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"Conditions indignes" de prise en charge : un hôpital mis en cause après la mort d'un détenu

L'hôpital de Troyes (Aube) est mis en cause dans la mort d'un détenu pris en charge par l'établissement en 2019.   

28/02/2025 Par Sandy Bonin
Faits divers / Justice
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Ce mercredi, le rapporteur public du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a estimé que le décès en février 2019 de Zakaria Touré, détenu de 21ans, était imputable aux "conditions indignes" de sa prise en charge par l’hôpital de Troyes.

Le 19 février 2019, ce jeune homme incarcéré à la maison d’arrêt de Troyes convulse dans sa cellule pendant son sommeil. Il est admis aux urgences de l'hôpital de Troyes à 10h44, encore parfaitement conscient.

Quelques heures plus tard, le jeune homme développe une nouvelle crise. Malgré l'administration d'un cocktail de tranquillisants, l'agitation du détenu ne se calme pas. L'hôpital décide de faire appel aux forces de l’ordre. Les policiers vont alors lui administrer plusieurs décharges de taser. 40 minutes plus tard, le jeune détenu fait un arrêt cardiaque. Transféré en réanimation, Zakaria décède deux jours plus tard.

 "Il a été traité comme un détenu et non comme un patient, dénonce Me Henri de Beauregard, l’avocat de la famille, cité par Le Parisien. Les soignants étaient convaincus qu’il simulait et ne l’ont pas traité comme il le fallait."

Sur le plan pénal, l’enquête a abouti à un non-lieu, contre lequel les proches du défunt ont fait appel. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Reims doit se prononcer.

Sur le plan administratif, l'hôpital est mis en cause. Dans son dernier rapport remis, le médecin désigné par le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne se montre particulièrement sévère avec l’établissement. "De graves manquements ont été relevés et sont imputables au service d’accueil des urgences du CHG de Troyes", indique-t-il, listant une "prise en charge inadaptée de l’état d’agitation qui témoignait d’un état de souffrance cérébrale après deux crises convulsives". Le médecin fustige notamment le recours au taser. "Les décharges électriques administrées (…) ne constituent en aucun cas une thérapeutique, même si elles ont eu pour effet de 'paralyser' Monsieur Zakaria Touré ('sédation électrique')", écrit-il, dénonçant la passivité des soignants face à cette méthode. "Ces décharges électriques par taser ont été à l’origine d’une souffrance physique supplémentaire, inacceptable au sein d’un hôpital et dans un contexte de souffrance cérébrale", pointe-t-il.

Selon l'expert, une anesthésie générale avec intubation aurait dû être pratiquée, afin de réaliser un scanner cérébral. Il estime que le décès du jeune homme était "totalement évitable".

"Vous tiendrez compte de la soudaineté et de la brutalité de ce décès, ainsi que des conditions indignes dans lesquelles il est intervenu", a-t-il intimé devant le tribunal, en demandant de verser plusieurs dizaines de milliers d’euros à ses proches. La décision sera rendue d’ici trois semaines.

[avec leparisien.fr]

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Débatteur Passionné
Anesthésie-réanimation
il y a 9 mois
Je continue à donner mon avis sur l'article plutôt que sur les faits. Une fois encore, Egora, l'article permets difficilement de se faire une idée des faits. Ils sont plutôt mieux rapportés que dans d'autres articles. Cependant on ne sait rien des délais d'attente aux urgences dans un état présumé stable, ni de la présence (ou non) policière à ce niveau. Il semble pourtant relativement évident qu'un détenu doit faire l'objet d'un circuit particulier dans un service et au mieux dans une unité médico-judiciaire. Pour la prise en charge de crises convulsives récidivantes, le piège est effectivement de les différencier de simulation mais il existe nombre de moyens d'en faire le diagnostic différentiel. Idem pour de "simples" crises d'agitation. En tout cas le tazer n'est pas un moyen de traitement et l'expert (donc l'avocat) défend à juste titre l'option d'une anesthésie générale et d'un scanner pour, en cas de doute, au moins éliminer une cause organique à ce que l'on est en droit de qualifier d'état de mal épileptique. Le temps de réanimation survient trop tard. Les liens du Parisien montrent une façon peu orthodoxe de l'hôpital de gérer les urgences avec une régulation déportée du centre 15. Je n'en connais pas l'organisation fine mais le fait qu'elle soit faite par l'hôpital (ou le SAS) à l'insu des patients et validée par l'ARS me parait également critiquable et ce d'autant qu'elle ne modifie l'adressage des patients qu'à la marge: c'est un bien gros investissement pour bien peu de résultats... À moins que cela ne se fasse que par le personnel dédié aux urgences où c'est alors un autre scandale.
 
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