operation

"Tous les blocs opératoires de France seront touchés" : les chirurgiens promettent un mouvement "massif" en janvier

Anesthésistes, gynécologues, urologues, chirurgiens digestifs ou orthopédiques… Ils seraient déjà 1700 à s'être inscrits pour participer à "l'opération Bruxelles" organisée par le Bloc pour défendre la médecine libérale et le dialogue conventionnel, malmenés par le PLFSS. Un "exil" qui aura un fort "retentissement" sur les urgences et le fonctionnement des blocs opératoires, préviennent-ils. A partir du 15 janvier, "l'hôpital public ne pourra pas faire face", ont alerté les leaders syndicaux, appelant à un sursaut politique. 

27/11/2025 Par Aveline Marques
Spécialistes PLFSS 2026
operation

J-49 avant l'"exil" des chirurgiens français à Bruxelles. "Chaque jour", ils seraient une trentaine à s'inscrire sur la plateforme mise en place par le syndicat Le Bloc. Et le mouvement "s'intensifie", a assuré le Dr Philippe Cuq, son président, lors d'une conférence de presse organisée ce jeudi matin. "On est aujourd'hui à près de 1700." Ils seraient ainsi plus de 420 en Auvergne Rhône-Alpes, 270 en Ile-de-France et 256 en Occitanie à être prêts à plier bagage le 15 janvier pour rejoindre, en bus, la capitale belge, où "3000 chambres" ont été réservées par le syndicat. Feront-elles le plein ? "On va voir, on fera le point le 18 décembre", nous promet-on.

Ce mouvement est "historique", insiste Philippe Cuq : "Il y a quelques années, 'l'opération Londres' n'avait concerné que les chirurgiens, là c'est une opération qui concerne tous les spécialistes du bloc opératoire." Y compris les anesthésistes et les gynécologues, donc, qui sont tout aussi mobilisés, ont appuyé les Drs Loïc Kerdiles, président de l'Association des anesthésistes libéraux (AAL), et Bertrand de Rochambeau, président du Syndicat national des gynécologues obstétriciens de France (Syngof). "On sent une colère qui monte tous les jours, elle est très palpable sur le terrain", rapporte Loïc Kerdiles. "Les médecins libéraux ressentent une véritable injustice face à un budget de la Sécu qui est insincère et punitif pour leur activité, mais aussi pour les patients, dénonce l'anesthésiste. Les praticiens de secteur 2 sont accusés à tort d'une baisse du pouvoir d'achat des patients et d'un renoncement aux soins pour des raisons économiques. Ils sont devenus des rentiers aux yeux des politiques et de l'Assurance maladie." Le spécialiste prévient : "Le mouvement de janvier sera à la hauteur de toutes ces injustices", il sera "très fort".

70% de la chirurgie à l'arrêt

Désormais soutenus par l'ensemble des syndicats de médecins libéraux, qui appellent à fermer les cabinets à partir du 5 janvier, les spécialistes du Bloc sont déterminés à rendre leur mobilisation "visible, crédible". "Ce n'est pas un mouvement virtuel comme certains mouvements dans le passé où les médecins étaient en grève, et en fait personne n'était en grève", lance Philippe Cuq. "Tous les blocs opératoires de France seront touchés, il n'y aura pas un établissement sans participation à ce mouvement", prévient-il. "Il y a plein de confrères qui participeront, qui arrêteront, qui fermeront leur cabinet, qui déprogrammeront les patients mais qui ne participeront pas à l'opération Bruxelles pour des raisons x ou y", ajoute le leader syndical. Le Dr Didier Legeais, président du Syndicat national des chirurgiens urologues français (SNCUF), évoque "2000 à 3000" spécialistes. "20% des libéraux qui s'arrêtent, c'est 70% de la chirurgie qui est en danger d'être à l'arrêt", souligne-t-il, précisant que "40%" des chirurgiens urologues vont participer au mouvement. "L'hôpital public ne pourra pas faire face", prévient-il. 

"Malheureusement, il y aura un retentissement extrêmement sévère pour les patients à partir du 15 janvier, appuie le Dr Antoine Soprani, président du Syndicat national des chirurgiens viscéraux et digestifs (SNCVD). Plus de prises en charge en urgence pour les patients qui auront des complications de leurs opérations ou les urgences chirurgicales type appendicites, cholécystectomies dans le privé, avec un hôpital public qui sera submergé." Sans compter le "million" de consultations qui seront déprogrammées, calcule Didier Legeais. "C'est une illusion de dire 'on va réquisitionner, il se passera rien'. Ne croyez pas ça, lance l'urologue. Les réquisitions permettront juste de maintenir l'urgence vitale, ça ne permettra pas la prise en charge de la cancérologie, de toutes les pathologies fonctionnelles, digestives et vasculaires." "70% de la chirurgie orthopédique est faite dans le privé, l'activité libérale est indispensable pour le soin et pour la formation des jeunes internes", signale en outre le Dr Jean-Charles Le Huec, président du Syndicat national des chirurgiens orthopédistes (SNCO). Dans le sud-ouest, souligne-t-il, "si les services d'urgence ne fonctionnent plus, effectivement il y a une mise en danger des patients, mais elle est venue du pouvoir politique, il faut absolument qu'il y ait une prise de conscience", lance-t-il.

Notre consultation, elle est à 22 euros depuis 1992

Alors que l'examen du PLFSS se poursuit avec une deuxième lecture à l'Assemblée nationale, le retrait annoncé de l'article 26, qui instaurait une surcotisation des dépassements d'honoraires, ne suffit pas à apaiser la colère de la profession. A l'instar de l'ensemble des syndicats représentatifs des médecins libéraux, Philippe Cuq considère que le texte "détruit la relation conventionnelle avec l'Assurance maladie et les organismes complémentaires", notamment en permettant des baisses de tarifs de façon unilatérale, et pénalise l'ensemble des libéraux, qu'ils soient en secteur 1, 2 ou 3.

Les chirurgiens ne reculeront que si la ministre "enlève tous ces articles toxiques sur l'exercice libéral et qu'elle envoie une lettre de cadrage à l'Assurance maladie pour rouvrir des négociations conventionnelles", lance le président du Bloc. Au centre des revendications, la préservation de la liberté tarifaire et du secteur 2, et la revalorisation des tarifs de la CCAM. "Notre consultation, elle est à 22 euros depuis 1992, rappelle Didier Legeais. Ça fait donc 30 ans que l'Assurance maladie a été incapable d'augmenter nos tarifs, ça fait donc 30 ans que nos entreprises libérales maintiennent leur activité grâce à une certaine liberté tarifaire."

Notre spécialité est dévastée depuis des années

Enjeu : préserver, voire restaurer, l'attractivité de l'exercice. "Notre spécialité est dévastée depuis déjà depuis plusieurs années, les choix à l'internat ont fortement diminué, il y a de moins en moins de chirurgiens digestifs en France", alerte Antoine Soprani, du SNCVD. La spécialité, "extrêmement complexe avec des actes en urgence, des reprises chirurgicales la nuit et donc une haute pénibilité", est en plus de cela "très mal rémunérée, avec une non revalorisation de nos actes depuis plus de 20 ans", souligne-t-il. Et de rappeler que "tout geste réalisé en urgence par n'importe quel chirurgien en France est pris au tarif opposable. Nous ne prenons jamais de dépassements d'honoraires. Or, l'urgence est une part extrêmement importante de notre activité, en particulier de la chirurgie digestive", insiste-t-il. "L'encadrement du secteur 2 va encore aggraver les choses avec probablement une disparition complète des vocations : plus aucun jeune ne voudra faire de la chirurgie viscérale et digestive."

Pour Bertrand de Rochambeau, du Syngof, c'est la "survie" des maternités qui se joue. "S'il y a un grand coup sur le secteur 2, cela va hâter leur disparition : il n'y aura plus d'obstétriciens pour travailler dans ces conditions financières", pointe-t-il, rappelant que les libéraux prennent en charge 18 % des naissances. La balle est désormais dans le camp du Gouvernement. 

Comptez vous fermer vos cabinets entre le 5 et le 15 janvier?

Claire FAUCHERY

Claire FAUCHERY

Oui

Oui et il nous faut un mouvement fort, restons unis pour l'avenir de la profession, le devenir des plus jeunes qui ne s'installero... Lire plus

4 débatteurs en ligne4 en ligne
Photo de profil de Hélène  Wargnier
195 points
Incontournable
Radiodiagnostic et imagerie médicale
il y a 16 jours
La chirurgie digestive est une spécialité très lourde dont les actes n ont pas ete réévalués depuis longtemps L investissement personnel de ces spécialistes est majeur la durée de certaines interventions ou il faut mouillier sa chemise ,l inquiétude après des interventions délicates le suivi post op , les éventuelles reprises avec scanner post op jour où nuit et l aide des radiologues.. Ces métiers doivent etre rénumerer à un juste niveau cette chirurgie vitale doit être comparée à la chirurgie esthétique bcp plus lucrative Duodenopancreactectomie céphalique l œsophagectomie gastrectomie totale la colectomie totale La chirurgie du foie etc. Tous ces actes durent des heures et sont extrêmement exigeants Radiologue, j ai cotoye et travaillé avec les chirurgiens digestifs des hopitaux publics ou des cliniques privees Ce n est pas une sinécure ! Je soutiens les chirurgiens digestifs dans leur revendications
Photo de profil de JEAN PY
190 points
Médecine générale
il y a 16 jours
20à 30 ans de non-revalorisation permettent de faire porter la responsabilité du secteur 2 sur le dos des praticiens qui ne doivent donc plus tolérer ce fait dit "dialogue" et pire "gagnants-gagnants" par des administratifs incompétents, insouciants des horaires volontaire de toubibs consciencieux, et de plus en ayant des salaires régulièrement révisés ; cela mérite sinon des mesures appropriées pour les praticiens de bloc et pour les radiologues, biologistes et traitants , du moins des dialogues RESPECTUEUX corrects et en face-à face, sans diktat du fond d'un bureau !
Photo de profil de OLIVIER PERRIN
2,9 k points
Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 17 jours
Notre intérêt à tous est de ramer dans le même sens si on veut garder le bateau à flot…
 
Vignette
Vignette

La sélection de la rédaction

Pédiatrie
Moins de médecins, moins de moyens, mais toujours plus de besoins : le cri d'alerte des professionnels de la...
06/11/2025
14
Concours pluripro
CPTS
Les CPTS renommées "communauté France santé" : Stéphanie Rist explique l'enjeu
07/11/2025
13
Podcast Histoire
"Elle était disposée à marcher sur le corps de ceux qui auraient voulu lui barrer la route" : le combat de la...
20/10/2025
0
Portrait Portrait
"La médecine, ça a été mon étoile du berger" : violentée par son père, la Pre Céline Gréco se bat pour les...
03/10/2025
6
Reportage Hôpital
"A l'hôpital, on n'a plus de lieux fédérateurs" : à Paris, une soirée pour renouer avec l'esprit de la salle...
14/10/2025
8
La Revue du Praticien
Diabétologie
HbA1c : attention aux pièges !
06/12/2024
2