"Pas correctement rémunérée" : un tiers des médecins traitants songent à arrêter la visite à domicile
Une enquête menée par l’URPS Ile-de-France montre que si les médecins généralistes libéraux sont toujours attachés à la visite à domicile, nombreux envisagent d’arrêter d’en faire du fait de sa faible rémunération.
72%. C’est le pourcentage de médecins généralistes franciliens, exerçant en cabinet, qui réalisent encore régulièrement des visites à domicile, révèle l’URPS Ile-de-France. Celle-ci a réalisé une enquête par courriel auprès des 8000 médecins généralistes et gériatres libéraux de sa région pour déterminer la place de la visite à domicile dans leur pratique. Objectif : éclairer le débat "dans un contexte où les pouvoirs publics cherchent la voie entre les économies". Au total, 974 praticiens ont répondu à cette enquête.
Les résultats, publiés ce jeudi, montrent que les 72% de généralistes exerçant en cabinet qui réalisent régulièrement des visites suivent en moyenne 32 patients à domicile dans leur patientèle. Seuls 23% d'entre eux déclarent être en situation de prendre de nouveaux patients à domicile. Dans 68% des cas, le médecin réalise entre 1 et 5 visites par semaine pour des patients qui sont plus fréquemment âgés de plus de 80 ans. La plupart du temps, les visites se déroulent au domicile du patient ou en Ehpad, et sur la pause déjeuner (de 12h à 14h pour 54% des répondants).
S’agissant des patients chroniques, la fréquence des visites à domicile est d’une fois par trimestre pour 72% des répondants, tous les mois pour 14%. "La distance moyenne entre le cabinet et le domicile des patients est de 4,6 km avec un temps de déplacement en moyenne de 30 minutes et un temps de consultation d'environ 45 minutes", apprend-on. Les médecins se déplacent majoritairement en voiture (65%) mais aussi à pied (20%) et à vélo (12%).
Lorsqu’ils n’ont pas la capacité de répondre favorablement à la demande de visite de leurs patients, les médecins traitants orientent vers les associations de visites à domicile dans 39% des cas, vers le 15 dans 37% des cas ou vers les urgences dans 15% des cas. "Très rares sont ceux qui font des visites à domicile pour un patient en dehors de leur patientèle, seulement 7%", peut-on lire. Ils sont encore moins nombreux à répondre à une demande de visite régulée par le 15, seulement 3,4%.
Si la quasi-totalité des médecins estiment que les visites à domicile peuvent permettre le maintien à domicile des personnes âgées ou des personnes dépendantes (92%) et considèrent qu'elles peuvent éviter des recours aux urgences (91%), ces derniers expriment une forme de lassitude. Ainsi, 37% des médecins traitants exerçant en cabinet songent à arrêter d’en faire dans un "avenir proche", note l’URPS, qui alerte sur "la fin programmée" de la visite à domicile.
Plusieurs raisons expliquent cette lassitude. En premier lieu, le manque de valorisation de cette pratique : 96% des répondants jugent que la visite à domicile n'est pas correctement rémunérée. Les difficultés de circulation et de stationnement sont aussi évoquées comme des éléments incitant à l’arrêt des visites.
Un doublement des tarifs ?
L’URPS a également sollicité les médecins qui exercent au sein d’associations de visite. Si la visite à domicile demeure, pour 50% d’entre eux, l’activité principale ou exclusive, ces derniers apparaissent également éreintés. Ainsi, 35% d’entre eux envisagent de jeter l’éponge sous peu. Autre signal d’alerte : "la prise en charge des patients en centre de soins non programmés et en téléconsultation se développe au détriment de la visite" ; celle-ci pourrait "disparaitre à terme, dans un contexte de vieillissement des médecins, d’insécurité et de dévalorisation de l’exercice de la visite", met en garde l’URPS.
Le rôle des médecins exerçant au sein d’associations de visite est pourtant essentiel, souligne l’Union. Ils sont "les seuls à réaliser des VAD dans le cadre de la permanence des soins à la demande du centre 15 entre 20h00 et 8h00 et le week-end : ils sont le seul recours libéral en effection en nuit profonde" ; "ils interviennent aussi sur demande du Centre 15 en journée dans certains départements" évitant "un grand nombre de recours aux urgences". Leur activité est, par ailleurs, plus tournée sur la pédiatrie – souvent le premier motif de recours à la visite pour ces praticiens.
"La visite à domicile permet de maintenir 9 patients sur 10 chez eux, plutôt que de les hospitaliser. Il faut encourager la visite à hauteur de ses enjeux", plaide la Dre Valérie Briole, présidente de l’URPS médecins, à la lumière de ces résultats. D’autant qu’une majorité de médecins demeurent attachés à cette pratique.
Pour "sauver" la visite à domicile, plusieurs solutions ont ainsi été mises sur la table, avec, en priorité, une revalorisation des tarifs. Pour les médecins franciliens sondés, le bon tarif pour une visite à domicile de jour serait entre 70 et 80 euros, de 100 euros en début de nuit à 140 euros en nuit profonde. Actuellement, les tarifs sont de 36,50 euros en journée, 65 euros en début de nuit et 70 euros en nuit profonde. Ils réclament ainsi un quasi doublement de l’ensemble des tarifs.
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