
Les médecins hospitaliers appellent à abandonner le moratoire sur les fermetures de maternités
Plusieurs syndicats de médecins hospitaliers et gynécologues s'opposent, ce lundi 2 juin dans une tribune, au vote par les députés d'une proposition de loi visant à instaurer un moratoire sur les fermetures de maternités. Les signataires s'insurgent contre une mesure "qui, sous prétexte d’accès aux soins pour tous et d’un mirage de sécurité et de qualité des soins", a été imaginée "sans aucune concertation avec les professionnels concernés".

L'Assemblée nationale a approuvé mi-mai la mise en place d'un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternités, y compris celles réalisant moins de 300 accouchements par an. La proposition de loi votée, portée par le député centriste Paul-André Colombani, entend notamment répondre à la hausse de la mortalité infantile, qui s'est accrue ces dernières années en France. Mais pour plusieurs syndicats d'hospitaliers et de gynécologues, ce texte est "purement électoraliste". "La fermeture définitive d'une maternité est toujours vécue comme un échec pour les élus, qui se sont toujours battus pour maintenir 'leur' maternité quoi qu'il en coûte…", écrivent quatre organisations, dans une tribune diffusée ce lundi 2 juin.
"Nous, gynécologues-obstétriciens, anesthésistes-réanimateurs, pédiatres, urgentistes, nous insurgeons vivement contre une telle manière d’aborder la périnatalité, en inscrivant dans la loi une mesure qui, sous prétexte d’accès aux soins pour tous et d’un mirage de sécurité et de qualité des soins, a été imaginée sans aucune concertation avec les professionnels concernés", insistent conjointement le SNPHARE, le SYNGOF, le SNPeH et le SudF (membres de l'APH)*.
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Les syndicats rappellent, par ailleurs, qu'une mission sénatoriale sur la santé périnatale a été menée en 2024, et n'avait pas conduit "à cette conclusion".
Pour justifier leur opposition à cette proposition de loi, les organisations rappellent notamment dans leur tribune que les maternités réalisant moins de 300 accouchements par an "ne bénéficient pas d'une autorisation de soins" et ne devraient donc "pas exister". "Seule une dérogation de l'ARS le leur permet", ajoutent-elles. "Rappelons également que plusieurs de ces petites maternités ont dû fermer par la pression des professionnels de santé suite à des décès maternels et néonataux évitables", affirment les syndicats.
Des maternités "dangereuses"
"Par ailleurs, poursuivent-ils, l'existence d’une maternité sous-tend la disponibilité H24 d’un gynécologue-obstétricien, d'un anesthésiste-réanimateur, d'un pédiatre ; l’absence d'un de ces trois acteurs entraîne la fermeture temporaire de la maternité… ou l’utilisation de solutions dégradées non réglementaires et dangereuses pour la femme et l’enfant à naître". Mais, face à la pénurie de ces spécialistes sur le territoire, "autant de personnels pour une si faible activité ne peut que nous interroger sur la pertinence de s’opposer à un regroupement des maternités", détaillent les signataires de la tribune, pour qui les maternités réalisant moins de 300 accouchements par an sont "dangereuses".
"Dans l'intérêt des mères et des enfants à naître", les signataires de la tribune appellent donc à abandonner certaines dispositions de la proposition de loi, dont la mise en place d'un moratoire de trois ans. Ils souhaitent également la "réouverture des discussions sur la révision du décret périnatalité [qui date de 1998], dans des dispositions pour la qualité [et la] sécurité des soins pour tous… et non des maternités de proximité aux dépens de la qualité et de la sécurité des soins."
*Le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi aux autres spécialités (SNPHARE), le Syndicat national des gynécologues obstétriciens en France (SYNGOF), le Syndicat national des pédiatres en établissements hospitaliers (SNPeH), Samu-Urgences de France (SudF), qui sont tous membres de l'union syndicale Avenir Hospitalier/APH.
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