Contre l’accès direct aux orthoptistes, les ophtalmos entament un mouvement de grève

22/10/2021 Par Louise Claereboudt
Spécialistes

Dénonçant l’article 40 du projet de budget de la Sécurité sociale pour 2022, qui prévoit la primo-prescription de correction visuelle par les orthoptistes sans examen médical, les ophtalmologues ont entamé un mouvement de grève ce vendredi 22 octobre qui durera jusqu’au 31 octobre. Ce vendredi matin, ils manifestaient devant le ministère de la Santé pour demander la suppression de la mesure.   L’article 40 du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLSS) pour 2022 constitue "un véritable danger" pour les soins en ophtalmologie, prévient le président du Syndicat national des ophtalmologistes de France (SNOF), à l’origine de l’appel à la mobilisation ce vendredi. Alors que le texte est actuellement en examen à l’Assemblée nationale, le syndicat alerte sur le risque de permettre un accès direct aux orthoptistes pour la prescription de lunettes et lentilles. Environ 300 ophtalmologues se sont rassemblés ce vendredi matin devant le ministère de la Santé pour demander le retrait de cette mesure. L’article 40 prévoit en effet que l'orthoptiste puisse "réaliser un bilan visuel et prescrire des verres correcteurs et des lentilles de contact oculaire", et ce "sans prescription médicale et sans être placé sous la responsabilité du médecin". Mais aussi que les auxiliaires médicaux puissent "réaliser chez l’enfant le dépistage de l’amblyopie et celui des troubles de la réfraction, selon des critères d’âge fixés par décret".  L’objectif de cette mesure est de pallier les délais de rendez-vous, très importants dans certaines zones sous-denses du territoire selon le Gouvernement. Un argument non justifié selon le Dr Thierry Bour, qui dénonce sur Twitter un "un changement radical du système de santé" alors que "la France est la première en Europe pour le dépistage du glaucome et que les délais de rendez-vous tendent largement à s’améliorer". Le Dr Bour juge l’étude de la Drees de 2018 sur laquelle s’est basée le Gouvernement pour estimer les délais de rendez-vous "caduque". Alors que la Drees évaluait à 80 jours le délai médian pour les consultations périodiques, une enquête du Snof, menée en septembre dernier, indiquait, elle, un délai médian de 26 jours pour les consultations périodiques (21 jours sur Internet), contre 42 jours en 2019 et 66 jours en 2017.

Le syndicat avait dès le départ dénoncé ce transfert de compétence qui constitue, selon son président interrogé mi-octobre par Egora.fr, une "démédicalisation de l’offre de soins". Le Snof a ainsi appelé à la mobilisation de l’ensemble de la profession avec un mouvement de grève, entamé ce vendredi et devant se poursuivre jusqu’au 31 octobre, pour demander la suppression de l’article 40. En effet, selon le Snof, 94% des ophtalmos sont opposés à l'ouverture de la primo-prescription aux orthoptistes sans contrôle médical. Il alerte sur une éventuelle "menace sérieuse sur la qualité de la prise en charge des soins oculaires" (89% des ophtalmos craignent cette perte de chance selon le Snof) et s’inquiètent d’une hausse éventuelle des cas graves, qui auraient pu être détectés grâce à une prise en charge médicale. Selon le syndicat, "36% des patients venus pour un contrôle de la vue se voient diagnostiquer une autre pathologie".

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