ORL

Nodules thyroïdiens, infections pédiatriques... les points forts du congrès de la Société française d’ORL

A l'occasion de la 130e édition du congrès de la Société française d’ORL et de chirurgie de la face et du cou (SFORL), qui a eu lieu à Paris du 20 au 22 septembre derniers, les spécialistes ORL sont revenus sur la prise en charge de plusieurs pathologies courantes telles que les nodules thyroïdiens, les infections ORL pédiatriques compliquées ou encore le Sahos.

01/11/2024 Par Dre Brigitte Blond
130e congrès de la Société française d'ORL
ORL

Les ORL se sont retrouvés à Paris du 20 au 22 septembre pour la 130e édition du Congrès de la Société française d’ORL et de chirurgie de la face et du cou (SFORL), qui constitue le plus grand congrès professionnel national francophone de cette spécialité. Il témoigne de l’engagement de la SFORL dans la formation, la recherche et la pratique clinique. Ateliers, tables rondes, controverses, etc., de nombreuses sessions ont abordé des sujets utiles pour le médecin généraliste.

 

Nodules thyroïdiens bénins : chirurgie ou radiofréquence ?

La prévalence des nodules thyroïdiens est croissante en France, non pas en raison d’un effet Tchernobyl à retardement, mais parce que les examens complémentaires – échographie, scanner et échodoppler – qui les découvrent sont de plus en plus réalisés, à plus ou moins bon escient… Par ailleurs, ces lésions sont particulièrement fréquentes après 60 ans.

« La radiofréquence, une technique d’auto-ablation aujourd’hui arrivée à maturité, est indiquée dès lors que l’hypothèse d’un cancer (7 à 15 % des nodules) est écartée », prévient le Pr Sylvain Morinière, ORL et chirurgien de la face et du cou (CHRU de Tours). Si l’examen clinique (facteurs favorisants, antécédents familiaux, palper de la thyroïde et des aires ganglionnaires, examen du larynx et signes associés) est en faveur d’un cancer, avec un nodule fixé, adhérent, une cytoponction est indiquée dans le même temps que l’échographie pour scorer la lésion et décider d’une thyroïdectomie totale ou d’une lobectomie associée à un traitement médical complémentaire. Une fois acquise la conviction de la bénignité de la tumeur, la radiofréquence est, elle, réservée aux nodules, en une séance dès lors que le nodule « dominant » est d’un volume raisonnable (40 cm3, soit au plus une balle de golf), après échographie de faisabilité (selon la taille du cou et du thorax, la visibilité du pôle inférieur du nodule, sa mobilité avec la respiration). Le patient est revu à un mois pour juger d’une éventuelle repousse (dans 15 à 20 % des cas) et décider alors d’un geste chirurgical ou de la réduction de volume du nodule, qui peut se poursuivre sur quatre à cinq ans.

« Si la thermoablation est, en termes de qualité de vie postopératoire, supérieure à la chirurgie, avec notamment une préservation de la fonction thyroïdienne, elle pose toutefois un problème d’accessibilité à la fois géographique (25 centres seulement) et financière (acte non inscrit à la nomenclature) », souligne le Dr Gilles Russ, radiologue spécialisé en imagerie diagnostique et thérapeutique de la glande thyroïde (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris). Les indications doivent en être soigneusement posées.

 

Complications des infections ORL de l’enfant : le traitement précisé

Les complications des infections ORL suivent les évolutions épidémiologiques de ces infections qui ont été très fluctuantes ces derniers temps du fait de la pandémie de Covid, du confinement…, avec une « explosion » des cas ces derniers mois et années.

Par ailleurs, l’histoire naturelle des infections ORL susceptibles de se compliquer est fonction de plusieurs facteurs. La saisonnalité d’abord : à la diminution de la température extérieure et de l’immunité locale s’ajoutent l’irritation des muqueuses et le regroupement dans des milieux fermés. Autres facteurs de risque, la circulation plus intense de virus à l’origine d’un lit inflammatoire muqueux, sécrétoire, plus sensible à l’invasion de bactéries commensales. « Si les infections graves à virus Sars-CoV-2 ont peu concerné les enfants (100 fois moins d’hospitalisations), les mesures de confinement ont, en revanche, eu des conséquences non négligeables pendant et surtout après la levée des gestes barrières, avec une perte des cycles épidémiques habituels (« il n’y avait plus de saison ») et une augmentation du nombre des infections compliquées (10 fois plus de mastoïdites par exemple) », décrit le Dr Fabian Blanc, ORL pédiatrique et chirurgie cervico-faciale au CHU de Montpellier. Leur sévérité n’étant toutefois pas différente.

Ces infections ont fait l’objet de recommandations de la Société de pathologie infectieuse de langue française (Spilf) fin 2023 et d’une mise à jour de celles de la SFORL en 2024.

« Ce sont les cinq mêmes bactéries qui sont en cause (S. pyogenes, Staphylococcus aureus méthicilline-sensible [Sams], S. pneumoniae, Fusobacterium sp et Bacteroides sp.) ; la bonne nouvelle étant qu’elles restent sensibles aux antibiotiques. Les complications d’une infection pharyngée – lymphadénite aiguë, abcès périamygdalien et abcès profond (para- ou rétropharyngé) – sont donc traitées par des antibiotiques et non plus par la chirurgie », observe le Dr Éric Moreddu, ORL et chirurgien facial pédiatrique (hôpital d’enfants de La Timone, Marseille). La porte d’entrée est le plus souvent pharyngée (rhinopharyngite, angine, non identifiée une fois sur trois).

En cas de lymphadénite aiguë non suppurée (avec un ganglion de plus de 1 cm), un test de diagnostic rapide (TDR) influe sur l’antibiothérapie. En cas de suppuration (diagnostic porté sur la fièvre, la douleur, l’œdème, l’évolution rapide et l’inflammation cutanée), l’imagerie n’est pas systématique et le traitement est habituellement fondé sur l’amoxicilline. Une échographie n’est indiquée sur un abcès périamygdalien que lorsque l’examen est impossible (en raison d’un trismus). « Pour les abcès profonds, la clinique est limpide : un torticolis fébrile signe à près de 100 % le diagnostic », décrit le Dr Moreddu. Il se produit plus volontiers chez les garçons, jeunes (âge médian de 4 ans).

Si le TDR est positif, le traitement d’une adénite repose (hors stratégies alternatives en cas de contre-indication à l’antibiothérapie préférentielle) sur l’amoxicilline 50 mg /kg/j per os en deux prises. Si le TDR est négatif et que le germe probablement en cause est le staphylocoque doré, le traitement reposera sur l’amoxicilline-acide clavulanique 80 mg/kg/j en deux prises, pendant dix jours.

La posologie est doublée (150 mg/kg/j en IV en 3 doses pendant 10 à 14 jours) pour les adénites suppurées, les abcès périamygdaliens et péri- ou rétropharyngés.

Autre complication d’une infection ORL, la mastoïdite aiguë suivant une otite moyenne aiguë (OMA). Son diagnostic est clinique : elle se manifeste par un syndrome septique et une OMA à l’otoscope, éventuellement une tuméfaction rétro-auriculaire. Un angioscanner cérébral ou une angio-IRM complète le bilan, à la recherche d’un abcès intracérébral, d’un empyème, etc. « Un préalable, insiste le Dr Fabian Blanc, est de traiter correctement les OMA purulentes, par amoxicilline 80 mg/kg/j en deux prises pendant dix jours avant 2 ans, pendant cinq jours après 2 ans. »

En cas de mastoïdite, le traitement antibiotique est parentéral à large spectre et la levée de la pression intramastoïdienne chirurgicale (le plus sûrement efficace) en essayant de rationaliser les gestes invasifs, sous la même anesthésie générale.

 

Amygdalectomie de l’enfant : privilégier les techniques intracapsulaires

Si les recommandations de la SFORL de 2021 concernant les amygdalectomies de l’enfant prévalent toujours, les preuves – via en particulier les expériences de terrain – s’accumulent, sur la moindre morbidité des techniques intracapsulaires versus les dissections extracapsulaires, qui entraînent moins de saignements et de douleurs postopératoires. En restant dans l’amygdale, en la pulvérisant à son contact, on épargne, en effet, le muscle, que l’amygdalectomie soit à visée infectieuse ou pour traiter un troubles respiratoire obstructif du sommeil (apnées, ronflements, etc.).

 

Sahos : de nouveaux marqueurs de risque cardiovasculaire

« L’indice d’apnée-hypopnée est un marqueur imparfait du risque cardiovasculaire, observe le Pr Wojciech Trzepizur, pneumologue, responsable du centre sommeil au CHU d’Angers, parce qu’il ne tient pas compte de la durée et de la profondeur des épisodes de désaturation. » D’autres marqueurs sont donc en cours de validation, comme la charge hypoxique, acquise par la polysomnographie : l’aire sous la courbe des désaturations, reflet de la maladie, permet d’identifier les patients les plus à risque et à même de bénéficier d’un traitement. En revanche, on ne dispose pas encore de niveau seuil pour ce marqueur, et a fortiori de recommandations.

La chute de l’amplitude de l’onde de pouls est une autre piste, elle aussi à l’état de recherche, qui témoigne de l’atteinte vasculaire. Son enregistrement donne accès à la vascularisation périphérique, par la mesure de la variation des volumes vasculaires au bout du doigt (dérivée de la saturation en oxygène, calculée systématiquement en pneumologie). Chaque apnée s’accompagne d’une décharge sympathique et d’une vasoconstriction. La réactivité des vaisseaux en début de maladie s’efface progressivement pour les patients plus « anciens ». « Rien de nouveau donc en matière d’enregistrement, mais une façon autre de les interpréter », résume le Pr Trzepizur.

Références :

D’après les communications des Prs Sylvain Morinière (CHU de Tours), Wojciech Trzepizur (CHU d’Angers) et des Drs Gilles Russ (hôpital de la Pitié-Salpêtrière, Paris), Éric Moreddu (hôpital d’enfants de La Timone, Marseille) et Fabian Blanc (CHU de Montpellier) lors du 130e Congrès de la Société française d’ORL et de chirurgie de la face et du cou (Paris, 20 au 22 septembre).

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Frederic Limier

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