Comment la Sécu veut vous inciter à moins prescrire

02/07/2019 Par Véronique Hunsinger
Politique de santé
Le directeur de l’Union nationale des caisses d'Assurance maladie (Uncam), Nicolas Revel, a présenté le 27 juin à son conseil le rapport annuel "charges et produits", qui contient des pistes d’économies qui concerneront directement les médecins. Ces derniers pourraient ainsi se voir proposer de nouveaux systèmes d'intéressement à la prescription, en complément de la Rosp.

  C’est un rapport qui est attendu tous les ans au début de l’été et scruté avec d’autant plus d’attention qu’une partie des propositions qu’il contient est généralement reprise par le Gouvernement dans son projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l’année suivante. Ainsi, le rapport "charges et produits" que le directeur général de l’Uncam, Nicolas Revel, a présenté, jeudi après-midi, aux partenaires sociaux contient des pistes d’économies pour un montant total de 2,069 milliards d’euros. Il ne s’agit ici que des actions propres que l’Assurance maladie peut mettre en œuvre – l’éventuel déremboursement de l’homéopathie n’en fait donc pas partie – et le canevas des mesures détaillées dans le rapport est le même que les années précédentes. Ainsi, le poste des produits de santé représente un peu moins de la moitié de la somme (887 millions). L’Assurance maladie espère que la diminution des prescriptions des antibiotiques reparte grâce notamment à une nouvelle campagne de sensibilisation grand public qui sera orchestrée l’année prochaine par Santé publique France et par un développement des Trod (tests rapides d’orientation diagnostic) en officine.   Partage des économies avec le prescripteur Mais surtout, constatant l’essoufflement des effets de la Rosp, Nicolas Revel compte proposer aux syndicats de médecins libéraux un dispositif d’intéressement aux économies supplémentaire en échange de prescriptions plus efficientes, avec dans son viseur les inhibiteurs de pompe à protons (IPP), les médicaments du diabète de type 2 et les biosimilaires. Les premiers représentent en effet une dépense annuelle de 440 millions d’euros, pour 16 millions d’assurés. Un nombre de patients traités jugé anormalement élevé au regard des comparaisons internationales, d’autant que, selon les pointages de la Cnam, 60% des prescriptions seraient hors AMM. L'idée est que les prescripteurs libéraux "puissent bénéficier d’un retour plus direct des économies générées par leurs pratiques de prescriptions" dès 2020, est-il précisé dans le rapport. Une baisse de 10% des prescriptions d'IPP générerait 40 millions d’euros d’économies. Dans l’hypothèse d’un partage avec le prescripteur des économies réalisées la 1ère année, à hauteur de 30%, le gain net atteindrait 28 millions d’euros sur les IPP, 45 sur les médicaments du diabète de type 2 (metformine en première intention) et 98 sur les biosimilaires, pour un total de 171 millions d'euros. Sensibilisé notamment par les syndicats d’infirmières libérales avec lesquels il a été en négociation dans les derniers mois, le directeur de la Cnam plaide aussi pour une chasse au gaspillage dans le domaine des dispositifs médicaux. Cela pourrait notamment se traduire par une limitation des prescriptions hospitalières exécutées en ville – notamment de pansements -  à un maximum de 7 jours.   Le cas FreeStyle Libre L’Assurance maladie a également voulu mieux comprendre l’utilisation en vie réelle par les patients diabétiques du dispositif de mesure continue du glucose interstitiel, FreeStyle Libre, remboursé depuis juin 2017 et qui a connu une diffusion rapide. Elle a d’abord constaté que 13% des initiations sont effectuées par un généraliste, alors que celles-ci sont normalement réservées aux spécialistes et dans un tiers des cas pour les généralistes, les indications thérapeutiques n’ont pas été respectées. Des constats à mettre en relation, selon l’Assurance maladie, avec un taux d’abandon important en cours de route par les patients et à une sous-utilisation du dispositif. La Cnam affiche la même déception face aux pompes à insuline pour lesquelles elle constate 18% d’arrêt dès la première année d’utilisation. Elle veut ainsi à la fois de mener des actions pour favoriser la bonne utilisation de ces dispositifs et proposer au Comité économique des produits de santé (CEPS) une baisse de prix du FreeStyle. En outre, l’Assurance maladie a travaillé sur la question de la non-observance, même si elle estime quasiment impossible de chiffrer le coût de celle-ci pour la collectivité. Elle a donc souhaité mettre en place un "baromètre de l’observance" auprès de patients chroniques, qui pourra servir de point de référence dans les prochaines années. Parmi les leviers qu’elle a identifiés pour améliorer l’observance, au travers de cette étude, figurent la qualité de la relation du patient avec son médecin, le rôle majeur de l’information et la confiance dans le traitement. Voulant éviter une "approche descendante, voire morale" et "reconnaissant que l’on touche à des questions difficiles", l’Assurance maladie se propose d’élaborer et de diffuser des outils de dialogue et d’analyse de l’observance aux praticiens.   Majorations pour les personnes handicapées Enfin, parmi les 33 propositions de ce catalogue, plusieurs concernent également la prise en charge des personnes en situation de handicap pour lesquelles la Cnam a mis en évidence cette année dans son rapport à la fois des montants de reste à charge très importants, au regard des revenus des personnes, et des difficultés d’accès aux soins. Ainsi, elle propose notamment de mieux recenser et faire connaître les professionnels de santé formés à la prise en charge du handicap en ville et de créer des majorations conventionnelles pour les professionnels, autre que les chirurgiens-dentistes et les orthophonistes qui en bénéficient déjà, dans certaines situations cliniques identifiées.

Tableau récapitulatif des économies attendues des actions de l'Assurance maladie en 2020 (en millions d'euros). DR Cnam.

 

Faut-il octroyer plus d'autonomie aux infirmières ?

Angélique  Zecchi-Cabanes

Angélique Zecchi-Cabanes

Oui

Pourquoi pas? À partir du moment où elles ont la responsabilité totale de ce qu’elles font et que les médecins généralistes n’ont ... Lire plus

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