C’est l’une des mesures phares de l’exécutif pour lutter contre les déserts médicaux : mailler le territoire d’assistants médicaux, ces professionnels nés du plan Ma Santé 2022 présenté en septembre 2018 par le Président Macron. Pour rappel, les premiers recrutements ont été lancés à la rentrée 2019. Aujourd’hui, les assistants médicaux sont un peu plus de 4000, mais le Gouvernement entend porter leur nombre à 10 000 d’ici la fin de l’année prochaine. Pas infaisable pour l’Inspection générale des Affaires sociales (Igas), mais cela doit nécessiter "une évolution de leur formation".
Chargée d’étudier le sujet en vue du déploiement des assistants médicaux, l’Igas a en effet identifié d’importants freins et émis des suggestions pour les lever. D’abord, l’administration plaide pour la réduction de la durée de formation, qui devrait par ailleurs se faire davantage en distanciel. Elle appelle également à communiquer auprès des organismes de formation afin que les dispenses prévues pour les secrétaires médicaux soient "systématiquement accordées", notamment sur le plan des compétences administratives.
"Aujourd’hui, les opérations de démarchage par les organismes de formation sont rendues difficiles voire impossibles puisqu’ils ne peuvent pas se faire communiquer la liste des médecins ayant signé un contrat avec l’Assurance maladie", regrette par ailleurs l’Igas dans son rapport. Elle préconise de lever ce frein au moyen de l’insertion d’une clause relative à l’utilisation de données personnelles conforme au Règlement général sur la protection des données (RGPD) dans les modèles de contrat.
En outre, l’accès à la formation est, à ce jour, essentiellement centré autour du plan de développement des compétences, "ce qui restreint les viviers et accentue aussi les problèmes de financement", déplore l’Igas, qui milite pour le développement de la formation "avant embauche". Financement qui fait l’objet de "contraintes majeures", note globalement l’Igas, ce dernier étant "insuffisant et inadapté à une montée en charge rapide du nombre de stagiaires". Le service administratif rappelle que le coût moyen de la formation est de 12 600 euros par stagiaire.
L’Igas juge également que le dispositif "pâtit d’un manque de pilotage". Les assistants médicaux n’étant pas des professionnels de santé, ils ne relèvent pas de la Direction générale de l’offre de soins (DGOS) et "les autres directions du ministère de la Santé ne traitent le sujet que très à la marge". Pour simplifier la coordination, l’Igas suggère que la DGOS s’empare pleinement du dispositif, dont elle "a reconnu l’intérêt", et "qu’un comité de pilotage soit installé pour suivre le déploiement des assistants médicaux".
Inciter les médecins à embaucher
Enfin, l’Igas recommande de transformer la fonction d’assistant médical en "un véritable métier". "La fonction d’assistant médical donne satisfaction aussi bien aux médecins employeurs qui mettent en avant la qualité de vie au travail qu’aux salariés, lorsque leur parcours de formation s’accompagne effectivement d’une évolution de leurs tâches", justifie l’Igas. Dans un entretien accordé au Parisien, la ministre déléguée à l’Organisation territoriale et aux Professions de santé, Agnès Firmin Le Bodo, a d’ailleurs indiqué qu’"un assistant permet de libérer deux créneaux de consultation chaque jour, soit 50.000 en plus chaque semaine à l'échelle de la France".
L’Igas plaide ainsi pour un "élargissement du périmètre d’activités médico-techniques des assistants médicaux", comme "ce qui existe à l’étranger", ainsi que pour "leur montée en compétences, en lien avec les représentants des professions de santé concernées". Elle souligne toutefois "la difficulté qu’il y aura à positionner chacun des professionnels les uns par rapport aux autres et à déterminer leurs champs de compétences dans le contexte français d’organisation des soins".
Par ailleurs, si entre 2019 et 2022, 119,2 millions d’euros ont été versés aux médecins pour les aider à embaucher des assistants médicaux, censés leur libérer du temps médical, ces derniers demeurent encore réticents, observe l’Igas. "Les médecins n’ont pas une très grande appétence pour le rôle d’employeur et redoutent d’avoir à appliquer le droit du travail", explique l’Igas, qui estime que "ce frein pourrait être levé, en partie, par le développement de groupements d’employeurs".
Ces réticences peuvent aussi s’expliquer par un manque de place dans les certains cabinets médicaux, mais aussi par l’obligation de remplacer la secrétaire médicale si elle devient assistante médicale. Cette condition de remplacement a été "assouplie par le règlement arbitral, en autorisant le recours à un secrétariat téléphonique, ce qui constitue une adaptation pertinente", valide l’Igas.
Enfin, alors que le vivier d’assistants médicaux actuel est essentiellement composé de secrétaires médicales, l’Igas souligne le très faible différentiel de rémunération entre les deux métiers, pouvant expliquer un manque d’attractivité.
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