirs de sanction ont été renforcés par la loi pour faire face aux pénuries croissantes, a lancé en avril 2023 une campagne de contrôle des stocks de sécurité des médicaments d’intérêt thérapeutique majeur soumis à ce seuil de quatre mois de stock, c’est-à-dire ceux ayant fait l’objet de ruptures ou de risques de ruptures réguliers au cours des deux dernières années. Pour les autres MIT, ce seuil est de deux mois.
748 médicaments sont désormais concernés par ce stock de sécurité de 4 mois, contre 422 en 2021. L’ANSM, qui révise cette liste chaque année, a dû gérer, en 2023, "près de 5000 signalements de ruptures de stock et de risque de ruptures, soit un tiers de plus qu’en 2022 et six fois plus qu’en 2018", indique-t-elle dans un communiqué. Une situation "particulièrement alarmante", a souligné son directeur général par intérim, Alexandre de La Volpilière, au micro de France info.
Le contrôle qu’elle a initié en avril 2023 "a porté sur 422 MIT", précise l’agence. Après vérifications, l’agence a mené des échanges avec les labos soumis à cette obligation de constitution d’un stock de quatre mois dans le cadre d’une procédure contradictoire, à l’issue de laquelle 11 d’entre eux ont été sanctionnés. Parmi eux, Sandoz, Viatris ou encore le leader des génériques Biogaran, qui s’est vu infliger la plus grosse sanction.
La sanction concerne plusieurs spécialités de Biogaran : Irbesartan/Hydrochlorothiazide Biogaran 150 mg et 300 mg/12,5 mg et 300 mg/25 mg, indiqué dans le traitement de l'hypertension artérielle ; Irbesartan BGR 150 mg, 300 mg et 75 mg ; ainsi que Sertraline Biogaran 50 mg, une gélule indiquée dans le traitement d'épisodes dépressifs majeurs, peut-on lire dans la décision. Montant total des sanctions : plus de 4,5 millions d’euros.
Au total, une trentaine de références sont concernées et couvrent un large spectre thérapeutique. "Les manquements identifiés concernent par exemple les anti-hypertenseurs, des anti-cancéreux, des anti-microbiens, des médicaments en neurologie...", a expliqué à l'AFP Alexandre de la Volpilière. "Aucune classe n'est malheureusement épargnée par ce phénomène." Et d’ajouter que "les plus grosses sanctions concernent des médicaments génériques, ce qui correspond aux principales ruptures d'approvisionnement qu'on a pu constater ces dernières années".
"Le prononcé de telles sanctions et la montée en puissance de la sévérité de leur appréciation ne peuvent constituer une solution pérenne aux problématiques des ruptures de stocks et sont au contraire de nature à amplifier les déséquilibres structurels du marché des médicaments génériques", a réagi Biogaran auprès de l’AFP. " Les impacts financiers de ces mesures renouvelées dans le temps risquent à terme d'obérer la situation financière des entreprises fabricant des médicaments", a-t-il ajouté, déplorant une "ligne de conduite très dure des autorités".
Le laboratoire soutient, en outre, avoir été en mesure d’assurer l’approvisionnement continu du marché. "Il ne paraît pas pertinent de considérer qu'un stock de sécurité doive être maintenu coûte que coûte", estime le leader des génériques. "Le stock de sécurité a vocation, comme son nom le laisse entendre, à pallier certaines situations de tensions telles que des pics de pathologies, des ruptures de stocks de certains autres acteurs du marché ou autre."
[avec AFP et France info]
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