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Douleurs chroniques : une ampleur largement sous-estimée

Plus de 4 adultes sur 10 déclarent vivre avec une douleur persistant depuis plus de 3 mois. Un chiffre révélé dans le Baromètre de la douleur 2025, présenté par la Fondation Analgesia qui appelle à faire de la douleur une grande cause nationale.

23/10/2025 Par Alexandra Verbecq
Algologie
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Le Baromètre de la douleur 2025, enquête menée auprès de 11 940 adultes représentatifs de la population française et réalisée par l’Observatoire français de la douleur et des antalgiques (OFDA) et OpinionWay, a montré que 42 % des personnes interrogées souffraient d'au moins une douleur chronique (DC), dont la moitié depuis plus de trois ans. "Ce sont 23 millions de Français, voire plus en ajoutant les enfants ayant des pathologies associées à des DC ! Nous ne nous attendions pas à un chiffre aussi élevé !", souligne le Pr Nicolas Authier, président de la Fondation Analgesia, chef des services de médecine de la douleur et de pharmacologie au CHU de Clermont-Ferrand.

D'après cette enquête, l’âge moyen des patients vivant avec une DC est de 46 ans. Les femmes sont majoritairement concernées (57%), certaines pathologies leur étant spécifiques (endométriose ou autres douleurs génito-pelviennes) ou étant plus fréquentes chez elles (fibromyalgie…). "Par ailleurs, les femmes subissent un retard de diagnostic par rapport aux hommes et plus particulièrement les femmes de couleur", complète le Pr Éric Serra, président de la Société française d'étude et traitement de la douleur (SFETD).

Les DC citées sont uniques ou mixtes. Les plus fréquentes sont les douleurs musculosquelettiques (36%) avec essentiellement la lombalgie chronique mais aussi l’arthrose ; suivies par les douleurs céphaliques (33%) dont la migraine ; les douleurs abdominales (15%) dont l’intestin irritable et les Mici ; les douleurs neuropathiques (12%) qu’elles soient post-chirurgicales, post-zostériennes ou d’origine diabétique ; et enfin les douleurs en lien avec un cancer (4%) qui sont provoquées par des métastases osseuses ou par certains traitements neurotoxiques. Près d’une personne concernée sur deux présente des douleurs intenses (notées de 7 à 10).

Pour le Pr Authier, "l’intensité n’est, le plus souvent, mesurée qu’au début d’une DC. Ensuite, elle n’est rapidement plus le sujet car c'est un critère d'évaluation difficile à diminuer. Par ailleurs, même lorsque la cause d'une DC est traitée, une douleur nociplastique peut parfois persister." Plus de la moitié des patients présentent des répercussions physiques (fatigue, sommeil, fonctions cognitives…), émotionnelles (dépression, anxiété…) et sociales. "Plus d'un tiers ont un handicap fonctionnel modéré à sévère. Le fardeau de la DC est extrêmement important", souligne-t-il.

Contrôler l’automédication

Le paracétamol est au premier rang des traitements prescrits (70%), suivi par les anti-inflammatoires (51%) et les opioïdes (27%). "Le tramadol, la codéine, la poudre d'opium, la morphine… sont appropriés pour certaines douleurs (métastases du cancer…), mais ils ne sont pas indiqués pour toutes les DC. Le risque de les prescrire est l’escalade thérapeutique, le surdosage et la dépendance à ces traitements", rappelle-t-il.

Un recours massif à l’automédication (87%) est déclaré par les patients, 16% utilisant des opioïdes sans ordonnance. "Nous devons aussi les accompagner dans le processus d’automédication car ce dernier est parfois pertinent sur de courtes durées, mais également dangereux."

Alors que la Haute Autorité de santé (HAS) recommande une prise en charge pluriprofessionnelle de la douleur, le baromètre fait également le constat qu’elle est souvent assurée exclusivement par le médecin traitant (60% des cas) et que l'accès aux structures douleur chronique (SDC) reste limité. "Ces SDC sont parfois éloignées du domicile des patients ou alors débordées, décrit Nicolas Authier. Le parcours de soin n’est pas encore optimal. […]La prescription de traitements non-pharmacologiques est nettement en dessous de celle des médicaments. Les plus prescrits sont la kinésithérapie et parfois l’ostéopathie. Si l’accès à un psychologue est aujourd’hui plus facile, certaines techniques comme la neurostimulation restent plus difficile d’accès. La proposition de traitements non pharmacologiques fait partie des points d'amélioration importants de la prise en charge."

Enfin, moins de 1 patient sur 3 rapporte une amélioration de ses symptômes dans les six derniers mois.

Une mobilisation collective pour des solutions

Concernant l’amélioration de l’accès aux SDC, la SFETD indique réfléchir à la télé-expertise. Elle annonce d’autre part la création du collectif "France douleurs", dont l’ambition est de "faire front commun pour que la douleur soit une priorité de santé publique lors du prochain quinquennat".

"La DC est tellement prévalente qu'elle ne doit plus rester invisible. Des solutions, pas forcément médicamenteuses, doivent être trouvées pour aider ces patients qui ne doivent plus souffrir en silence. Nous devons nous mobiliser collectivement", conclut le président d’Analgesia.

Références :

D’après une conférence de presse et une table ronde organisées par la Fondation Analgesia au ministère de la Santé (20 octobre).

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Claire FAUCHERY

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