"Le coût de la revalorisation de la consultation des médecins n'est pas prévu" : les sénateurs attaquent le PLFSS 2024

10/11/2023 Par Aveline Marques
Politique de santé
Après un rejet inédit en commission des Affaires sociales de l'Assemblée et une adoption au forceps par la procédure du 49.3 en séance plénière, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024 poursuit son parcours législatif au Sénat. Mercredi 8 novembre, la commission des Affaires sociales de la chambre haute a elle aussi rejeté l'Ondam 2024, jugé "insincère", et adopté plus de 150 amendements, dont une taxe pour les patients posant des lapins aux professionnels de santé. 

 

"On met plus d'argent pour des déficits qui sont plus importants et pour une qualité des soins qui est en diminution, et des situations de personnels de plus en plus difficiles", a résumé le sénateur Philippe Mouiller (LR), lors d'une conférence de presse présentant le rapport sur le PLFSS 2024 adopté mercredi par la commission des Affaires sociales de la chambre haute, qu'il préside, ainsi que les 152 amendements apportés au texte en amont de sa discussion en séance publique.  

Les sénateurs de la commission ont rejeté la trajectoire financière présentée par le Gouvernement, marquée par des "hypothèses optimistes" et par une "aggravation du déficit" (17.5 milliards en 2027). Pour Elisabeth Doineau (UDI), rapporteure générale du texte, "c'est un aveu d'impuissance". "On transmet la dette sociale aux générations futures." 

Les sénateurs ont également rejeté l'Ondam 2024 (+3.2%), qualifié "d'insincère", jugeant les dépenses "sous-estimées". Alors que la Cnam rouvrira les négociations conventionnelles avec les médecins libéraux le 15 novembre prochain, le coût de la revalorisation des tarifs de consultation ne semble pas avoir été intégré dans le sous-Ondam de ville (+3.5%) en tant que dépense supplémentaire, soulignent les élus de la commission. "Le coût de la revalorisation de la consultation, là en clair, c'est pas prévu, pointe Elisabeth Doineau, à moins de trouver des économies par ailleurs. En tout cas telles que les choses sont présentées, on peut se dire qu'il n'y aura pas d'augmentation de la consultation…" 

Les sénateurs regrettent les non-dits, en particulier concernant le possible doublement de la franchise médicale et des participations forfaitaires, dont les économies (autour de 800 millions d'euros) sont pourtant chiffrées dans le PLFSS. Pour éviter que la mesure soit purement et simplement renvoyée à un texte réglementaire, ils portent un amendement "qui oblige à revenir devant les commissions des Affaires sociales". "On devrait poser le sujet de la responsabilité sur la table, insiste Elisabeth Doineau. Aujourd'hui, les citoyens ne se rendent pas compte du coût des soins et des médicaments, on devient plus consommateurs que patients."  

Raison pour laquelle la commission est favorable à un amendement qui "vise à mettre à la charge des assurés n'honorant pas un rendez-vous en soins de ville une somme forfaitaire fixée par décret, au bénéfice de l'assurance maladie". "Une partie de cette somme, définie dans le cadre des négociations conventionnelles, pourrait être reversée par l'assurance maladie aux professionnels de santé concernés en indemnisation", expose la sénatrice Corinne Imbert (LR), rapporteure pour la branche maladie. 

De manière générale, les sénateurs de la commission déplorent un manque "de réformes structurelles, de fond", qui a pour effet de diminuer la portée des mesures présentées chaque année devant le PLFSS. 

En revanche, ils souhaitent reporter au 1er janvier 2028 (après trois ans d'expérimentation) la réforme du financement des activités de médecine-chirurgie-obstétrique des établissements hospitaliers, jugeant la réforme du Gouvernement "non aboutie". 

Autres modifications notables : la révision du mécanisme de la clause de sauvegarde pour les laboratoires et la suppression de l'obligation de délivrance de médicaments à l'unité en cas de pénurie. La commission soutient, en revanche, la possibilité pour les pharmaciens de délivrer des antibiotiques en cas de cystite ou d'angine si le test réalisé est positif, ainsi que la possibilité pour la CPAM de suspendre automatiquement les IJ en cas d'arrêt de travail jugé injustifié par le médecin contrôleur diligenté par l'employeur. 

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Claire FAUCHERY

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7 débatteurs en ligne7 en ligne
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Débatteur Passionné
Médecine générale
il y a 2 ans
"Aujourd'hui, les citoyens ne se rendent pas compte du coût des soins et des médicaments, on devient plus consommateurs que patients."  Tu parles ! ! ! Comme si le consumérisme des services "gratuits" ne datait pas d'il y 40 ans et plus ! Et ça se croit intelligent  de poser comme une nouveauté un vice structurel (donc ancien) du système pour faire semblant d'en "étudier" une solution "innovante" ! Si responsabilité il peut y avoir dans un système commun (collectivisé pour les plus traditionnalistes), elle ne saurait être qu' INDIVIDUELLE, et ça ne peut passer que par une distribution individualisée de la ressource sur des comptes-épargne-santé-social PERSONNELS. La gabegie ne peut être que collective puisqu'on ne saurait abuser d'un budget personnel une fois qu'il est épuisé. On ne peut abuser que du bien d'autrui ! Et c'est en anonymisant la ressource (le "à chacun selon ses besoins", bien vite devenu à chacun selon ses exigences) que nos brillants législateurs de toutes obédiences (droites dans leurs bottes comme gauchères des deux mains) auront enclenché la planche à billets sociale dont nos descendants payeront d'addition . Il s'agit bien d'un crime contre l'humanité, puisque - non seulement la "collectivisation-anonymisation" de la ressource aura destitué chaque individu-citoyen de sa personnalité morale (d'où procède toute responsabilité), mais par conséquence économique toujours prévisible depuis l'origine, - l'accumulation de la dette ainsi anonymisée sur la période de quelques générations privera les suivantes de ce même recours au soin dont nos "penseurs pour le bien commun" prétendaient faire un droit solidaire imprescriptible . Où l'on voit que le manque d'analyse et le clientélisme politique aura bien égoïstement confiné la "solidarité" - dans l'ESPACE de quelques générations contemporaines en repoussant sciemment sous le tapis la question - de la solidarité dans le TEMPS long de la succession et de la transmission . Un juste exercice d'une politique responsable, équitable (bien mieux qu' "égalitaire") et durable devra bientôt savoir se retenir ou s'abstenir de ces recettes "collectivistes" aussi aguicheuses que frelatées et provisoires; Savoir se retenir plutôt que de s'agiter et se contorsionner pour paraître agir. On n'en attend pas moins d'une assemblée qui prétend encore à l'épithète des SAGES, pour tempérer la hâte toujours suspecte de celle des écervelés (dé-putés) de la chambre basse; (du latin "putare" qui signifie penser, réfléchir)
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Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 2 ans
Comme le disent très bien mes confrères, 1/ nous allons une fois de plus auto- financer la pseudo revalorisation par d'autres économies dont nous aurons la charge, mais on a l'habitude depuis 30 ans, c'est chaque fois pareil. 2/ et le coup de l'amende au profit de la sécu pour les poseurs de lapins, alors ça, fallait oser ! Je suis sûre que même Mr Fatome n’y avait pas pensé..... On touche vraiment le fond.
Photo de profil de Fabien BRAY
7,5 k points
Débatteur Passionné
Médecins (CNOM)
il y a 2 ans
S'il s'avère que ce n'est pas prévu, ou pire s'il s'avère que l'augmentation est prévue à budget équivalent, cela signifie que l'augmentation du C sera directement compensée par une diminution d'une autre forme de rémunération. Concrètement soit l'entourloupe est déjà prévue soit elle se prépare maintenant.
 
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