"Si tu écoutes le patient, il te donnera le diagnostic" : ce couple de médecins qui m'a tout transmis
Premier stage en médecine générale dans un village à la frontière du Rhône et de l’Ain. Pendant plusieurs semaines, un externe découvre bien plus que des gestes techniques : une manière d’exercer, d’écouter, de transmettre. Un témoignage de lecteur recueilli dans le cadre de notre série d'été : "Le jour où j'ai été fier d'être médecin".
"Il y a 11 ans, je fais mon premier stage d’externe en médecine générale dans un cabinet tenu par un couple de médecins, dans un village à la frontière Rhône-Ain. Lui est spécialisé dans les troubles musculosquelettiques et l’adulte ; elle, plutôt dans la pédiatrie et la gynécologie.
Nous prenons le café au bistrot à 6h45 avant d’ouvrir le cabinet. Les routiers et les travailleurs matinaux saluent d’un signe de tête le médecin.
— Tu fumes ? Non ? Tu as raison c’est mauvais pour la santé, me dit le praticien avant d’embaucher.
Le cabinet ouvre tôt pour accueillir les patients qui consultent avant le travail et ferme tard pour ceux qui ne peuvent venir qu’après le travail. Le couple se relaie pour assurer une permanence de soins.
— Tu peux partir si tu veux, me disent-ils à 18h.
Je reste, pas question de partir avant eux. Pour éviter de rentrer tard en ville, ils m’ont proposé une chambre chez eux.
Ils m’apprennent à examiner un patient de haut en bas, à l’interroger, l’écouter.
— Si tu écoutes, le patient te donnera le diagnostic.
Certains patients ont du mal à payer.
— Pouvez-vous encaisser le chèque après le premier du mois prochain docteur ?
— Ne vous en faites pas, vous me réglerez quand vous pourrez madame.
Apprends à connaître tes propres limites et à ne jamais les franchir
J’apprends une panoplie de gestes : suture, examen gynécologique, plâtre… Ils me font confiance malgré ma jeunesse, j’essaie de garder les mains fermes. Les urgences sont pleines alors il faut faire de notre mieux.
Un petit chien dort dans le bureau de la généraliste.
— Ça détend les enfants, me dit-elle, amusée, sauf quand ils sont allergiques !
Les journées sont longues et épuisantes, les patients nombreux et fragiles.
— Un collègue est décédé au volant en rentrant d’un déplacement à domicile de nuit sur une garde, apprends à connaître tes propres limites et à ne jamais les franchir.
Ils prennent des vacances à tour de rôle ou en prenant soin de se faire remplacer. Ils discutent avec les représentants de laboratoire.
— Il ne faut pas les mépriser, eux aussi ils ont des bouches à nourrir
Ils continuent à se former la cinquantaine passée.
Pour la première fois, après quatre années d’études et hors du CHU, j’étais fier de faire partie de cette grande tradition médicale."
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